
semble, et se mettaient à rire à gorge déployée: les plus curieux
regardoient derrière ce miroir et étaient bien étonnés de n’y
trouver personne-.
Toute cette borde nous parut composée d’hommes bien faits,
bien adroits et braves. Ils -se. parent d’aigrettes qu’ils font avec
les crins de la queue de différens animaux , ou avec leurs cheveux.
Quelques-uns portent des courroies de peau, des perles
ou grains de verre, qui faisoient plusieurs fois le tour de leur
corps : mais leur ornement favori consiste en plaques de cuivre
ou de laiton poli, ovales, longues ou carrées; ils les nettoient
fort bien et se les attachent avec des cordons, soit aux cheveux ,
au front, sur la poitrine , ou même sur la nuque du col et aux
fesses. Quand ils en ont beaucoup, ils en mettent tout autour
de-leur tête.
Mon compagnon de voyage avoit sur lui un des médaillons
destinés aux peuples du pôle méridional, et dont on avoit eu
soin d’approvisionner les vaisseaux destinés à faire des découvertes
dans ces parages. Il donna ce médaillon à un Caffre,
qui nous témoignoit la plus grande confiance : ce cadeau lui fit
tant de plaisir, qu’il voulut nous accompagner, et ne nous quitta
qu’à notre retour dans sa horde : pendant tout le voyage, il
portait son brillant médaillon suspendu au milieu du front.'-
Leur costume était à-peu-près le même que celui décrit
plus haut (1). Les uns avoient un sac de peau , de forme
conique, avec quatre petites bandes de peau passées autour du
corps , et dans lequel ils conservaient leur tabac : d’autres se
paroient de colliers de coquillages , qu’on nomme pucelages ou
monnoie de Guinéé (2), enfilés dans une corde, à l’extrémité
(1) Voyez page 229.
(2) Cyprea moneta. C’est une espèce,
du genre des porcelaines. Elle est
p va le, un peu déprimée’, longue de
sept lignes, large de quatre lignes pu
un peu plus ; blanchâtre ou jaunâtre,
bleuâtre sur le dos lorsqu’elle est .dépouillée
, bordée, noueuse, avec une
de laquelle pendoit une écaille de tortue qui renfermoit de la
graisse de bouhou, avec laquelle ils se frottent; ils avoient
presque tous une poignée de javelots à la main.
Leurs-cabanes sont couvertes de nattes de jonc aussi fortement
tissues que leurs paniers, dans lesquels ils portent de l’eau
ou du lait sans .en perdre une seule goutte.
Le pays qu’habite cette horde de Caffres est rempli de toute
sorte de gibiers, et conséquemment très-dangereux, à cause
des bêtes féroces : nos boeufs de trait, qui pouvoient d’un moment
à l’autre devenir la proie du lion , nous causoient de bien
vives inquiétudes.
Nous trouvant trop foibles et trop peu armés pour résister
en cas d’attaque , aux naturels, dont nos Hottentots n’ enten-
doient que bien imparfaitement la langue , nous essayâmes
d’enrôler ici avec nous, une bande de Hottentots à qui nous
promîmes du tabac. et différens colifichets de leur goût, avec
l ’assurance de tuer autant de buffles qu’il leur en faudroit pour
leur consommation : nous en eûmes bientôt plus que nous n’en
Voulions , et notre troupe se monta tout-à-coup à plus de
cent personnes. .
Le 10, nous séjournâmes dans le pays de Krakakama, qui-
est riche en pâturages, en bois, et qui abonde en toute- sorte
de gibiers, que les colons laissent assez paisibles. On y trouve
des buffles, des éléphans, des licornes (1), des zèbres (2), divers
antilopes , et sur-tout des troupeaux nombreux de gazelles
(3).
gibbosité sur le dos. Les nègres en ornent
leurs bonnets , leurs colliers, et
s’en servent en outre comme d’une
sorte de monnoie. Lam.
(is) Qu’est-ce que M. Thunberg'entend
ici par licorne ? Celle des anciens
est un animal fabuleux ■ la dent ou corne
du narval ( monodon ) passoit pour lui
appartenir. Lam,
(2) Zébra zvagga, equus quagga.
(3) Capra dore as.