
S 'f ?
$:sp. lib . t . » . 4 2
10 H i s t o i r e E c c l e s i a s t i q u e .
& demandoit L u c , difant avoir befoin de fonfecours.
11 attendit fept jo u r s , après lefquels le faint homme
p a ru t, 8i le regardant de trave rs, lui dit d’un ton rude
: Q u ’as tu affaire en ce defert ? Pourquoi laifle-tu les
pafteurs dfe le g life p o u r'v en ir chercher des hommes
ruftiques & ignorans ? Comment ofe-tu patoitré étant
chargé de fi grands crimes ? Déclaré publiquement le
meurtre que tu as com m is , afin que Dieu te pardonne.
Le pecheur effraïé dit : Homme de D ie u , pourquoi
me demandez-vous ce que vous fçavez deja p quoique
je l’aïe fait en fecret ? mais pour vous obéir je dirai
tout. Alors il déclara toutes les circonftances de fon
crime, & fe jetta aux pieds du faint ,1epriant de ne le
pas dédaigner. Luc le re le v a , lui donna les avis & les
réglés qu’il crut convenables ; lui ordonnant entr’au-
tres ch o fe s , d’aller à la fépulture du m o r t , y répandre
beaucoup de larmes, lui faire célébrer honorablement
le fervice du troifiéme , du neuvième & du quarantième
jour : y faires’il pouvoir au moins trois mille génuflexions
, fur tout de pleurer fon peche tout le refte de
fa vie , 8c l’avoir toujours devant les yeux. Nous avons
vû dans le huitième concile que les pecheurs s’adref-
foient à des moines pour leur demander le remede de
leurspechez ; mais ces penitences impofées par des laïques
n’étoient que des préparations à l’abfolution fa-
cramentelle. Aufli Luc marque-t-il d’abord a ce meurtrier
qu’il devoit s’adreffer aux prêtres.
Après qu’il eut paffé fept ans au defert de S. Joan-
nice , il fut obligé de quitter le païs avec tous les autres
babitans, par la crainte des Bulgares, qui fous leur
roi Simeon vinrent le ravager vers l’an 91 y. Luc fe retira
dans une ifle , oij les barbares étant encore paffez il s’en
L i v r e c i n q u a n t e - c i n q u i e ’m e . ci
fauva à la n a g e , 8c vint a Corinthe. La le défit de lire
lecritare fainte le fit aller a 1 ecole avec les enfans, quoiqu’il
eut de la barbe 8c fût âgé d’environ vingt-cinq
ans • mais les mauvaifes moeurs des écoliers le dégoûtèrent
bicn-tôt de l’étude , & il fe mit auprès d’un
Scylice qu’il fervit dix ans ; péchant pour lui , portant
du bois , Sc lui faifant fa cuifine. La paix étant rétablie
fous Pierre roi des Bulgares, Luc revint au mont
S. Joannice. Aïant appris que l’archevêque de Co rinthe
paffoit par-là , il alla le trouver, & lui porta des
herbes de fon jardin. L’archevêque s’étant informé qui
il é to it , voulut voir fa c e llu le , 8c fort édifié de fa
maniéré de v iv r e , il lui fit donner une certaine quantité
d’or. Le faint homme le refufa difant : Seigneur, je
n’ai point befoin d’o r , mais feulement de prières 8c
d’inftruétions. Toutefois voïant le prélat affligé de fon
r e fu s , il prit une piece d’or. Puis il lui dit avec une
grande humilité : Seigneur, nous autres que nos pechez
ont réduits à demeurer dans les deferts 8c les montagnes,
comment pouvons-nous participer aux myfteres
terribles fans avoir de pretres ? L archeveque repondit ;
Il faut avoir un piètre autant qu’il fe peut. S’il eft ab-
folument impofllble, il faut mettre Je vafe des pre-
fanébifiez fur la fainte table fi c’eft dans un oratoire
: fi c’eft dans une cellule fur un banc très-propre,
Enfuite aïant déplié le v o ile , vous mettrez deflus les
faiiites particules. V ou s ferez brûler de 1 encens, puis
vous chanterez les pfeaumes des T y piques ou leT r ifa -
gion avec le fymbole de la foi. Apres avoir fait trois
génuflexions, vous joindrez les mains, 8c vous prendrez
avec la bouche le corps de J e fu s -C h ift, en difant
Amen. A u lieu du précieux fa n g , vous boirez du vin-
H iij