
réfuter les 'merveilles de l’hiftoire du Meflie par ce
trait ironique : Amice Moïfes, confufus non Jum, quia
quæ eu dicis vérifie abuntuir, cùm Deus fiet homo, p. 13 i.
Il lui fait aufli quelquefois des difficultés malignes ,
comme lorfqu’il lui dit, p. 114. Die mihi, 0 MoïJes,
quart imputatur judais mors Chrifii , pofiquam filtrant
excoecati ab ipfo Jefu, aXque indurati corde ; & p. 116«
hoc non afeendit in cor meurn , quod Deus tradiderit in
mortem filium fuum pro homint fervo. Plac abhorrent le-
ges & natura, & omni audienti e f incredibile. E t , quod
pejus ejl, tu Deum effe pajfibilem ajferis. Quelquefois
l’auteur y fait dire des hétérodoxies à Moïfe, comme
lorfqu’il reconnoît trois Dieux dans ce dernier verfet
du pl. 66. benedicat nos Deus, Deus nojler, benedicat
nos Deus ; ecce David nominal très Deos , dit- il, en
propre termes, pag. 131. quelquefois, il lui fait dire,
comme s’il avoUoit fa défaite : O J Belial, valdè me
pungis, & fubùliter me arguis, pag. 184.
De plus, on voit dans cette piece Moïfe ne fe défendre
qu’en fe fâchant, & qu’en fe répandant en injures;
au lieu que Belial fe contente de dire paifible-
ment l'es raifons, & recommande la douceur a Moïfe.
E t tune , ait Mo ■ if,s ad Belial j ô Belial, die mihi, ne-
quifjime. Ait Belial, Moïfes, eflo fapiens , ■ 6* die quod
vis & coram judice non loquaris vitupyofe ; quia patienter
audiam. •
Ce défaut régné encore plus dans le procès de fatan
contre la Vierge, devant Jefus. La Vierge criaille, pleure
, dit des inveôives , 6c veut à peine laifler parler
fon adverfe partie ; jufques-ià, que fon fils eft obligé
de lui impofer filence , & de lui dire avec quelque
forte de feverité : O mater ! dimitte ipfum dicere, quia
incivile e jl, n if eum tôt à lege perfpeclâ ali qui d judicare,
vel refpondéré permiferis, pag. 30. fatan au contraire ,
fait fe modérer, & fe défend avec beaucoup de tranquillité.
Si cette piece avoit été compofée dans un fiecle
éclairé, on auroit raifon de la regarder comme un
artifice criminel de celui qui en feroit l ’auteur ; mais
la barbarie 6c la grolfiereté du tems dans lequel vi-
voit Palladino, femble le mettre à couvert de ce foup-
çon. Quelques perfonnes même penfent qu’il ne com-
pofa cet ouvrage, que pour remettre devant lés yeux
des peuples de ce fems-là, l’Ecriture-fainte & la re-
ligon, dont ils n’avoient plus aucune idée, & pour
leur en donner au-moins quelque teinture. En ce eas-
l à , fa malhabileté étoit encore plus grande que le ridicule
de fes contemporains,
Qui fottement [élis en leur Jimplicité ,
Jouoient les Saints, la Vierge & Dieu par piété.
Mais je croirôis plutôt que l’unique but de Palladino
, étoit d’exercer fes talens pour le barreau, fur
quelque fujet intéreffant & peu commun , & de fe
fingularifer par unefêmblable entreprife ; enforte que
rien ne lui partît plus propre à y réuffir, qu’une imagination
aufli extraordinaire, que celle d’un procès
entre le diable 6c J. C . , ou entre fatan 6c la Vierge
Marie.
L’ouvrage dont nous parlons a été traduit, comme
je l’ai dît, dans prefque toutes lès langues de l’Europe.
Il y en aune verfion allemande, imprimée à Strasbourg
en 1477. in-folio, avec des figures en bois ; à
Ausbourg en 1479, en 1481 6c en 1493. in-folio ; 6c
de nouveau à Strasbourg en 1508. in-40. Le jurif-
confulte Jacques Ayerer a revu cette ancienne traduction,
en a changé le langage. , 6c l’a publiée de
nouveau à Francfort en 1600. in-folio. Cette édition
a été renouvellée en 1656. in-40. avec plufieurs commentaires.
La plus vieille traduction françoife eft intitulée :
Procès fait & démené entre B elial, procureur d’enfer, 6*
Jhefus fils de la Vierge Marie, tranjlaté de latin en commun
langage , par vénérable & diferete perfonne frere
Pierre Target, de Tordre des Auguflins ; elle eft imprimée
fans indication de v ille , m d’imprimeur, mais
probablement à Lyon en 1482. en caraCteres gothiques
, 6c avec figures, in-folio. La fécondé verfion eft
intitulée, la conjolation des poures pécheurs , ou le procès
de Belial à l'encontre de Jhefus ; cette verfion a été
mife au jour à Lyon, par Jean Fabri en 1485. i/2-40;
6c réimprimée au même endroit 6c de la meme forme
, en 1490 6c en 1512. Toutes ces éditions font
remplies de figures en bois, mal faites & fort grotesques
I . W Ê Ê Ë
On a du meme livre une verfion flamande , mife
au jour à Harlem en 1484. in-folio, 6c donnée plufieurs
fois depuis ; favoir , à Anvers en 15 12 , en
15 16 , en 15 5 1 , en 1558. in-folio, 6c ailleurs.
