J ’eus avec Baba une longue conversation; il m’engagea
à venir le voir fréquemment.
J'y retournai le lendemain; il envoya chercher
un More qu’il me dit fort savant ,-et qui venait d’arriver
de Tombouctou. Ce More ne témoigna aucune
surprise en me voyant ; Baba m’en expliqua la
cause, en me disant qu’il avait déjà vu trois blancs
à Houssa. Je m’empressai de demander des détails à
ce sujet; et, Baba l’ayant interrogé, me dit:« Il y a
quelques années un vaisseau parut to u t - à - c o u p
sur le Quolla ou Niger, près de Houssa, ayant à
bord trois hommes blancs et plusieurs noirs; les
naturels leur portèrent des provisions > en furent
bien payés , et reçurent en outre des présens. I l paraît
que le bâtiment avait jeté l’ancre; le lendemain,
voyant le vaisseau avancer, les habitans craignirent
qu’il ne se brisât sur des rocs cachés sous
l ’eau > dont le Quolla est rempli ; ils le suivirent done
en poussant de grands Cris. Les blanes, ne les comprenant
pas et leur soupçonnant de mauvais desseins,
n’en continuèrent pas moins leur course; bientôt
le navire se brisa contre les rochers: les blancs,
ainsi que les noirs, cherchèrent à se sauver à la
nage, mais ils furent entraînés par le courant et
noyés. Il croyait qu’il y avait de leurs vetemens
à Houssa, mais qu’il ne s’y trouvait ni livres ni papiers.
» Ce récit simple et nûn préparé fit sur moi
beaucoup d’impression. Je revis ce More plusieurs
fois; il était d’un excellent caractère, etneme demanda
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jamais le moindre présent. Il me dessina une carte
■avant son départ, et je lui remis quelques certificats
relatifs à l’expédition du major Peddie, au bas desquels
Baba écrivit une recommandation. Un autre
More me raconta ensuite l’histoire de M. Park, précisément
de la même manière ; mais il n’avait pas été,
comme celui-ci, témoin oculaire de ce funeste événement.
Je recommandai à M. Hutchison, quand je
partis de Coumassië, de recueillir avec soin tout ce
qu’il pourrait apprendre relativement à la mort de
M. P a rk , et il m’envoya le manuscrit dont on trouvera
la traduction dans le chapitre X .
Je continuai à visiter Baba trois ou quatre fois par '
semaine; ces visites ne m’étaient pas inutiles, car
je trouvais toujours chez lui des Mores qui arrivaient
de différentes parties de l’intérieur de l’Afrique, et de
qui j’obtenais quelques informations. Ils affectaient
sans cesse de déplorer l ’ignorance des Aschantes, et
répétaient qu’elle devait m’être aussi désagréable
qu’à eux. Baba ayant dità l’un d’eux que je parlaispln-
sieurs langues, il m’adressa successivement la parole
en plusieurs idiomes que je trouvai aussi barbares
les uns que les autres ; je ne pus même comprendre
leurs noms, si ce n’est celui d’un seul qu’il nommait
hindi ou hindou. De toutes les grandes villes qu’il
me cita , je ne reconnus que len om de Rome qu’il
prononçait Roume; et il me dit que si je ne connaissais
pas cette ville, je n’ étais pas chrétien. Je ne
vis jamais chez Baba le schérif Brahima à qui je fus
présenté par un autre More ; il paraît qu’ils n’étaient