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5 4 2 H i s t o i r e E c c l e s i a s t i q u e
» donc dans des terres hors de la ville; & Jean Gratiett
N* fut ordonné pape le dimanche vingt-huitième d’Avril
10 4 5 .I l prit le nom de Grégoire V I . & tint le faint fié-
ge environ vingt mois. Le moine Glaber auteur du
tems finit fon hiftoire par ces mots, après avoir parlé de
l’expulfion du papeBenoît : on mit à là placeun homme
très pieux & d’une fainteté connue, Grégoire Romain
de naiflànce, dont la bonne réputation repara tout le
fcandale qu’avoit cauféfon prédecefïéur.
Pierre Damien abbé de Font-Avellane, perionnage
dès lors diftiùgué par fon mérité, écrivit au pape Gre-
goire V I . iur fà promotion, pour lui en témoigner là
joie & celle de toute l’églife : par l’elperance de vo ir
fous fon pontificat abolir la fimonie. Mais, ajoûte-t’i l ,
on jugera de ce que l’on en doit eipçrer par l’églife de
Peiàro : car fi elle n’eft ôtée des mains de cet adultéré,
cet inceftueux , ce parjure, ce voleur , l’efperance
des peuples ièra entièrement fruftrée : s’il eft ré tab li,
on n’attendra plus du làint fiege rien de bon. Il écriv
it encore au même pape une fécondé lettre, où il dit:
Sçachez que pour nos pechez on ne trouve point de
clercs en nos quartiers qui lbient dignes de l’épifcopat.
Ils le défirent aifez, mais ils ne cherchent pas à le mériter.
Toutefois félon la qualité du tems 8c la difètte
des fujets , il me fèmble que cet archiprêtre peut être
promû à Tévêché de Folîèmbrune, quoiqu’il l’ait ardemment
defiré : puis qu’il eft un peu meilleur que les
autres, & qu’il a l’éleélion du clergé 8c du peuple. Q u ’il
faflé penitcnce de ion ambition, 8c qu’il foit fàcré félon
ce que Dieu vous infpirera. Je vous prie féulement,
fi vous ne le fàcrez, de ne point remplir .ce fiege fans
m’avoir parlé.
L iv r e c in q u a n t e -ne u v i e ’me . 543
Pierre Damien nâquit à Ravenne l’an 1007. Comme
il étoit le dernier d’un grand nombre d’enfans, un des
aînés fit des reproches à fà mere, de ce qu’elle leur don-
noit tant de cohéritiers ; & elle en fut fi touchée , que
tordant les mains , elle fé mit à crier qu’elle étoit une
miférable qui ne méritoit pas de vivre. Elle ceflà de
nourrir ce pauvre enfant, qui devint bien-tôt livide de
faim 8c de froid, & n’avoit prefque plus de vo ix : quand
une femme, qui étoit come domeftique dans cette mai-
ion furvint&dit à la mere : Eft-ce agir en mere chrétienne
, madame, que de faire pis que les tigreïïès & les lionnes
, qui n’abandonnent pas leurs petits ? cet enfant ne
fera peut-être pas le moindre de la famille. Elle s’affit
auprès du feu , & ayant frotté l’enfant de quantité de
graiffe, lui fit revenir la chaleur & la couleur, la mere
rentra en elle-même, le reprit & acheva de le nourrir.
Il étoit encore en bas âge quand il perdit ion pere 8c
fa mere Un des freres qui étoit maôé fe chargea de
fbn éducation : mais lui 8c fà femme étoient avares 8c
durs, & traitèrent cet enfant comme un efclave. Us
ne le regardoient que de travers, lui donnoient la nourriture
la plus groiïiere, le laiflbient nuds pieds & mal
v ê tu ,le chargeoient de coups : enfin quand il fut un
peu plus grand , ils l’envoyerent garder les pourceaux.
Encetétat il trouva un jour une piece d’argent ; 8c fé
croyant riche, il étoit en peine de ce qu’il en achete-
roit qui lui fit le plus de plaifir. Enfin il dit en lui-même
: Ce plaifir pafléroit bien v îte , il vaut mieux donner
cet argent à un prêtre, afin qu’il offre le faint fàcrifice
pour mon pere ; 8c il le fit.
Un autre de fès freres nommé Damien , 1e tira de la
mifère, le prit ch e z -lu i, & le traita avec une douceur
A n. 1045.
X L V I I I .
C o m m e n c e m
e n t d e S . P ie r r
e D a m i e i i .
V it a f& c . 6 .Ben.
p a r t . z . p. 2 ,4 7 .