
C H A P I T R E VI .
D i f f é rjs N t e s observations sur la Zoologie du Cap
de Bonne-Espérancç.
L e rhinocéros porte sur l’ extrémité de son n ez , une corne
qui jouit d’une grande réputation parmi les habitans de la ville
et de la campagne, car ils lui attribuent des vertus merveilleuses.
Cette corne est de forme conique, épaisse et large du bas ,
arrondie du hautcCelle des vieux rhinocéros a quelquefois un
pied de long; quelques-uns , que l’on nomme à cause de cela
rhinocéros à double corne (1) , en ont une plus- petite à deux
ou trois pouces de la première ; elles sont à-peu-près de la
même couleur que celles des" boeufs. ' ;
Mais revenons aux propriétés qu’on leur attribue.
Non-seulement on.la regarde comme un objet rare , on l’emploie
encore comme un remède pour certaines maladies , et
sur-tout comme un préservatif contre le poison; on l’administre
râpée aux enfans , pour les guérir de la colique. C’est un préjugé
généralement répandu, qu’un gobelet fait avec cette corne,
et qui renfermeroit une liqueur empoisonnée ne tarderoit pas
à la faire fermenter au point de n’en pas garder une "seule
( 1 ) Twee hornings hoom. O n t ro u v e
dans l e V o y a g e du P , T a c h a r d u n e
g r a v u r e as sez f id e lle d e c e t anim a l.
Note du rédacteur.
L in n é e a d is tin g u é c e r liin o c é ro s
com m e étan t u n e e sp è c e p a r t ic u liè r e à
l ’A f r iq u e , e t m êm e P a lla s p en s e q ue
c ’es t à c e tte e sp è c e qu ’ap p a r t ien n e n t
le s o ssemens q u ’ i l a t ro u v é s dans l e
n o rd d e la R u s s ie . A u r e s te , p lu s ieu r s
z o o lo g is t e s , e n t r e a u tr e s E r x le b e n ,
r e g a r d e n t l e rh in o c é ro s à d e u x corne s
com m e u n e v a r ié t é d e c e lu i q u i n ’ en a
q u ’u n e s e u le . I l e s t as sez b ie n r e p r é s
e n té dan s l e V o y a g e d e B r u c e ( v o l .
Y , p l . 25 ) . Lam.
goutte. Quant à moi, j’ai essayé de mettre diflerens poisons dans
ces cornes taillées en gobelet, ou dans leur état naturel, jeunes
ou vieilles, sans m’être jamais apperçu de la moindre fermentation;
la solution du mercure sublimé corrosif, faisoit monter
quelques bulles d’air renfermées dans les. pores de la corné.
On prétend que celles des jeunes rhinocéros sontles meilleures
et les plus sûres ; mes expériences cependant n’ont pas été
plus heureuses sur les unes que sur les autres.
On en fait des gobelets et on les incruste en or et en argent.
Ces gobelets sont si estimés, qu’on les présente aux personnes
les plus distinguées. Ils se vendent jusqu’à chiquante rixdalles.
Dans mes différens voyages à la montagne de la Table , je
vis des daims et des babouins nichés dans ses différentes ouvertures.
On apperçoit sur-tout les premiers sur la cime même
de la montagne, au moment où le soleil se lève ; ils viennent
là jouir de la clarté de ses, premiers rayons. Il faut tirer ces
singes avec bien de la justesse, et se servir d’un excellent
fusil, afin qu’ils restent sur le coup , car s’ils ont encore la force
de se traîner, ils vont se cacher dans des trous , où il est
impossible de. les prendre ; ceux qui sont blessés mortellement ,
se débattent encore long-tems avant de rendre les derniers
soupirs.
Les babouins sont très-nombreux et incommodes pour les
voyageurs, sur lesquels ils font rouler des pierres de différentes
grosseurs. Ils se tiennent courageusement sur la cime des
rochers , à la portée du fusil; cette arme est indispensable pour
les débusquer et les chasser à une distance d’où l’on ne puisse
pas redouter leurs pierres. Quand elle rate , ils regardent bien
tranquillement brûler l’amorce ; mais quand ils se décident à
prendre, la fuite , c’est un spectacle assez curieux de les voir
courir avec leurs petits sur leur dos , faire des sauts surpre-
nans, et franchir des hauteurs extraordinaires.
On enchaîne ces babouins à des perches , et rien de plus
. A a 1