vait, me dit-il, que je désirais emmener quelques-
uns des enfans du roi au Cap-Corse pour les y faire
élever; mais les capitaines avaient adressé des représentations
au monarque pour l ’empêcher d’accéder
à ma demande. Si le roi avait, besoin d’or, ils lui en
donnaient, quand ils en avaient; ils étaient toujours
prêts, lorsqu’il les appelait au combat, à recevoir
son pied sur leurs têtes , et à jurer d’accomplir ses
ordres, ou de ne pas revenir. Il allégua, pour raison
de leur répugnance, leur crainte que ces enfans ne
devinssent trop savans, ne découvrissent quils trompaient
quelquefois le rqi, ce dont ils convenaient
assez aisément, et qu’on ne leur tranchât la tête.
« Les capitaines ne doivent donc pas, lui dis-je,
voir avec plaisir un blanc résider à Coumassie. »
« S i vraiment* répondit-il, tous en sont charmés;
mais ce résident suffit pour régler tous lés différends
entre le roi et les Anglais, sans qu’aucun des enfans
du roi ait besoin d’apprendre la langue anglaise. »
Il se mit alors à se vanter du grand nombre de ses
femmes et de ses enfans, répétant avec emphase
qu’aucun Anglais n’en avait autant. Je repartis qu’un
Anglais avait la possibilité de connaître son père;
qu’un noir, au contraire, ne pouvait jamais connaître
le sien ; qu’ils étaient tous esclaves, sans pouvoir
hériter des biens de leur père ; qu’aucun d’eux
n’avait jamais aucune obligation à l ’auteur de ses
jours ; celui-ci ne pouvait rien donner à ses enfans
de son vivant, ni leur laisser rien après sa mort. J’ajoutai
que beaucoup d’entre eux avaient des femmes,
‘et que leurs esclaves en jouissaient. Il contint que
tout cela était vrai; et, détournant la conversation*
il me défia de montrer autant de clefs que lui* A des
mots, il m’en présenta deux grôs trousseaux; je lui
offris une once d’or, s’il me montrait une serrure
pour chaque c le f.'I l éluda la question; je pris les
clefs dans ma maifi, et j’en trouvai beaucoup de brisées.
Il y avait aussi des morceaux de plomb et de
fer pour grossir les trousseaux. Les gens de sa suite
et quelques chefs qui étaient avec lu i , à en juger
par leurs éclats de rire étouffés, paraissaient s’amuser
beaucoup de son embarràs et de sa confusion.
Plusieurs esclaves du frère du roi arrivèrent dans
la cour, poursuivant deux de leurs camarades à
grands coups de fouet. L u n des coupables, franchissant
tous les obstacles , vint se jeter aux pieds
d’Odoumata, et se mit sous sa protection. L e chef
des esclaves le réclama, en pronoffcant un long discours
avec beaucoup de feu; il finrt par jurer qu’il
fallait que le coupable lui fut rendu le lendemain
matin. Il est dtisage, lorsqu’un esclave encourt le
déplaisir de son maître , qu’il se réfugie dans la maison
de quelque chef qui cherche à oblenir son
pardon.
Samedi, 27» Le roi m’envoya chercher pour
me remettre des lettres qui venaient d’arriver; en
les ouvrant, il en tomba deux petits paquets d’or.
Le roi demanda aussitôt si c’était pour moi ou pour
lui. Je lui répondis qu’à moins qu’il n’en attendit du
Cap-Corse, il n’était pas probable qu’on envovât de
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