
i Cî. H i s t o i r e E c c l e s i a s t i q u e .
heretique, 8c perfecuteur , 8c le lotie de fon applica-
** 11 tion à s’inftruire de la religion. Il eft rare , d it-il, jufques
i c i , d e v o ir qu’un roi barbare, occupé continuellement
des foins de fon royaume, foit touché
d’un defir fi ardent d’apprendre la fagelfe : il n’y a
d’ordinaire que des gens de lo ifir, oji des R om a in s ,
qui s’y appliquent fi fortement : les barbares fe piquent
d’ignorance, comme de leur propriété naturelle.
Les Vandales ni les autres nouveaux conquerans,
ne tenoient point à injure le nom de barbares ; 8c fe
le donnoient eux - mêmes , pour fe diftinguer des
Romains. Enfuite faint Fulgence entre en matière , 8c
traite dans le premier livre , des deux natures de Je -
fus-Chrift en une perfonne montrant principalement
qu’il a une ame raifonnable outre la d iv in ité :
dans le fécond il traite de l’immenfite du fils de
Dieu : dans le troifiéme, de fa paflïon, pour montrer
principalement que ce a ’eft pas la divinité qui
a fouffert. Le roi étonné de cette réponfe, n’ofa plus
riuc.i). faire de queftions à faint Fulgence,: mais un de fes
évêques nommé Pinta fut plus hardi , 8c faint Fulgence
lui répliqua par.un ouvrage particulier , que
4» Euig nous n’avons plus : car ce n’eft pas celui qui porte au
jourd’hui ce titre,
rv. Le roi Trafamond vouloir retenir faint Fulgen-
dçs.'ruïg™*" ce plus long-tems à Carthage ; mais les Ariens lui
dirent : Seigneur, il rend votre zele inutile : il a déjà
perverti quelques-uns de vos é v êq ue s , 8c fi vous
n ’y donnez ordre promptement nôtre religion périra.
Le roi céda à cette remontrance , 8c renvoya faint
/ if. Fulgence en Sardaigne. Pour dérober au peuple fon
départ, il le fit embarquer de nuit : mais les vent?
L i v r e T r e n t e - U n i e ’me. . 2.63
contraires arrêtèrent le vaiffeau fur la côte pendant
plufieurs jours : enforte que prefque toute la ville
s’y affembla pour lui dire adieu , 8c communia de
fa main. Voyant un homme vertueux nommé Ju -
liatée , qui s’affligeoit extrêmement, il lui dit : Ne
pleurez p o in t , nous reviendrons bien-rôt, & l’églife
catholique recouvrera fa liberté. Mais il lui recommanda
le fe c re t, craignant de paffer pour prophète
; 8c il en ufoit ainfi à l’égard de tous les dons
lurnaturels. Il ne demanda jamais à Dieu de faire
des miracles,.& fion recommandoit à fes prières des
malades ou d’autres affligez , il difoit : Vous favez ,
Seigneur, ce qui convient au falutde nos ames, que
vôtre volonté foit premièrement accomplie. Les
miracles, d ifo it-il, ne donnent pas la juftice : mais
la réputation, qui fans la juftice ne fert qu’à nôtre
condamnation.
Etant arrivé en Sardaigne il quitta fa première demeure
,-où il y avoir une grande communauté; & bâtit
un nouveau monafterc à fes dépens, près de Fégli-
fe du martyr S. Saturnin , loin du bruit de la ville ;
apresen avoir demandé la permiflion , comme il dev
o ir , àBrumafeévêquedeCaliari. Il y affembla plus
de quarante moines : leur faifant principalement ob-
fe rv e r, de n’avoir rien en propre : ce qu'il regardoit
comme i’effentiel de la vie monaftique. C a r , difoit-
il , un moine peut quelquefois être obligé par la
foibleffe de fon corps à prendre une nourriture plus
délicate : mais de s’attribuer la moindre propriété
de la moindre chofe, c’eft un figne d’orgueil ou
d’avarice. Il avoit grand égard à l’infirmité des
freres, pour donner à chacun félon fes befoins, 8c