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ï o 4 H i s t o i r e E c c l e s i a s t i q u e .
fa cayerne, Les uns y bâtirent des cabanes ,• les autres
fe logèrent dans des cavernes voifines, : puis on bâtit
un petit oratoire fous le nom de faint Michel. Paul fi
peu foigneux de fa fu b fiftan c e , pourvût abondamment
a celle de fes difciples, pour leur ôter tout prétexte
de relâchement. Il diitingua ceux qui de voient
demeurer feuls ou vivre en communauté. Ils n’avoient
rien de caché pour lui , n’alloient nulle part fans fon
«pngé , n’ofoient cuire leur pain ou faire la moindre
çhofe fans fa bénédiction , & ne polfedoient rien en
propre.
Paul ayant demeuré douze ans dans cette caverne,&
importuné des vifites de fes difciples & dés autres, en
for tit fecretçment, & fe retira.fur le plus defert de la
montagne. Là n’ayant pour compagnie que les bêtes,
il fouffroit le chaud, le froid &c toutes fortes d’incom-
moditez. Il venoit de temps en temps à la laureencou-
rager les freres, les avertiilant fur-tout de ne fe point
confier en eux-mêmes : celui qui le ièrvoit lui portoit
de temps en temps quelque nourriture. Demetrius fe
plaignoitun jour à lui,qu’on ne voïoitplusde ces grands
hommes , & de ces grâces merveilleufes des derniers
fiecles. Paul lui répondit en foûriant ; Il femble que
vous ne croyez pas que Dieu foit toujours le même ;
puis ;1 lui contaplufieurs merveilles qui lui étoient arrivées.
LJn autre de fes difciples nommé Simeon,lui de-
piandoit pourquoi il paroilfoit tantôt gay & tantôt
trifte. Il répondit : Quand rien ne me détourne de la
contemplation , je me vois environné d’une” lumière fi
agreable , que j’oublie la pourriture & toutes les cho7
fçs terreftres : mais on m’afflige lorfqu’on m'interrompe
& qu’on m’oblige à parler. Auffl quand il march
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L I V RE C IN QU A K T E -C I N QU I e ’mE. ioy
choit avec fes difciples, il s’avançoit feul aifez loin
pour chanter les louanges de Dieu & penfer continuellement
à lui. Outre qu’il vo ïo it toujours fon bon
ange.
Le defir d’une plus grande retraite lui fit prendre
le deifein de pafler à l’ifle de Samos. Etant prêt à s’embarquer,
il vit dix foldats prifonniers pour défertion -y
& dit d’un ton ferme â l’omcier qui les con d u ifo it, de
les laiffer en liberté. Ce lu i-ci yoiant un petit homme
mal vécu, le prit d’abord pour un païfan-, mais il fut
touché de fa hardieffe & de la fageife qui paroilfoit fur
fon vifage. Le faint homme lui dit : Dites au gouverneur
que le moine Paul vous les a enlevez de force. Il
délivra ainfi ces malheureux. Etant arrivé à Samos , il
fe retira au mont Cercés dans une caverne o û o n d ifo it
qu’avoit vécu le philofophe Pythagore. Comme il fu t
bien-tôr connu , on venoit de tous cotez recevoir fes.
inftruétions ; & p a r fes exhortations on rétablit les trois
laures de cette ifle quelesSarafinsavoient ruinées. C e pendant
les moines de Latre cherchoient Paul de tons
cotez ; & enfin aïant appris qu’il éroit à Samos, ils lui
écrivirent par un des leurs , qui- le ramena auffi-tôt ;
car il ne tenoit à rien. Depuis ce retour il avança encore
dans la perfection.
Sa réputation s’étendoit de tous côtez & jufques à
Rome. Le pape envoïa exprès un moine avancé en
âge pour le v o ir , examiner fa maniéré de vivre & lui
en faire le rapport. Pierre roi des Bulgares lui écriyoit
fouvent pour fe recommander à fes prières. L ’empereur
Conftantin Porphyrogenete lui écrivit plüfieurs
lettres que l’on garda long-temps depuis dans la laure.
C e prince voulant envoïer en Crete une armée navale
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