
42. H i s t o i r e E c c l e s i a s t i q u e .
ter cet extravagant ; 8c de l’avis de Humbert il fît Te'
voïage de Rome : alla jufques au mont Gargan, 8c
vifita en paifant leM o n t-C a ifin & les monafteres voi-
iîns de Naples, A fon retour il demeura chez l u i , ne
trouvant point de lieu où il pût vivre à fon gré en
communauté-, 8c pratiqua en fon particulier la vie
monaftique, v e illa n t , priant & jeûnant rigoureufe-
ment. Humbert le fit connoitre à Einolde ou E g iln o l-
de , qui menoit à peu près la même vie de fon côté-
Il avoit été primicier de l’églife,de T o u l ,. puis archidiacre
-, 8c aïant donné tout fon bien aux pauvres
il paffa quelque temps dans une caverne. Enfin ils fe
joignirent fe p t, & réfolurent de paffer en I ta lie , p ou r
y pratiquer la perfeétion de la vie monaftique : v iv an t
du travail de leurs m a in s , dans les pais fertiles ; mais
abandonnez , que Jean avoit remarquez aux environs'
de Benevent. Mais Adalberon évêque de M etz en;
aïant eu connoiffance, leur donna l’abbaïe de Gorze r
qui avoit été ruinée par les Normands. Ils y entrèrent
l ’an 933. 8c élurent pour abbé Einolde , & Jean p our
cellerier.
n.Gon. Il étoit très-propre à cette charge, entendant parfaitement
le ménagé de la campagne & l’adminiftra-
tion dutemporel. Auffi dès le commencement, v o ïa n t
l’abbé Einolde embaraifé de ces foins extérieurs, il o f fr
it de l’en f o u l a g e r l ’exhortant à s’appliquer uniquement
à la vie intérieure fuivant fon attrait.- Jean ,,
quoique très-ferme en fes réfolution s, obéïfFoit ponctuellement
au moindre mot de l’abbé : qui l’éprouva
plufieurs fois , en lui faifant changer exprès d’obe-
dience. Il le fit prévôt du monaftere, puis l’o b ligea
à s’en démettre enfuite il le fit doïen , puis celi—
L i v r e c i n qu a n t e - c i n qu i e’m e . 43
îerier. Il lui donna la charge du veftiaire , de l’hofpi-
talité de l ’infirmerie, & le trouva prêt à tout. Il lui
rendoit un compte exaét de toute la dépenfe jufques
à une obole , quoique l ’abbé voulut s’en rapporter à
lui. ,
Outre les études qu il avoit faites avant fa conver-
f io n , il fit encore beaucoup de leéiures dans le monaftere.
Premièrement des morales de S. Grégoire, qu’il lût
plufieurs fois de fuite , enforte que prefque tous fes
difeours en étoient tirez. Il lût auffi ce qui lui tomba
entre les mains de S. A u gu ftin , de S. Am b ro ife , de S.
Jerôme 8c des autres peres ; mais les livresétoient alofs
difficiles à tro u v e r , par lerefroidiffement des études. Il
lût tout au long les traitez de S. Auguftin fur S. Jean,
fur les pfeaumes &ç de la cité d eD ieu . En fin il travailla
beaucoup fur les livres de laTrinité.; &c à l’occafion de
ce qui eft dit des relations des perfonnes d iv in e s , il fe
mit à étudier les catégories, l’introduéHon de Porphyr
e , 8c toute la dialeéfique. Il s’y appliqua long-temps
8c fortement; mais l’abbé Einolde, q u iiç a v o it par e x périence
, la difficulté & le peu de fruit de cette étude,
trancha court, en lui défendant de s’y appliquer davantage
; & lui ordonnant d’étudier p lûtôt l’écriture fainte.
I l s’y mit tout entier, & étudia beaucoup S. Grégoire
fur Ezechiel ; car il aimoit fingulierement ce faint docteur.
Il lifoit les vies des peres pour les imiter , & fça-
v o it prefque par coeur celle de S. Jean l’aumônier : fans
que toutes fes études le détournaifent de fes occupations
extérieures.
Comme fa charge de cellerier l’obligeoit à conver-
fer avec les feculiers, il fe plaignoit que pour peu qu’il
fû t avec eux, il fe relâçhoit de fon obfervance ordinai-
F ij