
Cependant ces Hottentots, aussi-bien que ceux qui habitent
plus loin dans Rogge-veld , é.toient autrefois nombreux et
puissans, 'et la Cause de leur appauvrissement, est la meme qui
a occasionné la ruine de la plupart des Hottentots , eur
inexpérience et l’avidité -des Hollandois. Mais, par une juste
réaction, toutes leurs vexations leur ont été plus nmsi
qu’ avantageus es.
La Compagnie faisoit le commerce par échange avec ces
Hottentots ; il a cessé par les injustices et les violences des
préposés envoyés par le gouverneur , qui sembloit les autoriser
par sa coupable indifférence. Cet atroce et stupide agent
ne voyoit pas combien les intérêts de la nature s’accordoient
avec ceux de la Compagnie , dont il paroissoit uniquement
occupé. Le détachement commandé par un caporal , qui. en
voyoit pour troquer de l’arrek, des perles de. Terre , u er
et autres objets semblables contre des boeufs destinés a la boucherie:,
prenoit aussi des v a c h e s d e s veauxet des. moutons :
en outre, ces échanges ne se faisoient pas toujours de bonne
grâce de part et d’autre; on employoit quelquefois la violence
envers les Hottentots ; on leur, prenoit leurs bestiaux
chez eux et dans les pâturages. On avoit aussi la bassesse de
mêler de l’ eau dans l’arrek qu’on leur donnoit. Un trafic aussi
peu avantageux dégoûta bientôt les Hottentots. Les uns ne
se. soucièrent plus d’augmenter leurs-troupeaux , les autres
abandonnèrent entièrement leur village., se mirent à. enlever
ceux des colons qui empiétaient sans cesse sur leur pays.
La Compagnie ne profitait pas toujours des vexations qui
dévoient un jour lui devenir si. funestes. Il y a mille exemples
qui prouvent que ses agens n’avoient pas. plus de fidélité envers
elle , que d’humanité envers les. Hottentots.
Il n’y a pas long-tems qu’un caporal , nomme Feldmann ht
un échange de cinq cents boeufs , et n’en livra que cinquante
à la boucherie de la Compagnie.
Mais on n’entend plus parler de toutes ces infamies depuis
l’établissement dés colons'dans cette contrée. Ils sont maintenant
assez riches en bestiaux pour pouvoir en fournir abondamment
à la Compagnie. Néanmoins si l’on jugeait à propos
de relever cette branche de commerce, on ne pourroit le
faire qu’avec les Caffres ou les Namaquas , qui ont beaucoup
de bestiaux , et dont le pays n’a pas encore été entamé par les
Européens , et qui conséquemment n’en ont pas éprouvé d’injustice.
Les environs de Boeke-land et leurs habitans , méritent bien
de fixer notre attention , et le lecteur ne. sera point fâché que
je les-lui'fasse connoître avec quelques détails.
Nous avions à l’oriènt les montagnes de Rogge-Veld; plus
près', celles de Hautans-rivier, au nord; et une autre chaîne de
montagnes , derrière laquelle est située , dit-on , une plaine
immense et unie, ou se trouvent plusieurs cuves à sel. Toutes
ces montagnes sont très-hautes et dominent celle de Boeke-
land , qu’on nomme aussi Bas du Boekeveld. Il y tombe rarement
de la neige, malgré son élévation. La plaine située au-delà
est habitée par les Hottentots Boschismans , c’est-à-dire , qu’ils
possèdent le pays le plus' mauvais , le plus maigre, le plus
stérile et le plus froid de la partie méridionale de la pointe
de l ’Afrique': vers le nord-est , depuis celui des Namaquas,
en traversant Rogge - Yeld jusqu’aux montagnes de neiges ,
ce sont les plus pauvres et les plus misérables des Hottentots.
Il n’y en a qu’un très-petit nombre parmi eux qui possède
des bestiaux ; ils n’ont pas toujours une hute pour leur servir
d’asyle , ni même une peau pour s’envelopper. Ils mènent une
vie errante et vagabonde , ne vivant que de rapine et de vol.
Un paysan digne de foi m’assura que ces pauvrès Hottentots
passent la nuit dans des trous , où ils s’entassent lès uns sûr les
autres ; celui qui se trouve dessus les autres se couvre d’une
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