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regarda plus que comme fon maître , montrant aux
autres l’exemple d une obciiïance 8c d une humilité
parfaite.
La réputation de Fabbc Richard s’étendit b ien-tôt,
non feulement dans la France dont il étoit ib r ti, mais
dans tou t le roiaume de Lorraine : enforte que 1 empereur
Henri ena'iant oui parler, le fit venir auprès de
lu i, l’entretint avec p la ifir , & le rertVoia charge de
prefens. Il en ufâ ainfi plufieurs fo is , & s’étant informé
de l’origine & de l’état de ce monaftere , il lui
donna de quoile rétablir & le rebâtir magnifiquement.
Dans u n de ces voiages l’abbé mena avec lui le moine
Frideric, qui étant connu de toute la c o u r , & pa-
rentde l’empereur,étoit toujours traité avec grandhon-
neur. U n jour l’empereur étant avec les évêques & les
fèigneurs, Frideric que l’on avoit placé avec eux , v it
fon abbé affis beaucoup plus bas. Il fe leva d’auprès
de l’empereur , portant fon marchepied , fur lequel il
s’affic aux pieds de l’abbé. Cette aétion fut admirée &
loüée de tout le monde ; 8c fut caufe quel empereur fit
alFeoir auprès de foi l’abbé Richard Scie moine Frideric
eiifuite.
Tandis qu’on rebatiffoit le monaftere de faint Van*
n é s , Friderk vbiant des moines lès confrères, qui
avoienr honte de remueqlâ terre & enlever les décombres
: leur en montroit l’exemple le premier, aufii-bien-
que de prendre l’oifêau fur fès épaules & porter le mortier.
Le due Godefroi fon frere le trouva un jour dans
la cuifîne lavant ks écuelles; 8c dit en fo rçan t, que
cette occupation ne convenoit guere à un comte : mais
Frideric lui dit qu’il É tenoit fort honoré de rendfff
de tels fetvices à Laine Pierre Sç. fàiiit Cannes , patrons
du
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clu monaftere. Un des moines voulant un jour le dé-
chauflerpar ch a rité , il lui dit avec une faince indignation
: que me fe r t, mon frere , d’avoir quitté les honneurs
du fiecle, fi je reçois de mes frerèsfansneceflité
les ferv icesque l’on m’eût rendus dansle fiecle?Je ne
fuis venu ic i que pour fervir les autres. Son exemple
excita plufieurs feigneurs de fes parens, non feulement
a donner de grands biens à cette maifon, mais à em-
brafler eux-mêmes la vie monaftique. L’abbé R ichard
aïant été chargé du monaftere de S. Vaft d’A rra s, lui
en donna la conduite en qualité de p r é v ô t , & il mourut
l’an 1 o u .
L abbé Richard d evint un des trois reftaurateurs de
lad ife ip lin e monaftique dans l’empire François, les
deux autres é to ien tOdilon de C lu gn y & Guillaume de
D ijo n : on nommoit le premier Odiion le pieux ou le
débonnaire , à caufe de fa bonté : on nommoit le fé cond
G uillaume pardeflus la regie, à caufe de fa ferveur
auftere-, &c Richa rd étoit furnommé la grâce de Dieu ,
a caule de fa douceur. Baudri év êque de L ie g e , lui donna
1 abbaïe de Lobes, qui étoit très-riche, pour y rétablir
l obfervance, ôeenfuite celle de S. Laurent de Liege
. R o g e r évêque de Chaalons lui donna de même l’ab-
baïe de S. Pierre : le roi Robert lui donna celle de
Corb ie : B audouin comte de Flandres lui en donna plufie
u r s , S. Pierre de Gand , S. Am an d , S. R iq u ie r ,
S.Joife. Enfin on comptoic jufqu’à v in g t-u n mona-
fte r e s , dont il avoit pris la co n d u ite , tant àia priere
des eveques , que des princes. A p i es les avoir réform
e z , il y mit des abbez qu’il choifit entre fes difciple s:
mais il en gouverna trois par lubmême , outre faint
Vannes. En 101,1. il allâ à R om e , Ôc gagna les bon-
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