
3 1<î H i s t o i r e E c o l e s i a s t i q u e .
---------- Ayant donc quitté fon cher monaftere, non fans
An. beaucoup de larmes, il paffa les Alpes avec Notcher,
évêque ae Liege homme fort fage; 8c après environ
deux mois, ils arrivèrent à Mayence, où l’empereur
s’étoit arrêtez au retour d Italie. S. Adalbert y demeura
allez long-terns, vivant avec ce prince dans une grande
familiarité 8c attaché à lui jour 8c nuit comme les officiers
de fa chambre. Il lui difoit avec une fainte liberté.
Nefongez pas que vous êtes un grand empereur, mats
que vous êtes un homme qui mourrez ; 8c quecebeau
corps fera réduit en pouflïere 8c en corruption. Car
l’empereur Otton III. étoit très-bien fait de fa perfon-
ne. Sur ce fondement S. Adalbert l’exhortoit àméprî-
fer cette vie, afpirer aux biens éternels, 8c pratiquer
toutes fortes de bonnes oeuvres. Cependant, pour s'exercer
lui-même à l’humilité, il rendoit tous les fervices
poffibles à ceux quilogeoient dans le palais, jufques à
nétoyerlanuit pendant qu’ils dormoient, leurs bottines
5c leurs fouliers.
D urant ce tems-là il paffa en France pour vifiter les.
lieux de dévotion. Il vint à Paris prier fur le tombeau
de S. Denis, à Tours fur celui de S. Martin, 8c à Flèury
furceluideS, Benoît. Puis il retourna trouver l’empereur,
8c l’ayant embraffé pour la derniere fois , il prit
le chemin de fon diocefe. Mais avant que d’y arriver,
il apprit que les Bohémiens, en haine de lui, avoient
maffacré les freres. Il en avoit fix, dont le plus jeune
nommé Gaudence l’accompagnoit, l’aîné étoit a la
guerre au fervice de l’empereur avec le duc de Pologner.
les quatre autres étaient demeurez dans le pays, & les.
Bohémiens leur avoient juré fureté. Mais comme ils
étaient à la meffe dans une ville- nommée Lubie , oùils:
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celebroient la fête de S. Venceflas le vingt-huitième
de Septembre : ces perfides entrèrent dans l’églife Sc
tuerent tout indifféremment hommes 8c femmes,, entre
autres les quatre freres d’Adalbert qu’ils décolèrent
devantl’autel : puis ayantmis le feu à la ville, ils
s’en recournerent chargez de butin.
Le S. évêque ayant appris ce défaftre, alla trouver
Boleflas duc de Pologne, auprès duquel étoic fon frere
aîné, 8c le pria de faire fonder les Bohémiens s’ils voudraient
le recevoir. Ils répondirent aux envoyez du
duc; Nous fommes des pecheiirs endurcis, c’eft un
faint 8c un ami de Dieu, nous ne pouvons compatir
enfemble. Mais encore pourquoi revient-il nous chercher
après nous avoir quitté tant de fois ? Nous voïons
bien ce qu’il prétend fous cette apparence de charité :
il veut vanger fes freres, 8c nous ne voulons point le
recevoir. S. Adalbert aïant reçu cette répoie, ie regardant
comme déchargé du foin de Ion églife, & tourna
toutes fes penfées à laconverfion des infidèles. S’étant
déterminé à aller en Pruffe, comme à un pais plus
voifin 8c plus connu du duc de Pologne, il s’embarqua
dans un bâcimeneque leduc lui donna avec trente
foldatsd’efcorte, 8c arriva premièrement à Danzic.
Là il baptifa grand nombre de perfonnes8c ayant
célébré la meffe 8c communié les nouveaux bàptifez,
il garda ce qui reftoic de la fainte euchariftie,. pour
fervir de viatique.
Le lendemain ayant pris congé d’eux, il s’embarqua
fur mer; 8c après quelques jours de navigation
il mit pied à terre, renvoya le vaiffeau 8c l’efcorte, 8c
demeura avec deux moines: dont l’un nommé Benoît
étoit prêtre, l’autre étoit fon jeune frere Gaudence*.
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C b r • M a g d .9 9 )'
XL VITE.
Martyr de. S
Adalbert,.