
pas : ils croyaient avoir été parfaitement polis à son égard, e t, en effet,
suivant les usages du pays, ils l avaient été.
La visite de lord Combermere eût fait à cette heure quelque petite sensation
parmi eux; ils se fussent levés certainement, mais c’eût été pour son
titre, beaucoup plus que pour son grade, et en tout cas nullement pour
son âge.
Mais cette inconvenante égalité dans la société n’affecte nullement la subordination
dans le service. L à , le grade du moins exerce ses droits sans contestation
: l’obéissance est parfaite.
Tittagur, le 16 octobre 1829.
S é r a m p o u r .— L e d o c t e u r C a r e t . — L e s M i s s io n n a ir e s p r o t e s t a n t s Après
mainte visite et mainte lettre échangées sans succès, j ’étais enfin parvenu à
trouver le docteur C arey, et nous avions fixé un jour pour voir son jardin.
Le chevalier Ryan devait être de la visite : je traversai la rivière, lundi dernier/
12 octobre, \)0\iy le prendre, et pousser jusqu’au docteur. Il était préside
5 heures, il ne faisait que chaud, chacun prit son parasol, et en voisins nous
nous présentâmes chez le vieillard. Nous le trouvâmes lisant la Bible qu’il
doit savoir par coeur vraiment, depuis 5o ou 60 ans qu’il la lit tous les jours.
Il nous montra sa bibliothèque qui est fort belle, quelques beaux dessins
d’insectes et de plantes qu’il fait faire près de lui par des peintres natifs, mais
où les détails de l’organisation manquent habituellement, — et nous nous remîmes
en marche avec lui pour aller à son jardin. Nous n’avions que celui du
collège à traverser : en quelques instants nous fûmes dans son enclos. Il est
petit, mais si bien ordonné, qu’un très-grand nombre de plantes y trouvent
place. Trente jardiniers au moins sont nécessaires à son entretien. Diverses
constructions ingénieuses y sont établies pour modifier le climat en faveur
des espèces qui ne pourraient absolument s’y accommoder.—Celles du Cap sont
cultivées sur une couche élevée à quelques pieds au dessus du sol, dans un encaissement
de maçonnerie : on les présèrve ainsi de l’humidité qui les ferait périr ;
un abri les garantit de la pluie. Ailleurs sont cultivées quelques plantes des
MolÎuqües, si sensibles au froid, qu’elles périraient ici chaque hiver si elles
n’étaient protégées par des écrans pendant la nuit pour empêcher le refoidis-
sement par rayonnement. Tout.cela doit être fort dispendieux; et M. Carey
n’a point pour se défrayer l’admirable ressource de la Compagnie ; ce n’est
qu’un pauvre missionnaire !
Le plus bel arbre de son jardin est un Corypha umbraculifera qu’il a planté
il y a vingt ans, et qui vient de fructifier pour la première fois. Cet effort
le fait périr.
Une odeur fade et détestable se répandit tout à coup dans Pair, tandis que
nous nous promenions dans le jardin, et se dissipa pareillement. Cétait un
souffle de l’ouest qui apportait les émanations des jungles. Chacun s’alarma,
et cria au jungle smell, comme on crie au feu. C’était, dit-on, tout ce qu’il
faut pour être saisi d’une fièvre pernicieuse. Une des personnes qui se trouvaient
là, acclimatée, si l’on s’acclimate en i 5 ans dans ce pays, se trouva
incommodée le soir, et dut quitter la table avant le dessert. J’ignore ce qui
en est advenu.
Nous revînmes quand la nuit nous chassa du jardin, la soirée était délicieuse
; dans une des allées herbeuses qui entourent le noble édifice du collège
, nous rencontrâmes des domestiques qui menaient deux chevaux fumants
dè sueur, et nous distinguâmes en même temps deux grandes figures blanches
comme la neige ; c’était un homme et une femme, et une tres-jolie femme en
vérité; je ne pus voir qu’elle de près : on me dit que 1 inconnu était M. Mac,
un missionnaire, et que, sans mystère, il se promenait paisiblement avec sa
femme, après avoir couru à cheval avec elle.
Et ils s étonnent de ne pas faire de conversions !. . . Us ont une femme,
des chevaux, des domestiques, ils habitent une maison commode. . . . et ils
se disent missionnaires !. . . .
Quelques missionnaires catholiques courent le monde à pied et nu - pieds
pour convertir les infidèles ; ils en ont converti beaucoup. Ils s y prenaient
comme les apôtres, et comme eux souvent ils ont réussi. Les missionnaires
anglais, et, d’une manière générale, les missionnaires chrétiens protestants,
attendent patiemment chez eux que les infidèles se présentent. M. Carey,
missionnaire, ne.sort pas de sa maison pour convertir les Hindous; quest-ce
que cela lui rapporterait? Mais, malgré son âge, il va chaque semaine à
Calcutta pour donner, au fort William, une leçon de bengali aux pupilles
de la Compagnie qui le paie amplement. M. Mac, missionnaire assistant,
prêche la parole de Dieu aux polissons qui viennent chez lui pour 1 entendre :
pour la prêcher, il ne se dérange pas ; mais pour la chimie, c est une autre
affaire. Comme il pense sans doute qu elle est beaucoup plus utile que 1 Evangile,
pour la prêcher, il court jusqu’à Calcutta après un auditoire; mais il
faut payer pour entrer.
Est-ce là un prêtre ? .
Cependant, c’est un honnête homme sans doute ; mais il est placé entre des
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