
Les Malais viennent de Timor et de quelques autres Iles des Moluques.
L’Esclavage existe partout dans ces Iles, comme à Madagascar, et ce ne sont
pas des prisonniers faits à la guerre qu’on vend aux Traitants, ce sont des
gens nés Esclaves; ou condamnés à l’Esclavage pour quelque crime.
Ils sont peu nombreux à Bourbon, où leur aptitude merveilleuse aux arts
mécaniques les fait rechercher avec empressement.
Au travers des différences individuelles de ceux que j ’ai observés /‘’voici
cependant leurs traits nationaux :
Leur peau est d’un brun noirâtre plus ou moins foncé. Toujours plus claire
que celle des Malgaches, elle n’en a pas le ton rougeâtre. Leur tète est énorme.
Une forêt de cheveux du noir le plus parfait, g ro s , droits et plats, la fait
paraître plus grosse encore. Leur face est grande et plate, le front bas, les
yeux petits et noirs, d'une forme variable, mais rarement relevés vers les
tempes, fort écartés. De là, un air d’étonnement stupide chez un grand nombre,
chez d’autres, un air de réflexion calme ; mais peu d’expression dans les yeux.
Le nez est extrêmement petit : il ne fait dans le profil de la tête que la plus
légère saillie f ie s narines sont petites et étrâites : à peine ont-ils de quoi se
moucher. La bouche est petite, les lèvres assez fortes et mal dessinées, les
joues très-grandes, le menton rond et grand, peu ou point de barbe. Ils
m’ont paru avoir généralement le buste long et fo r t, et n’avoir pas les belles
jambes, communes parmi les Nègres : cela tient peut-être à la vie sédentaire
que leur imposent les métiers que presque tous exercent.
Ils sont sérieux, taciturnes, souvent tristes« Ils ne se mêlent pas avec
les autres Esclaves, qu’ils regardent comme très-au-dessous d’eux. Je n’en ai
pas vu un seul aller nu ; tandis qu’il y a des Malgaches auxquels il est impossible
de faire garder autre chose qu’un Langoutis. Les Cafres et les Jam-
baneS sont de même.
Les Malais sont d’industrieux ouvriers ; on les emploie aussi, à cause de
leur activité et de leur intelligence, au service domestique. Ils passent pour
être d’excellents ou de détestables sujets.
Il faut les amener extrêmement jeunes dans la Colonie, sinon le souvenir
de leur pays ne sort pas de leur mémoire; ils languissent quelques années
et meurent ou se détruisent. On a vu des femmes malaises qui appartenaient
à des maîtres humains, noyer leurs enfants avec elles. L’ennui, le chagrin, la
maladie du pays les poussent au suicide, que leur superstition encourage.
Après leur mort, elles doivent retourner dans leur Ile.
Au reste, pour être plus commun chez les Malais, le suicide n’est pas rare
chez les autres Esclaves de Bourbon. Le dégoût de la v ie , le désespoir violent
la vengeance, en sont la cause. Un Noir amoureux, que l’on vend et que l’on
sépare de sa maîtresse, un homme que son maître à surmené, qu’il a accablé
injustement, se pendent. La mort d’un esclave coûte tout ce qu’il valait à
son maître injuste.
Ils ont une magnifique expression pour dire : se suicider ; ils disent : tuer
son corps.
Les Malabars qu'on voit à Bourbon , sont pour la plupart des gens amenés
comme domestiques par des Colons venânt de l’Inde. Il y en a peu d’Esclaves.
Libres ou Esclaves, tous servent dans la domesticité des maisons les plus
riches. Us ont les plus beaux traits du monde, 1 ossature la plus régulière et
la plus noble, le front haut, les yeux bien ouverts en forme d’amande, le nez
droit, plus souvent aquilin, la bouche bien dessinée, le menton petit, les
cheveux noirs et plats, mais ni grossiers ni secs comme ceux des Malais ;
de là barbe, au-dessus des lèvres surtout et vers le bas du menton, comme
il arrive ordinairement en Europe à des individus très-basanés, dont les
traits sévères et réguliers ressemblent beaucoup à ceux de ces gens-ci. Us sont
très-colorés: il y en a de tout à fait noirs; ils ont Jes mains et les pieds petits
et bien faits. Les proportions de leur corps sont élégantes et leur costume les
fait valoir. Us sont vêtus de pantalons blancs et d’une sorte de redingote ou
de tunique blanche, serrée autour des reins et sur la poitrine avec une
ceinture écarlate, et descendant jusqu’aux genoux sans s’ouvrir; une pièce
d étoffe, blanche ou écarlate est roulée en turban autour de leur tête.
La dénomination de Noirs Créoles s’applique indistinctement à tous les
Esclaves nés dans la Colonie. quelle que soit la patrie de leurs parents. La plupart
sont Mulâtres, nés de Blancs et de femmes malgaches ou négresses. Le nombre
nen est pas très-considérable , parce que la proportion des femmes aux
hommes est très-petite dans les importations de la traite. Dans les habitations
ils s unissent entre eu x , et il résulte de là des enfants de race nègre pure,
ou malgache, ou mêlée de nègre et de malgache. Ces enfants, toujours peu
nombreux, parce qu’il n’y a qu’un assez petit nombrè de Négresses sur les
grandes habitations, et que la plupart, livrées à un extrême libertinage, n’en
font pas, sont élevés souvent dans la maison du maître et destinés au service
domestique. Us sont ordinairement les souffre-douleurs de leurs jeunes'maîtres.
Plus tard, ils deviennent leurs complaisants; beaucoup deviennent d’exécrables
sujets. Ce sont les plus fins, les plus intelligents, les plus adroits et les
plus fripons de tous les Noirs. Très-peu demeurent sur les habitations où ils