
i f fo H i s t o i r e E c c l e s i a s t i q u e .1
la reine leur mere de les leur envoïer pour ce fujet :
& Clotilde ravie de jo ie , les fit manger & les en-
vo ïa , difant : Je ne croirai pas avoir perdu mon fils,
fi je vous vois regner à fa place.
Quand ils furent arrivez | on les p r it , & on les fé-
para de leurs ferviteurs & de leurs gouverneurs. Alors
Childebert & Clotairc cnvoïerent Arcade homme
de confiance, porter à Clotilde des cifeaux & une
epec n u ë , & lui dire : Les rois vos fils demandent ce
qu’il vous plaît que l’on faiïe de ces enfans. Si vous
voulez qu’on leur coupe les cheveux & qu’on les
laide v iv r e , ou qu’on les .égorge tous deux. On n’a -
voit pris que les deux aînez : le troifiéme , fçavoir
Clodoalde , fut fauvé par des braves gens. Clotilde
cffraïée de cette propofition , &c outrée de douleur,
dit dans le premier tranfport de fa colere : Si on ne
les fait pas regner, j’aime mieux les voir morts que
tondus. Arcade vint promptement dire aux deux
rois : Exécutez vos deffeins, la reine y confent. Aufïi-
tôt Clotaire prit par le bras Theobalde l’aîné de fes
neveux âgé de dix ans, le jetta par terre , & lui enfonça
fous l’aiiTelle un couteau dont il le tua. Aux
cris de l ’enfant, Gontaire fon frere âgé de fept ans,
fe jëtta aux pieds de Childebert, & lui embraifa les
genoux en pleurant, en difant : Mon cher pere , empêchez
qu’on ne me tue-, comme mon frere. Childebert,
le vifage trempé de larmes j dit à . Clotaire :
Mon fre re , je vous prie de m’accorder- la vie de cet
enfant. Je vous donnerai pour lui tout ce qu’il vous
plaira. Mais Clotaire lui répondit en fureur : T u le
laiffera ou tu mourras pour lui. C ’eft toi qui m’as
engagé dans cette affaire^ & tu manques fi-tôt à ta
L i v r e t r e n t e -d e u x i e ’m e . 3 si
parole ? Childebert lui rejetta l’enfant, & Clotaire
le prenant lui perça le côté de fon couteau comme il
avoit fait au premier : puis il monta à cheval & s’en
retourna comme s’il n’avoit rien fait. Childebert fe
retiraauifi à la campagne, enfuite ils partagèrent en-
ièmble le roïaume de Clodomir. Ainfi fut accomplie
la prophétie de faint Avit abbé de M ic i, lors Su?-n-'-
qu’il.vouloir détourner le roi Clodomir de"faire ^ e£-ln' h^ c'
mourir le roi Sigifmond & fes enfans. La Reine Clotilde
fit mettre dans un cercueil les corps de fes deux
petits-fils, & avec un deuil extrême faifant chanter
des pfeaumes, les fuivit à l ’églife de faint Pierre
où ils furent enterrez. Enfuite elle fe retina à T o u r s ,
ou elle acheva fa vie dans les prières , les aumônes ,
les veilles & 1 exercice de toutes fortes de vertus ;
donnant libéralement des terres aux églifes, aux
monafteres & à tous les lieux de pieté. Enfin pleine Greg.iv.hiii.c.i.
d’années & de bonnes oeuvres elle mourut à Tours
du tems de l’évêque Injuriofus, vers l ’an j 45. Son
corps fut trarifporté à Paris, & enterré par fes enfans
Childebert & Clotaire dans le fanétuaire de la
meme eglife de faint pierre, à côté du roi Clovis
fon époux. C eft 1 eglife de ïainte Geneviève que Clotilde
avoit fait bâtir. Ses reliques y font encore, &
1 eglife honore fa mémoire le troifiéme de Juin. M*rtyr.t..
Le jeune Clodoalde aïant été fauvé du maffacre Id- ,n-c iS- vt"
fe coupa les cheveux de fa propre main , & renon- w * ss’ Be" h
çant au monde alla trouver faint Severin, qui de-
meuroit près de Paris enfermé dans une cellule, &
reçut de lui 1 habit religieux. Il pratiqua toutes
les aufteritez de la vie monaftique, & donna aux
monafteres & aux églifes cç qui lui reftoit d’héri-
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