
466 1^ 5. N O U R R I T U R E
C H A P I T R E V I I I .
-« N o u r r i t u r e des habitons de Java. — Description et
usages des principaux végétaux de cette isle.
L es Orientaux, particulièrement les Indiens et même les
Européens transplantés chez eux , se nourrissent principalement
de végétaux ; de manière que le chapitre qui traite de leurs
alimens , devient naturellement un traité de botanique exotique.
: .
Quoique Y opium (1) ne soit pas proprement un comestible,
' les Indiens en font une si grande consommation , que cette
drogue doit tenir la première place parmi leurs objets de première
nécessité : ils en mâchent moins que les Turcs; mais ils
'en font une espèce de marmelade qu’ils mettent au-dessns. de
leur pipe quand elle est pleine-; quelques bouffées suffisent pour
les étourdir et les enivrer : mais quand ils en fument une trop
grande quantité , ils deviennent furieux et veulent' s'entre-tuer.
Quand un homme , ainsi enivré d’opium, coure dans Tes rues
en criant amok, amok , le premier passant a droit de le tuer : il
est proscrit par la loi,: g »
La majeure partie de cette denrée vient du Bengale et forme
une riche branche de commerce, que la Compagnie s’ est réservée
exclusivement : elle a décerné les peines les plus sévères
contre quiconque en passerait en contrebande. Quelques gros
(i) Qu’ils nomment amphioun. Tous
les Orientaux aiment passionnément
l ’opium. Cette drogue donne pour
quelques heures du ton à leurs facultés
physiques et morales , absorbées par
la chaleur du climat et par l’excès des
jouissances; mais ils retombent bientôt
dans leur apathie ordinaire. Les
Chinois sont aussi très-friands d’opium ;
mais le Gouvernement leur en interdit
l’usage. Note du rédacteur.
D E S H A B I T A N S DE JAVA. 467
capitalistes qui occupent ici les premières places et.que l’on
nomme fermiers-généraux', ont affermé à un très-haut prix le
privilège de vendre de l’opium ; ils le louent ensuite à des
marchands en détail , ou bien ils leur vendent très-cher des
parties d’opium : eeux-ci les revendent en détail aux Indiens.
Certains nids d’oiseaux (1), que j’avois déjà.vus au Cap de
Bonne-Espérance, se mettent ici dans les soupes comme un
ingrédient à la fois nourrissant et de bon goût ; ces nids sont
composés de fils engelés qu’on fait dissoudre dans l’eau chaude
et qui deviennent alors transparens.
Ce mets n’a pas beaucoup de goût, mais il se digère très-
aisément et est très-nourrissant : on trouve beaucoup de nids
d’oiseaux dans les montagnes de l’île , et c’est un article de
commerce très-important, sur-tout en Chine : la Compagnie
se l’ est réservée, et l’afferme ordinairement au plus offrant et
dernier enchérisseur.
On confit ou l ’on fait mariner dans le vinaigre beaucoup
de racines, de fruits, de légumes, tels que les choux-fleurs,
des concombres , de l’écorce de melon , les racines aromatiques
du bambou , que l’on transporte de Chine en Europe , et même
(1) Ÿenova, yenika, et vulgairement
yens, et dans nos pharmacies, nidus
avis. Ils ressemblent à un petit plat ou
à une moitié de limon. Les meilleurs
sont blancs et clairs presque comme du
talc. Ils deviennent durs comme un
morceau de cuir. On en trouve à Bornéo
, à Java, dans les îles Moiuques, à
Cambaie et dans la Cocliin chine. Les
oiseaux qui construisent ces nids sur
des rochers, y emploient, dit-on, de
petits poissons, et sont de l’espèce des
hirondelles. Il sort de leur bec un jus
gommeux, qui leur sert à coller leur
nid sur le. rocher. On prétend qu’ils
emploient aussi à la construction de
leur nid la graisse qui nage sur la mer
comme les hirondelles font de la terre
glaise. On prend ces nids après que les
petits sont envolés. Voyez Duhalde
Descr. de la Chine, t. II, p. t5q, édit.
in-4°. Koempferii amoenitates exolicoe-,
p. 833 ; et la curieuse notice de Jean
Hooyman , intitulée Beschryving des
vogël neljes ( Descript. des nids d’oiseaux),
dans les Verhandelingeti van
hëï Bqtaviaasch, Ctc. t. III«, p. i 45.
Note du rédacteur.
N n n 2