
On m’assura que le fumier qui provient des bestiaux nourris
avec cette plante, n’est pas bon pour l’engrais des terres.
La contrée nous parut plus vas ter et plus froide.
Le 01 nous arrivâmes à la ferme d’Aloven-Smidt, vis-à-vis
Hottentots Holland. Tout le terrein est entre-coupé de collines
et de coteaux- disposés en travers.
Le 2 novembre nous prîmes notre gîte dans la ferme, de
madame Bruel. Nous franchîmes à cheval une des collines .transversales
de la montagne, et nous nous trouvâmes ensuite dans
une espèce de vallée.
Les montagnes de la gauche décrivent ici une courbe vers
l’ouest-sud-ouest.
De-là nous allâmes à la ferme de Philip Bota, située vis-à-
vis Tiger-hoek. (1). Ce dernier. endroit est derrière des montagnes
qui font partie de celles de Hottentot-Holland.
La chaîné de montagnes qui se prolonge depuis Witsemberg
jusqu’ici., paroît s’incliner vers l’est et faire une espèce de
solution de continuité. Mais en les- examinant avec beaucoup
d’ attention, on retrouve un peu plus loin d’autres-côtes qui font
partie de la même chaîne.
Nous traversâmes ensuite la rivière de Clas-vogt, qui-doit son
nom à un colon ainsi appellé, et qui fut tellement écrasé et moulu
par un éléphant, qu’au ne pouvoit pour ainsi dire retrouver ses
os dans la poussière. Nous poursuivîmes notre marche pour nous
rendre, dtms le cours-de la même journée, à la Terme de'Gert-
nels auprès de Kokmans-kloof-en-rivier (2).
Les ruisseaux produisent ici des souchels longs de deux aunes,
gros comme le tuyau d’une pipe et remplis de moelle (3). Ils
(1) Coin du tigre. ( matière aux tapis ). Je l ’a i désigné
(2) Montagne et rivière des cuisi- sous le nom de cyperus texlilis> soujiieirs.
'd i e t aux tapis,
(3) Ce jonc se nomme matje goed
servent à tresser des tapis dont les colons se servent pour
couvrir leurs voitures ; ils couchent mêmq dessus. Ces. tapis
sont assez moelleux et très-maniables.
Le 3 nous allâmes à la ferme de Droskis : il ne pleut ici et
dans les environs que par le vent de sud-est. C’est absolument
l’opposé de ce qui arrive au Cap.
Le 4 nous demandâmes l’hospitalité au célèbre Jacques Bota ,
vieillard de quatre-vingt-un ans,-qui avait eu douze fils, et
comptait plus de cent petits-enfans. Il ne faut pas attribuer sa
renommée à cette prodigieuse fécondité, qui n’est pas très-rare
dans une colonie où l’on se marie de très-bonne heure , et où
la population est très-abondante. 11 est connu par une aventure
assez curieuse pour que j’en fasse ici mention.
Bota étoit un des plus fameux chasseurs-de la colonie; il a
même amassé une fortune assez considérable à vendre des dents
d’éléphans : à l’âge de quarante ans, il s’avisa un jour de tirer un
lion dans des broussailles fort épaisses ; l’animal tomba sur le
coup, mais il avoit un compagnon que notre chasseur n’avoit
pas apperçu, et qui fondit sur lui avant qu’il eut pu recharger
son fusil : l’animal furieux, non-seulement le blessa cruellement
avec ses griffes, mais le mordit au bras et le laissa pour mort
sur la place. Le lion dédaigne de poursuivre sa vengeance sur
un cadavre, à moins qu’il ne soit pressé par la faim. Celui-ci
probablement avoit bien déjeûné.
Les domestiques de Bota recueillirent leur maître et le transportèrent
chez lui. Sa femme, personne active et intelligente ,
fit bouillir beaucoup d’herbes aromatiques et lava les plaies
de son mari avec cette décoction. Ces remèdes eurent les plus
heureux effets. Il se rétablit très-bien ; mais il resta tellement
incommodé du bras, qu’il n’a jamais pu porter un fusil sur
l’épaule, ni tirer un seul coup.
Ce chasseur m’apprit que dans sa jeunesse, les Hottentots
étoient encore si nombreux, que les colons chrétiens couroient