
Ils reposent immédiatement sur un Granité qui n’a aucune apparence de
stratification, et dans lequel je n’ai pas trouvé de cristaux étrangers, ni Grenat,
ni Amphibole.
Ce Granité forme la base des Montagnes. Il est caché presque partout par
la terre végétale, et les éboulements de Grès tombés des escarpements. On
ne le voit en place que dans le lit de quelques ruisseaux, dans les ravins peu
nombreux qui sillonnent les pentes inférieures de la Montagne de la Table et de
celle du Diable. La hauteur verticale de la croupe du Lion mesure assez exactement
celle jusqu’où il s’élève sur les pentes de la Table.
J’ai vu en deux points assez éloignés la rencontre des deux terrains. L’une
et l’autre de ces jonctions se font à une hauteur pareille au-dessus de la mer
( 4oo mètres environ ) ; circonstance que j ’avais déduite à l’avance de l’horizontalité
et du paralléhsme parfait des strates du Grès.
Le Granité qui supporte cet immense terrain de Grès est recouvert à sa base
par des lambeaux d’un terrain qui paraît avoir beaucoup d’analogie avec celui
du Grès, mais dont les couches, inclinées et relevées de toutes parts vers le sommet
des Montagnes, admettent entre elles des Bancs d’argile. La fig. 4> Pl.IV, représente
la position de ces terrains. Les rapports de O' avec G sont loin d’être
aussi distincts dans la nature que je les ai indiqués dans cette coupe, et la composition
de ces.couches inférieures m’est aussi trop insuffisamment connue pour
qu’il ne me reste pas de doute sur leur simihtude avec les couches O.
A quelle formation rapporter ces Grès? Ils reposent sur le Granité et ne sont
point recouverts. Il n’est point de gisement plus indéterminé. Aucun fossile
d’ailleurs qui puisse particulariser leur âge. Ce n’est donc que par la comparaison
de ces Roches avec celles d’un Terrain où se trouvent des Roches semblables,
mais déterminées géologiquement par leur gisement et leur association
avec des Couches contenant des Fossiles, qu’on peut leur assigner une
d énomination.
Je regarde ces Grès comme appartenant au terrain de Grès bigarré (new red
sandstone des Anglais ) compris entre le Zechstein et le Muschelkalk.
Quatre heures suffisent aisément à l’escalade de la Montagne de la Table.
Un cheval adroit y grimperait. Le sommet en est désert et sauvage. On découvre
de là une vue très-étendue. La Tête du Lion ne semble plus qu’un monticule
à peine séparé de la Montagne; la Croupe du Lion se distingue peu de Green-
point, tant elle paraît basse. Au delà on aperçoit l’île Robben, et, dans le canal
qui la sépare de Greenpoint, un point blanchâtre indique la position de la Baleine
( Whale où la mer se brise en écumant. Au Nord, et tout près de la
côte qui va en s’abaissant rapidement dans cette direction, on distingue l’Ile
de Dassen, à la distance de sept lieues.
Au N.E., la vue plonge sur le continent de l’Afrique; elle rencontre et franchit
trois chaînes de Montagnes qui s’élèvent les unes derrière les autres , et ne
s’arrête qua une quatrième qui borne ce côté de l’horizon, et dont je n’estime
pas la hauteur moindre que celle de la Table; je la crois éloignée d’environ
io lieues.
Toutes ces Montagnes ont l’aspect aride de celle de la Table vue de la mer, à
la même distance. Elles cachent les vallées qui les séparent.
Des brumes, qui obscurcissaient le ciel de ce côté, nous empêchèrent de saisir
les vastes contours de False-Bay; mais, en regardant au S., nous voyions la
plate-forme où nous étions assis, s’abaisser en se rétrécissant, et manquer tout
à coup. C’est le cap de Bonne-Espérance, géographique.
L’état du ciel au sommet de la Montagne de la Table fournit aux habitants
du Cap des pronostics météorologiques, dont le peu de durée de mon séjourne
m’a point permis de reconnaître la justesse. Un nuage blanc le couvre fréquemment
, que le vent de S . E. précipite et disperse sur ses pentes en épais flocons.
J’ai eu occasion de voir ce curieux phénomène. Un autre jour j ’ai vu la couche
épaisse et régulière de nuages qui couvraient la Montagne, tomber lentement
de sa crête en large nappe, et se répandre sur ses flancs, en devenant successivement
moins épaisse et plus vaporeuse. On eut dit d’un fleuve et d’une cascade.
Les ruisseaux qui coulent des Montagnes fournissent l’eau à la ville du Cap.
Elle y est excellente et très-abondante. Il faut être Espagnol ou Portugais, je
veux dire barbare, pour s’en laisser manquer, lorsqu’on a des moyens d’en
avoir, comme à Rio-Janeiro. Les Anglais, depuis leur établissement, ont
multiplié les conduits et les fontaines. Les Hollandais auparavant avaient creusé
des fossés inutiles, où, selon leur instinct, ils avaient bâti de petites écluses,
afin d’avoir de la boue et des grenouilles en quelques petites places, fis ont
réussi à faire un petit marais dans la cour de la Ménagerie.
Celle-ci est fort misérable. J’y ai vu des Lions, une Hyène d’Afrique, des Chacals,
et un Tigre du Bengale. Un marchand d’objets d’histoire naturelle en a
tout autant chez lui. Il m’a montré un Lion et une Lionne qu’il possède depuis
plus de io ans; ces animaux ont fait en captivité un très-grand nombre de petits.
Ils n’ont qu’une petite cour pour se promener, et sont de la plus grande
beauté. J ai vu dans la basse-cour du même homme une Autruche de la plus
grande taille. Elle n’avait pas moins de 2m,27 de haut. Un Chien la fit courir.
J’admirai sa vitesse.