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i|<î H i s t o i r e E c c l es i a s t i q u e .-
mais plus b a s , étoient afiis les deux jeunes princes Bai-
file & C onftantin fes beaux fils. L ’empereur Nicephore
dit à Luitprand : J’aurois voulu vous recevoir dignem
en t, mais le mauvais procédé de votre maître ne l’a1
pas permis. Il a pris Rome comme une ville ennemie
fa it mou r ir , contre toute juftice, Berenger & A d a l-
bert ; fait périr plufieurs Romains par le fer ou par la
corde , ôté les y eu x aux uns, banni les autres : il s’eft
efforcé de fe foumettre par force plufieurs villes de
mon empire; & n’y aïant pû rcuilir, il vous en voie
nous épier fous prétexte de paix..
L ’évêque Luitprand répondit : M on maître n’a poinc
ufurpé la ville de Rome par vio lence, au contraire il l ’a
délivrée du joug des tyrans. N ’étoit-ellepas fous la puif-
fance des hommes effeminez & des femmes proftituées ?
Je penfe que vos predeceffeurs étoient alors endormis
eux qui portoient le nom d’empereurs Romains, fans
l’être en effet. Les papes n’ont-ils pas été les uns relég
u e z , les autres maltraitez : enforte qu’ils m anquoient
du neceffaire, & qu’on ne leur donnoit pas même par
aumône ? Adalbert n’a-t-il pas envoie des lettres inju-
rieufes à Romain & à Conftantin vos predeceffeurs >
N ’a-t-il pas pillé les églifes des faints apôtres ? Q u i de
vous autres empereurs a été pouilé de zele pour venger
c e t a tten ta t, ¿¿remettre l ’églife en fon premier luftre ï:
V o u s l’avez négligée, mais mon maître n’en a pas ufé
de m ême. Il eft venu des extrémitez de la terre délivrer
Rome des méchans, & rendre tout l’honneur & toute la
puiffance aux fucceffeurs des apôtres. Enfuite quand il
s*eftélevé des rebelles contre lui & contre le pape, il les
a punis comme des parjures & des facrileges fuivant les
Joix de J u ftin icn , de Valcntinien , de Theodofe , & des,
L i v r e c ï n q u a n t e - s i x i e ’m e .
autres empereurs. S’il ne 1 avoit fait , i l feroit lui-même ~
un tyran , injufte &£ cruel. Il eft clair que Berenger Si ^
Adalbert étoient devenus fes vaffaux Si qu’ils avoient
reçu de lui le roïaume d’Italie avec un fceptre d’or en
prefence de vos ferviteürs. Nicephore fe plaignit en-
fuite , de ce qu’Otton avoit attaqué les terres de fon
empire en Italie , c’eft-à-dire les dépendances de Be-
nevent Si de Capouë :;à quoi Luitprand r ép o n d it, Si
fit la propofition du mariage entre le jeune empereur
O tto n Si laprinceffe A n n e . Mais Nicephore différa d’y
répondre , Si dit que la fécondé heure étoit paffée, Si
qu’il étoit temps d’aller à la proceffion.
Elle fe fit ainfi. Depuis le palais jufques à l’églife de
fainte Sophie une grande multitude de marchands Si
. degensdu petit peuple, étoient rangez en haïe des deux
côteZ , armez de dards Si de petits boucliers, Si nuds
pieds pour la plupart. Les grands qui accompagnoient
l ’empereur en cette proceffion avoient des habits de
ceremonie , mais fi vieux Si fi u fe z , qu’ils auroientété
mieux, au gré de Luitprand, en leurs habits ordinaires.
Il n’y avoit que l’empereur qui portât de l’or Si des
pierreries ; mais les ornemens impériaux dont il étoit
chargé lui feïoient m a l , aïant été faits pour des hommes
de grande taille. Quand il paffa, des chantresplacez
à un lieu élevé commencèrent à chanter : V o ic i venir
l ’étoile du matin,l’aurore fe le v e ,la mort des Sarrafîns,,
le prince Nicephore : longues années à Nicephore.
Peuples adorez-le, ferv ez-le, foumettez-vous à fa puif-
fance. C e jour-là l’empereur fit manger l ’ambaffadeur
avec lui ; 8i entr’autres difcours il lui dit ; Vou s n’êtes;
pas des Romains, vous n’êtes que des Lombards. Luitprand
répondit : Nous autres Lombards, Saxons &