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& une tendrefle paternelle. Ce Damien fut archiprê-
tre deRayenne & enfuite moine, & on croit que ce fut
de lui qué Pierre prit le furnom qui le diftingue. Par les
foins de cefrere il étudia premièrement à Faience, puis
à Parme, où il eut Ives pour maître : & il fit un fi grand
progrès dans les lettres humaines, qu’il fut bien-tôt en
état de les enféigner, & fa réputation lui attiroit de
tous côtez un grand nombre de diiciples. Se vo'iant
ainfi riche & honoré dans la vigueur de k jeu n e ife , il
néiîiccomba pas aux tentations de vanité & de plaifir ;
mais il fit ces reflexions iàlmaires M ’attacherai-je a
ces biens qui doivent périr ? & fi je dois y renoncer pour
de plus grands , ne ièra-t’il pas plus agréable à Dieu
de le faire dès à prefent ? Il commença dès lors à porter
un cilice fous des habits de fines étoffes, 's’appliquer
aux jeûnes, aux veilles & aux prières.. La nuit s’il fen-
toit des mouvemens exceffifs de ièniualité , il fe levoit
& fe plongeoitflans là rivière : puis il vifitoit les égliies
& difoit le pfeautier avant l’office. Il faifoit de grandes
aumônes, nourriffoit fouvent des pauvres, & . leslèr-
y o it de lès mains.
Il rélolut enfin de qui tter entièrement le monde , &
d’embrafler la vie monaftique ; mais hors de ion pais ,
de peur d’en être détourné par les parens & lès amis.
Comme il étoit dans cette peniee , il rencontra deux
ermites du defert de Font-A v e llan e , dont il avoit oüi
parler, s’étant ouvert à eux ils le fortifièrent dans fon
deiïèin, & comme il témoigna vouloir fe retirer avec
eux, ilslui promirent que leur abbé le recevroit. Il leur
offrit un vafe d’argent pour porter à leur abbé : mais
ils dirent qu’il étoit trop grand ,. & q u il embarrafle-
ïQÎt dans le chemin i & il demeura fort, édifié, de leur
definte-
L i v r e c i n q u a n t e - n e u v i e ’me . 5 4 y
defintereifement. Pour s’éprouver il palfa quarante
jours dans une cellule femblable à celles des hermites :
puis ayant pris fon tems, il fe déroba desfiens & fe rendit
a Font-Avellane, ou iuivant l’uiage on le mit entre
les mains d’un desfreres pour l’inftruire.Celui-ci l’aïant
mene a fit cellule, lui fit oter ion linge, le revêtit d’un
cilice & le ramena à l’abbé , qui le fit auiïï-tôt revêtir
d ’une cuculle. Pierre s’étonnoit qu’on lui donnât l’habit
tout d’abord iàns l’avoir éprouvé , & finis le lui faire
demander : mais il iè fournit à la volonté du iuperieur,
quoiqu’alors la priiè d’habit ne fût point feparee de la
profeilion.
Le deièrt de Font - Avellane , dédié à fainte C ro ix ,
étoit en Umbrie dans le diocéiè d’U gu b io , & fa in t Ro-
rnualdy a voit pafle quelque tems. Les hermites qui l’ha-
bitoient demeuroient deux à deux en des cellules fepa-
rées, occupez continuellement à la pfalmodie , à l’o-
raifon & à la lecture. Ils vivoient de pain & d’eaù quatre
jours de la ièmaine : le mardi & le jeudi ils man-
geoient un peu de légume , qu’ils faiioient cuire eux-
memes dans leurs cellules. Les jours de jeûne ils pre-
noient le pain par mefure : ils n’avoient du vin que pour
le iàint facrifice , ou pour les malades. Ils marchoient
toûjours nuds pieds, prenoient la diieipline , faifoient
des génuflexions, ie frappoient la poitrine, demeuroient
les bras étendus, chacun félon les forces & fa dévotion.
Apres l’office de la nuit ils difoient tout Je pièautier a-
Vant le jou r . Pierre veilloit long-tems' avant que l’on
ibnnat matines,&nelaifloit pas de veiller encore, après,
comme les autres : periuadé que les dévotions particulières
iè devoient pratiquer fans préjudice de l’obferyance
générale.
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