
gers. Les objets les plus remarquables sont un grand, rocher
rond , situé dans le port, et nommé Ark ; un autre nommé le
rocher des Romains ; plus loin à l’ e s t, l’isle Malagas ; une maison
appartenant à la Compagnie , et habitée par le Résident j
un hôpital, une douane, une boucherie, et quelques maisons
particulières. Un peu plus loin se trouve le jardin, de la Compagnie.
En quittant Bay-Falso, nous eûmes à traverser des plaines unies
et sablonneuses pour arriver à Muysenberg (î), dépôt de la pêche
de la Compagnie pour le Cap. Des espèces de petits lacs qui n’a-
voient pas' encore été desséchés par les chaleurs , étoiént épars
çà et là dans les plaines de sahle ; les insectes'et les vers'qui
nageoient à la surfaçe de ces eaux , servoient de pâture à des
ilamans (a)., dont le plumage blanc et rouge foncé , ne forme pas
le moindre ornement de cet asyle. Nous en tirâmes un à qui nous
cassâmes l’ aile ; et quoiqu’il ne pût plus voler , nous eûmes
encore beaucoup de peine à l’attraper , parce qu’ avec ses longues
jambes , il traversoit des flaques d’eau d’un pied de profondeur
, et couroit beaucoup plus vite que nous.
C H A P I T R E I I I .
J\ra u f r jg e d’un vaisseau de la Compagnie. — Ac tion héroïque
d ’un gardien de la ménagerie. — Naufrage mémorable.
L e premier juin , il s’éleva un vent très-violent de nord-ouest,
accompagné de terribles rafales et de pluie 3 il continua la
nuit suivante avec tant de véhémence, qu’un des quatrevais-
‘ Seaux de la Compagnie qui étoit encore en rade , eut lés cables
de ses quatre ancres successivement rompus, et fut je.tté sur un 2
[ 1 ) M o n ta g n e a u x so u r is . (2) Flamingo. Phoenicopierus ruher.
baiio
banc de sable yis-à-vis le rivage de Zout-rivier , où le poids de
sa cargaison le fit fendre- en deux. Les flots montoient à une
telle hauteur , et la rivière étoit si extraordinairement enflée ,
qu’on pouvoit à peine la traverser. Quoiqu’il soit expressément
défendu aux vaisseaux de la Compagnie de rester ici en rade
depuis la mi-mai jusqu’à la mi-août, il arrive pourtant que le
gouverneur permette à quelques-uns d’y rester, a cause des
inconvéniens et des difficultés qu’on trouve à charger àFalso-
bay.
Il.seroit difficile d’évaluer la perte que la compagnie des Indes
orientales essuya, par le naufrage dont je viens de parler 5 et pour
comble de malheur, la'plu s grande partie de l’équipage périt
de la manière la plus lamentable , faute de secours. Soixante-trois
hommes' seulement se sauvèrent, et cent-quarante-neuf furent
noyés 5 e t je dois avouer ic i, à la -honte de l’humanité, que
l’on mit beaucoup plus d’activité à sauver les marchandises,
qu’à porter des secours à ces infortunés : ceux même qui sa-
voient nager ne furent pas plus, heureux que les autres 5 Car
entraînés par les vagues , oudls venoient se briser les membres
et le corps contre les rochers, ou ils étoient repoussés au milieu
de la mer. .
Immédiatement après le naufrage du bâtiment, dès la pointe
du jour on prit les plus sages mesures pour sauver les marchandises
appartenantes à la Compagnie 5 mais je ne remarquai
pas qu’on-:se fût seulement occupé des hommes. Trente soldats
de, la citadelle , commandés par un jeune lieutenant, eurent
ordre de se rendre au lieu du naufrage , et de bien veiller à ce
qu’il ne se commît aucun vol. On dressa en même tems une
potence avec un placard qui menaçoit de.la corde , sans aucune
forme de procès , tous ceux qui approcheroient. Ainsi les bourgeois
compatissans qui étoient venus de la ville exprès pour donner
quelques secours aux malheureux , furent obligés de retourner
sur leurs pas, après .avoir été témoins, ainsi que moi ,
Tome I . Y