les cailloux. L ’élat déplorable de ses habits lui faisait
voir d’un oeil d’envie la toge africaine dont je
m’étais revêtu. Après notre séparation, s’étant trouvé
seul , et entendant de toutes parts les hurlemens des
betes feroces, il avait pris le parti de monter sur un
arbre, dans l ’intention d’y attendre le joui1; mais
ayant aperçu un Aschante qui portait Une torche, il
descenditj et Cet homme le conduisit^ hors dti che*
min, sous un misérable hangard, où s’étaient retirés
quatre à cinq de nos gens , égarés pareillement.
Une autre partie de notre suite arriva vers quatre
heures ; le reste, avec l’interprète du Cap*Corse et
le caporal, n’arriva qu’après le soleil couché. Ils
s’étaient tout*àdait perdus, et avaient passé la nuit
et la journée suivante dans les bois. Nous fîmes une
excellente soupe aux canards, et nous dîmes pour
grâce : « Quel régal pour le pauvre Mungo Park! »
ce nom nous rappelant d e s s o u f f r a n c e s auprès desquelles
les nôtres ne nous parurent plus que deS
bagatelles.
L e samedi 8> nous marchâmes jusqu’à Aschara-
mang, où nous éprouvâmes beaucoup de difficultés
à nous procurer des provisions jusqu’à l’arrivée de
nos Aschàntes, parce qu’on nous mettait sur le dos
la friponnerie dont Quamina Boua s’était rendu
coupable quand nous y avions passé la première
fois. Il avait saisi, au nom du r o i , tout ce dont
nous avions besoin , et avait gardé l’or que nous lui
donnions pour payer. Le lendemain, nous logeâmes
àPrasou s un capitaine aschante, chargé d’une mis*
sion par le ro i, nous fît un présent de volailles et
d’ignames. Nous continuâmes à parcourir, en une
journée, des distances qui nous en avaient pris deux
ou trois en venant, et nous arrivâmes enfin à A c -
comfodey. Il ne s’y trouvait plus qu’une seule maison
habitable ; le Fante qui l ’occupait eut l ’adresse
de nous persuader que nous trouverions de meil-
leurs logemensa Ancomasa, ou nous nous souvînmes
effectivement d’avoir vu une demi-douzaine d’habitations
en assez bon état. Nous poursuivîmes donc
notre route; mais, en y arrivant, nous n’y aperçûmes
plus que des ruines.
Nous partîmes le lendemain de bonne heure, et
nous marchâmes jusqu’au coucher du soleil, nous
arrêtant sur les bords de I’Aniabirrim. Nos gens
étaient restés en arrière ; les Aschàntes, qui arrivèrent
une heure après, nous dirent que nos porteurs
de bagages avaient fait halte à deux lieues de
distance pour y passer la nuit. Malheureusement
nous n’avions pas de briquet, et le bois était si humide
, qu il fut impossible' de l ’allumer par le frottement
; de sorte qu’après avoir jeûné toute la journ
é e , il fallut encore nous passer de souper, faute
de feu. Nous ne pûmes trouver aucun abri; e t,
malgré la pluie qui tombait, nous fûmes obligés de
bivouaquer. Mais la fatigue nous fit oublier la faim,
le froid, et meme la crainte des bêtes féroces, que
nous entendions hurler autour de nous. Je m’enveloppai
dans la pièce d’étoffe d’Inta qu’Apokou
m avait d on n é e ,e l, tout mouillé qu’était le terrain,