
io H i s t o i r e E c c l e s i a s t i q u e ;
dites. Eugene répliqua : Il ne faut pas demande#
l’impoffible , j'a i dit que fi le roi veut connoître nôtre
toi , il peut envoyer à fes am is , c’eft. à-dire , aux
princes catholiques : j ’écrirai auifi à mes confrères ,
afin qu’ils v ien n en t, pour vous montrer avec nous
nôtre foi commune, & principalement l’églife R o maine
, qui eft le che f de toutes les églifes. Eugene
p a r lo ita in fi, non que l'Afrique manquât de per-
lonnes capables de réfuter lesobjeêtionsde leurs ad-
verfaires, mais pour faire venir des évêques, q uin ’é-
tant point fujets des Vandales leur parlaifent avec:
plus de liberté, Si qui puifent témoigner à toute la
terre l’oppreifion que foudroient les catholiques.
Huneric n'eut point d’égard à cette remontrance ::
mais il chercha divers prétextes, pour perfecuterles
évêques qu’il apprenoit être les plus fçavans. Il envo
y a une fécondé fois en exil l'évêque Donatien ij|
après lui avoir fait donner cent cinquante coups de
bâton. Il bannit de même Prefidius de Suffetule. Ii
fit battre Manfuetus, Germain, Fufculus Si plufieurs
autres. Cependant il défendit qu’aucun des fiens ne
mangeât avec les Catholiques, qui fe réjouirent de
cette dçfenfe.
Ily a v o itàC a r th 3 g e un aveugle nommé Felix, très-
connu dans la ville. Lanuitde l’Epiphanie , il lui fut
dit en fonge:Leve-toi, vas trouver mon ferviteur l’é-
v ê q u eE u g en e ,S ilu id isq u e je t ’a ie n v o y é à lu i. Et à
l’heure qu’il bénira les fonts baptifmaux, il touchera
tes yeux, & tu recouvreras la vûë. L ’aveugle croyant
que c’étoit un fonge ordinaire ne voulut pas fe lever
; s’etant rendormi il reçut le même ordre une fécondé
fois Si enfin une troifiéme avec de grands
reproches. Il éveille le garçon qui lui donnoit la a n>
main , il va en diligence à la bafilique de Faufte, &
après avoir prié avec beaucoup de larmes, il s’adref-
fe à un foûdiacre nommé Peregrin, le priant d’avertir
l’évêque, qu’il avoit un fecret à lui dire. L'évêque
dit qu’on le fit entrer. Le peuple chantoit déjà par
toute l’églife les prières noôturnes. L’aveugle déclare
à l’évêque fa v ifio n , Se lui d it: j e ne vous quitterai
point , que vous ne m’ayez rendu la vûë, comme le
Seigneur vous l’a ordonné. Eugene lui dit : Retirez-
vous , mon frere, je fuis un pecheur Se le dernier des
hommes, puifque Dieu m’a refervé à ces malheureux
tems. L ’aveugle lui tenant les genoux , repetoit la
même priere. Eugene voyant fa f o i , & preiTé par
l’heure de l’Office, marche avec lui vers les fonts ac compagné
de fonclergé. C ’étoit la coutume d’A f r ique
, comme de quelques autres églifes, de donner à
l ’Epiphanie le baptême lolemnel , comme à Pâques
& la Pentecôte.
L ’évêque Eugene étant arrivé aux fon ts, fe mit à
genoux,& avec de grands gemilTemens fit la bénédiction
de l’eau, & ayant achevé la priere,il fe le v a ,& dit
à l’aveugle: Je vous ai déjà dit,mon frere Félix, que je
fuis un homme pecheur,mais je prie le Seigneur,qui a
daigné vous vifiter,de vous donner félon vôtre foi,Sc
de vous ouvrir les yeux. En même tems il fit fur fes
yeux le figne de la croix, & l’aveugle recouvra la vûë.
L évêque le retint auprès delui,jufques à ce que tous
fulfent baptifez,de peur que le peuple ne l’écrafâten
s’empreifant pour le voir ; enfuiteonfit connoître le
miracle à toute l’églife. Félix accompagna l ’évêque,
marchant à l’au te l, & fit fon offrande en aéfion de
B i j