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trouva que Tabbé ne fuivoit pas fes maximes. Car if
vouloit qu’un abbé comme ecanc vericablement moin
e , aimât l’extrême abjeétion, n eut point d affeétion
pour le temporel ,8 cemp lo yïa t les biens du monaftere
pour l’utilité des fre re s , fans faire aucune dépenfe par
vanité- N ’étant pas écouté , il quitta ce monaftere, &
s’alla loger avec fes difciples , près du chateau de Rai-
n ie r , qui fut depuis marquis de T o fcan e . C e fe ign eu r
aïant quitté fa femme,'fous pretextede p a ren té ,a v o it
iépouié la veuv e d’un defesparens. C ’eft pourquoi Ro-
rhuald ne voulut pas demeurer gratuitement dans fes
terres , afin de ne paroître pas approuver fa conduite;
mais il lui païoic une piece d’or pour l ’eau, 8c une autre
pour le bois ; 5c il le contraignit a les r e c e v o ir , en
le menaçant de fe retirer. Ra in ie r difoit :ll n y a ni empereur
ni homme v iv a n t , qui me donne tant de craint
e , que le vifag e de Romuald. Je ne fai que dire dev
an t lu i , 8c ne trouve point d’exeufes pour-me défendre.
En effet le faint homme avoit ce don de Dieu ,,
que tous les pecheurs , principalement les grands du
fieçle trembloient devant lu i , comme en prefence de
la majefté divine.
Ix il changea encore plufieurs fois de demeure,faiiânt du
Divers mo- f rui t par touc & convertiffant plufieurs pecheurs.Ce qui
Bültcrcs de Si it . _ — /-% , n
Romuald. l o b l i g e o i t a c h a n g e r f i f r é q u e m m e n t , c e i t q u e p a r t o u t
où il d e m e u r o i t , u n e f oul e i n n om b r a b l e l e v e n o i t c h e r -
î;.7j. c h ç r . A i n f i q u a n d i l a v o i t r e m p l i u n m o n a f t e r e , i l y m e t -
toit un fuperieur, 8c fe preffoit d’en aller remplir un nouveau.
Entre autres monafteres, il alla habiter la monta-
gne deSitrie dans l’Om b r ie : o u if fo u f fr it une calomnie
atroced e la part d’un de fes moines, nomme Romain..
C ar voulant le corriger de fes im p u r e té s , non feule-
L i v r e c i n q u a n t e -n e u v i e ’a î e .' 4^3
¡tnefit par des réprimandes, mais par de rudes difcipli-
nes : celui-ci l’accufa d’un crime .de rqême genre : 8c
quoique fon âge décrépit 8c fon corps atténué l’en ren-
diffent incapable, la calomnie trouva c réance, 8c les
difciples du faint homme le mirent en penitence, 8c lui
défendirent de celebrer les faints myfteres.il s’y fournit,
8c fut environ fix mois fans approcher de l’autel. Enfin ,
D ieu lui commanda, fous peine de perdre fa grâce, de
quitter cette fimplicité indiferette, 8c de celebrer hardiment
la meffe. Il le fit le lendemain, 8c pendant la méfi
é , il fut long-tems ravi en extafe, 8ç reçût l ’ordre, de
donner une expofition des pfeaumes, que l’on garde
.encore âC am a ldu le écrite de fa main.
Etant a S itr ie , il demeura fept ans en fe rm é , gardant
continuellement le filence; 8c toutefois il ne fit jamais
plus d e co n v e r fio n s , 8c ne renferma plus de penitens.
Il ne relâcha rien dans la,vieilleffe de l’aufterité de fa
v ie . Pendant un Carême il ne vé cut que de boüillon
fait d‘un peu de farine , a vec quelques herbes, 8t il
fa ifo it ain,fi diverfes expériences , pour éprouver fes
forces. Pendant l’été , de deux femaines il en paffoit
une jeûnant au pain 8c à l ’eau, l’ autre il ajoûtoit quelque
chofe de cuit le jeudi. S’il étoit tenté de manger
q u e lq u e v ia n d e p lu sd c fo n g o û t , il la faifoit préparer ;
8c après en ¡avoir fenti l ’odeur, il fe reprochoic la fen-
fualité , 8c la renvoïoit fans y . toucher, il a voit deux
ou trois cilices , pour en changer tous les mois; 8c fe
coupoit lui-même la barbe 8c les chev eux., maïs fprt
rarement. Pendant le carême il ne iortoit point fan,s
une neceffité indifpenfable. Mais ces aufteritez n’em-
pêchoient pas qu’il ne montrât un vifage ferain &i une
gaieté continuelle. _ O a raconte plufieurs guerifons
r- „ N n n lij