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ble. Alors il fc crut ju ftifié , & fauffa de nouveau fes
fermens. C eu x qui y avoient interêc ne pouvant fouf-
frir d’être trompez tant de fo i s , prennent lafortereffe
de Laon. Arnoul pris entre les ennemis du roi , eft présenté
à un concile, & prefle de rendre compte de tant
de crimes. Après avoir long-temps confulté en lui-
même , & avec fes ami s , il confeife volontairement
fes pechez , & renonce à fa dignité.
Gerbert aïant ainfi pofé le fa it, continue : On convient
allez entre les parties de ces crimes d’Arno u l ,
mais fes défenfeurs fe partagent en deux. Les uns di-
f e n t , que le roi lui a pardonné, & que depuis il n’a rien
fa it que de pardonnable. Les autres Soutiennent que
l ’on a fait injure au pape1 en dépofant Arnoul fans fon'
autorité. Pour y répondre , Gerbert diftingue entre la
loi & la coutume. C e q u i fait loi en matière ecclefiaili-
que , c’eft l’écriture fainte , les canons des conciles &
Aîi8. les écrits des peres. Si tous les évêques, ajouteét-il, gan.
doient inviolablementles canons, la paix & la concorde
regneroient par toutes les églifes ; il n’y auroit point
de differens, ni fur les biens, ni fur les ordinations, ni
f.w- iur les privilèges. Il traite enfuite de la différence des
crimes & de l’ordre judiciaire ; & Soutient que les pechez
d’Arnoul étant manifeftes ,les évêques n’ont fait
qu'executer contre lui les loix établies 5 & que la contumace
d’une année auroit fuffit pour le condamner
fans l ’entendre.
Quant au pape, continuë-t-il,on ne lui a point fait
d’ injure:puiSqu’étant inv ité pendant dix-huit m ois,par
lettres & par députez, il n’a point voulu répondre. Son
filence ou fes nouvelles conftitutions ne doivent pas
préjudicier aux loix déjà établies. Vou s qui voulez gar-
L l V R E C I N Q U A N T E - S E P T I e ’m E. - z8f
der à vos rois la fo i que vous leur avez promife, qui
loin de trahir votre peuple & votre clergé, avez horreur
de fes crimes : foïez favorable à ceux qui obeif-
fent à Dieu, plutôt qu'aux hommes. On dit qu’Arnoul
étant eveque , n a du etre juge que par le pape j mais
après fa cènfeffion les évêques ont dû le dépofer, fui-
vant le concile de N ic é e , & cela quand même fa con-
feilion icroit fauffe, puifquil feroit au moins coupable
de faux témoignage contre lui-même.
Quant à ceux qui alleguoient le pardon du roi pour
la defenfed’A rn o u l: Gerbert leur répond, que le pouvo
ir des rois ne s’étend pas fur les âmes ; mais celui des
.evêques, aufquels il appartient de lier & délier ; c’eft-
à- du e , d’impofer les peines fpir itu e lle s, comme la dé-
pofiuon & l’excommunication. Ainfi la grâce des rois
ne donnoitpas a Arnoul la rémiiïion de fe$ péchez, &
il ne s ecoit rendu que trop coupable depuis, par fes
parjures & fes facrileges. Gerbert finit en priant V il- ?. u 3.-.
derode,de ne pas ajouter fo i aüx calomnies, dont on le
charge, d’avoir ufurpé le fiege de Reims, & fait prendre
Arnoul. Au contraire, il le prie de le juftifier auprès
des évêques & auprès de fon r o i , c’eft-à-dire Ro-
dolfe III. roi de la Haute-Bourgogne.
| Le roi Hugues écrivit au pape fur le même fujet en » f f lM É i
ces termes: Nous vous avons écrit mes évêques & moi conc‘ Rem'm
par 1 archidiacre de R e im s , pour vous expliquer l’a ffaire
d’Arnoul. Nous ajoutons ceci pour vous prier
de me faire juftice à moi &c aux miens ; & ne pas rece-
yoir pour certain ce qui ne l ’eft pas. Nous n’avons rien
fait contre votre fainteté. Si vous voule z vous en
éclaircir en prefence, vous pouvez venir à Grenoble,,
qui eft aux confins de l'Italie & de la Gaule , & où les.