
12-4 H i s t o i r e E c c l e s i a s t i q u e .
main, redoublant ainiï par leur travail la rigueur du
n-ff- jeûne. Romuald a ïan tlû dans la vie des peres, que quelques
uns jeûnoient toute la femaine, hors le famedi &c
le dim an ch e , entreprit de les im ite r , & vécut ainfi
plus de quinze ans. Enfuite il remit au jeudi le foula-
gement qu’il prenoit le famedi : tant pour fe con fo r mer
à l’ufage de l ’églife Rom a in e , que pour rendre le
jeûne plus fupportable , n’étant que deux ou trois jours
de fuite. Il fit depuis la réglé des ermites de jeûner tous
les jours , hors le jeudi & le dimanche, aufquels ils
pouvoient manger des herbes, & ufer de toute forte
de boiifon ; mais pendant les deux carêmes de l’année
ils jeûnoient toute la femaine. Il défendoit aux autres
de paifer un jour entier fans manger , quoiqufil le fît
fouvent lui-même; & difoit que quiconque afpire à la
perfe c tion, doit manger tous les jours ; enforte qu’il
ait tous les jours faim.
ffra %om> n. 18. Le comte Oliban , à qui le monafterc de Cufan
a voit appartenu, étoit un feigneur de Catalogne chargé
de grands pechez. Il vint un jour voir S. Romuald,
& lui raconta toute fa v ie , comme en co n fe ifio n , après
quoi le faint homme lui d it , qu’il ne pouvoit fe fauver
qu’en embrafiant la vie monaftique. Le comte en fut
furpris, & dit quedes hommes fpirituels à qui il s’étoit
déjà confeifé, ne luiavoient jamais confeillé une fi rude
penitence. Il fit venir des évêques & des abbez qui l’a»
voient a ccompagné, & après avoir délibéré tous cn -
femble, ils vinrent à l’avis de Romuald : avouant que
la crainte les avoit empêché jufques-la de donner au
comte ce confeil. Alors-Oliban convint avecRomuald
d’aller au M on t-C a ifin , fous prétexte de pelerinage ,
§ç d’y embraifer la vie monaftique.
L i v r e c i n qu a n t e - s e p t i e’m e , k | |
Cependant Sergius pere de Romuald , fe fit moine
au monaftere de faint Severe près deRavenne , mais
quelque temps après il s’en repentit & voulut retourner
aumonde. Les moines en donnèrent au ffi-tôt a v isàR o -
muald, qui réfolut d’aller au fecours de fon pere ; &
chargea l’abbé Guerin & Jean Gradenic, de conduire
le comte Oliban au mont Caffin. Les Catalans apprenant
que Romuald fongeoit à quitter leur pars, en fu rent
extrêmement affligez ; & après avoir cherché un
moien de prévenir cette perte, ils n’en trouvèrent point
d éplus fû r ,q u e d’envoïer des gens le tuer, afin d’avo
ir au moins fes reliques pour la protection du pais.
Romuald en étant a v e r t i, fe rafa entièrement la tête,
&c comme les meurtriers approchoient de fa cellule , il
fe mit à manger dès le grand matin. Ils crurent qu’il
avoit perdu l’efprit & fe retirèrent fans lui faire aucun
mal.
S’etant ainfi iauvé de leur dévotion brutale , il partit
nuds pieds un bâton à la main : &c arriva à Rayenne ;
ou trouvant fon pete réfolu au retour au fîe cle , il lui
mit les pieds dans des entraves, le chargea de fers & le
frappa rudement, jufquesà ce qu’en maltraitant fon
corps il eût guéri fon am e , & l’eût fait revenir à fa première
réfolution. Il y perfevera, & mourut faintement
quelque temps après.
Pour le comte Oliban , aïant laiifé fes terres à fon _ 1V/ . £ t . i . lyy- i - Gonvcrfton du
tu s , il partit pour 1 Italie avec l ’abbé G u e r in , Jean «wmçoliban.
Gradenic & M arin, car Pierre Urfeole étoit déjamort.
Oliban menoit avec lui quinze mulets chargez de
fon tréfor : mais étant arrivé au Mont Caffin , il renvo
i a fes gens fort furpris & fort affligez. Marin s’en
alla peu de temps après en P o ü ille , tk y demeura dans
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