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cette cg lifc , fans qu’aucun évêque les pût prétendre.
Je n ' a i point encore obfervé juiqu’ à ce tems
d'exemption femblable , & je doute que ce faint roi
l’eût l'étab lie , s’il eût été fuffifamment inftruit de la
difcipline ecclefiaftique.
Son zele ne fe renfermoit pas dans fon roïaume, A
Jerufalem il fonda un monaltere, Si lui donna des revenus
fuffifansen terres Si en vigne s : à Rome il fon da
une collégiale de douze chanoines; & des maifons
d'hofpitalité , pour les Hongrois qui alloient en peler
l . , , r i n a g e à S. P i e r r e : e n f i n ilb â t it une très-belle eglile a
*.1. C P. La réputation de fa pieté f i t , que la plupart des
pèlerins d'Italie Si de Gaule qui alloient.à Jerufalem,
quittèrent le chemin ordinaire , q u ie to it par mer ,
pafferent par la Hongrie. Le roi Eftienne les recevoic
comme fes fre re s , Si leur faifoit de grands prefens ;
ce qui attira une grande m u ltitu d e ,, tant-des nobles
que du peuple à faire ce pelerinage.
IX En Italie S. N il perdit Eftienne fon cher d ifc ip le , qui
rindcSTNii. lu ife rvo it demodeleou d’inftrument,fi 1 on peut par-
Pita t. ijî. jer ainh;pour corriger les autres.Car fi quelqu uns en-
• dormoit dans l’églife pendant qu'il parloir, c'eft fans
doute Eftienne qui ronfle, d ifoit-il, Si il le mettoit dehors:
fouvent il le faifoit lever de table comme mangeant
indécemment:enfin il fe prenoit a lui de tout ce
que faifoient les autres,afin de les inftruire en exerçant
la vertu d’Eftiene.ll fut fenfiblement touché de fa mort
Si lui fit faire un fepulcre double des autres, pour y etre
enterré.avec lui quand il mourroit. Mais le prince de
Gaëte qui étoit fort pieux, Si a vo itune grande foi au
mérité de S. N i l , aïant appris la raifon de ce double
fep ulc re , dit à ceux qui étoient prefens : P en fe z -vou s
L i v r e c i n q j j a n t e - h u i t i e ’m e . 35?
quand ce pere mourra que je le laiffe là , & que je ne
l'apporte pas dans ma ville pour lui fervir de fauve-
garde ? S- N il ayant appris ce difcours, en fut fort affligé
, & réfolut de changer de demeure pour aller en
un lieu où il ne fût connu de perfonne ; car il eût
mieux aimé mourir miferablement, que d’être eftimé
faint par qui que ce fût.! Au contraire il affeétoit de
paraître colere Sc empo rté, jufqu’ à fcandalifer en e ffet
plufieurs ignorans. Voulant donc quitter le mo-
naftere d eS e rp e r is , où il a voit demeuré environ dix
ans ; il monta à grande peine fur un c h e v a l, tant il
étoit affoibli de vieilleffe , Si s’en alla vers Rome.
Comme les freres s’affligeoient de fon d ép a r t, il leur
d it: Je vais préparer un monaftere où je raflemble-
rai tous mes enfans difperfez.
Il arriva à Tufcuium à douze milles de R om e , qui
font quatre lieuë s , près d’un petit monaftere de Grecs
nommé de fainte Agath e . Il choifit ce lieu pour fa dernière
demeure, & il ne fut pluspoifible de l ’en arracher:
quelques efforts que fiffent les freres qui l ’ac-
compagnoient, & les grands de Rome qui le venoient
v o i r ,& le co n ju ro ien td ’y venir du moinsà caufe des
Apôtres. Il répondoit: Je ne fuis pas digne de nommer
les Saints Apôtres : mais quand on a tant foit peu de
fo i , on peut au ffi-b ien les honorer ici. Je n’y fuis
venu que pour mourir. Grégoire comte de Tufculum ,
fameux par fa tyrannie & fes inju ftic e s, mais homme
d’efprit & de fens v in t trouver S. N i l , fe jetta à fes
pieds &c lui dit : Mes grands pechez me rendent in d igne
de recevoir fous mon toit un ferviteur de Dieu
comme vous : toutefois puifqu’à l ’exemple de votre
maître vous m’ayez préféré aux jufte s , tout pécheur