
sans beaucoup d’originalité, écrit avec goût, mais enflé, très-inutilement pour
le lecteur, des longueurs et des répétitions de cette forme décrit. Les habitants
de Calcutta, que le devoir d’un emploi pu b lic , ou l’exercice d’une
profession, y retiennent toute l’année, apprennent l’Inde dans le livre du
docteur Héber. I c i , et déjà à Bénarès, de la bouche de critiques fort compétents,
j ’ai entendu dire que la partie descriptive de ce livre est la seule digne
d’être lue ; on conteste la justesse de tous ses aperçus moraux et sociaux
sur les natifs. On ajoute q u e , quoiqu’il pût réciter quelques prières de l’Eglise
anglicane traduites en hindoustani, il comprenait à peine un mot du
langage vulgaire du peuple. Il a vu l’Inde, dit-on à Agrah, au travers des
contes de son intendant ou huissier (DjémadarJ, drôle fripon et spirituel,
qui se faisait un plaisir de mystifier la candeur de son maître ; et il a
traduit en anglais ces véridiques histoires, que sa veuve ensuite a données
au public.
Le 26 février 183o. A Muttrah , i 3 mil. ( 3 ^ 1.) de Furrah.
Le 24 février i 83o .— Nurfauta, 10 mil. (3 /. ) tVAgrah.
Le 25 février i 83o. — Furrah, 12 mil. (3 ^ /. ) de Nu r lut ta.
Je suis la grande route de Dehli : elle passe souvent près des bords de la
Jumna, dont le cours est tortueux. Cette rivière est beaucoup moins large ici
qu'à Kalpi. G’est de la Chumbul surtout qu elle se grossit entre cette ville et
Agrah. On l’a vue, au-dessous de son confluent avec cette rivière, monter de
de 2m,5 en douze heures, dans une crue extraordinaire de la Chumbul.
Dans le sable limoneux de ses bords, croissent plusieurs plantes d’Europe,
que j ’ai déjà observées sur sa rive à Kalpi : Jîanunculus sceleratus, Juncus
bufoniùs, Polygonum aviculare? Gnaphalium germanicum ? e tc ., etc. Quelques
îles, qui restent à sec pendant sept mois de l’année, sont couvertes
de cultures en cette saison. Il est impossible d’être moins bleue et moins
pittoresque que la Jumna.
La campagne est sablonneuse, mêlée de cultures et de terres vagues, où
croit presque exclusivement le Capparis Aphylla{\) avec une ou deux espèces
de Zyzyphus. Peu de blé; l’orge est la céréale qui domine; le pois chiche
parmi les légumineuses, mêlé au colza; le coton.
(1) Mauvais nom. Les jeunes pousses, sorties depuis quelques jours, montrent une très-
petite feuille lancéolée, mucronée, sous chaque pédoncule. Chacune est accompagnée de deux
stipules infiniment petites, molles d’abord, qui persistent, croissent et durcissent après la chute
de la feuille; les baies sont rougeâtres, de la grosseur d’une cerise, mucronées,
Autour des villages le Tamarix Articulata forme des ombrages légers,
infiniment gracieux, mais tristes comme ceux des pins, auxquels il ressemble
étrangement. Les villages, d’ailleurs éloignés les uns des autres, . offrent
tous l’aspect de la décadence. La plupart sont entourés de fortes murailles
flanquées de tours, et dans plusieurs, cette enceinte n’enferme plus que quelques
chaumières.
Muttrah est une ville fort ancienne, et au milieu de cette contrée toute
musulmane, elle paraît plutôt hindoue. Elle est bâtie sur un terrain très-ra-
viné, au bord de la Jumna. Ses rues sont les plus étroites, les plus tortueuses,
les plus montueuses et les plus sales que j ’aie encore vues. Sa population
n’est probablement pas moindre de 40,000 âmes. Il y aune grande mosquée,
avec deux minarets couverts d’émaux et presque ruinés, qui me paraît avoir
près de deux siècles. Le Fort, dont les ruines dominent la ville, est probablement
encore plus ancien. Les édifices du culte hindou sont plus modernes. Je
les visitai un jour de fête, et le peuple rassemblé y chantait mieux que je n ai
encore entendu en ce pays, une musique fort semblable à celle des vêpres.
Des légions de singes habitent parmi les ruines et courent sur le s. maisons,
sautant sans peine d’un côté à l’autre des rues les plus larges. Il serait excessivement
dangereux d’en tuer u n , beaucoup plus que de tuer un homme, car
cet animal est sacré pour deux raisons : d’abord, dans la ^guerre de Ceylan
contre l’Inde, les singes se mirent du côté des Indiens; puis, le singe est
une des incarnations de V^ischnou. Les natifs néanmoins voient sans déplaisir
ces animaux captifs chez les Européens, tourmentés par les enfants ; de même
qu’ils battent à outrance les boeufs qu’ils révèrent.
Le ministre du Rajah de Gwalior bâtit en ce moment à Muttrah un
temple nouveau, qui ressemble à une caserne ou à une filature de coton ; il
n’en diffère réellement que par les peintures monstrueuses de la mythologie
hindoue dont ses murs sont couverts, et une sorte de façade sculptée a jour,
travail qui se fait aussi bien aujourd’hui qu’au temps où fut elevé le Tadje.
Muttrah est une forte station militaire. Deux régiments de sipahis et
un de cavalerie légère native, le premier corps de cavalerie indienne que j aie
vu, et un superbe corps vraiment, avec une batterie d artillerie, y sont placés
sous les ordres d’un général ( le brigadier Richards, le même qui était à la
tête de l’armée d’Arracan, dans la guerre de lord Amherst:), qui commande
aussi les forces d’Agrah. La frontière vers 1 ouest est toute voisine, bien
qu elle ait. été reculée un peu du côté de Burtpour, après la prise de cette
place, dont une petite garnison anglaise occupe les ruines; et le Rajah de
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