L’index d’Efpagne des livres prohibés, condamne
une verfion efpagnole du même livre, 6c l’index romain
en condamne une italienne.
La traduction danoile eft de l’an 1589. ",
Comme l’imprefîion de toutes ces traductions ne
s’eft faite qu’avec approbation 6c permiflion, & que
rien n’étoit autrefois plus en ufage que leur leCture ,
il ne faut point douter qu’elles ne fuflent encore aujourd’hui
fort en vogue , fi les lumières du chriftia-
nifme n’en avoient fait fentir tout le ridicule. Je ne
fai même, s’il n’entre pas beaucoup* de politique dans
l’interdiCtion de l’index romain ; les auteurs de cet
index auroient honte de fe trouver encore expofés
aux juftes reproches qu’ils ont efliiyés fi long tems ,
d’autorifer des livres pleins de ridicule ; mais un ouvrage
beaucoup plus condamnable, 6c approuvé fîn-
gulierement en Italie , c’eft celui du jéfuite françois
qui a travefti l’Ecriture-fainte en roman, „fous le titre
féduCteur , d'hiftoire du peuple de Dieu, tirée des
feuls livres faints. (Le chevalier D E J A U COU R T .}
TERASSON, ( Géog. mod. } bourg que nos géographes
nomment ville de France, dans le haut Périgord
, à quatre lieues de Sarlat, fur la riviere de
Vezëre.Tl y a une abbaye de l’ordre de S. Benoît.
Long. iS.fiS. latit. 4S.P). (D . J .}
TERATOSCOPIE, f. f. divination par l’apparition
& la vue dès monftres, des prodiges, des fpec-
tres, dès phantomes ; ce mot eft formé de prodige
, 6c de er,L07iiu, je confédéré.
Ce fut par la teràtofcopie'que Brutus, le meurtrier
de Céfar , augura qu’il perdroit la bataille de Philippe
, lorfque la veille de cette aûion , un fpeCtre lui
apparut dans fa tente. Cefut aufli par elle que Julien
l’apoftàt étant à Paris fe laifla proclamer âugufte par
l’armée des Gaules ; le génie de l’empire, qui lui
apparut, dit-il, la nu it, fous la figure d’un jeune
homme, l’ayant follicité 6C comme forcé de côndef-
cendre à la volonté des foïdats. Il étoit aifé par ambition
, ou par d’autres femblables motifs, d’iniàgi-
ner des prodiges 6c des apparitions , 6c de feindre
qu’on fe rendoit à la volonté des dieux, lors même
qu’on ne fuivoit que fon penchant.
TERBEDH, ou TERBADH , f. m. ( Mat. médicé
des Arabes.} nom donné par Avicenne au fiirbith purgatif,
dont tous les auteurs de fon tems font mention
, quoiqu’en général d’une maniéré fort confufe."
Le turbith de Sérapium efltle tripolium des Grées.
Le turbith des autres auteurs, eft la racine alypuni -
toutes chofes fort différentes entre elles, 6c plus encore
du vrai turbith de nos droguiftes , décrit par,
Gardas ; cependant, il paroît que le turbèdh d’Avicenne
, eft véritablement notre turbitK ; en effet, il
dit que le turbith étoit une fubftance ligneufe , qu’on
apportoit des Indes orientales, 6c que cette fubftan-
çe étoit cathartique. Garicas nôus affure de même
qu’Avicenne, que les Indiens en font ufage pour purger
les férofités , 6c qu’ils en eprrigent la violence
avec du gingembre. CD. J.}
TERCEÂU, f. m. ( Grdm, & Jurifprud. ) tertia feu.
'tertia pars, eft une redevance feigneuriale qui eft due
en quelques lieux aufeigneur, pour la conceflion de
terres plantées en vignes.
Dans la coutume de Chartres, ou ce droit a lieu,
Rivant l’article 113 , il fe prend fur les vins , à la
cu v e , ou autre vaiffeauà vin, 6c le fujet doit avertir
le feigneur, fon procureur , receveur, ou commis,
avant de tirer fon v in , à peine de foixante fols d’a-
tnende.
Ce droit paroît venir de la tierce, tertia, ou troifie-
me partie des fruits en général, qui fe payoit anciennement
au propriétaire par fon ferf, ou colon, qui.
faifoit valoir la terre de fon maître. Voye[ Bouque.
Ce droit de terceau revient à ce que l’on appelle
'complaire en Poitou, quart-pot en Bourbonnois , vinage
à Senlis. ( A )
TERCERE, ( Géog. mod.} île de la mer du Nord,
& la plus confiderable entje les Açores ; elle a environ
quinze lieues de tour, trente mille habitans, 6c
eft toute environnée de rochers qui la rendent prefque
imprenable. Cette île eft abondante en poilfon ,
en viande, en fruits , en gros boeufs qui font les plus
beaux du monde , en racines qu’on nomme barates,
6c en blé ; mais elle manque d’huile, de fel, de chaux,
& de toutes fortes de poterie. On conferve le blé
dans des puits creufés en terre, 6c fcellés d’une pierre
à leur ouverture.
La capitale de l’île fe nomme Angra ; elle a cinq
paroiffes, 6c eft le fiege d’un évêque , fuffragant de
Lisbonne. Son havre fait en forme de croiflant, eft
le feul mouillage qu’il y ait dans l’île ; le principal
commerce de Tercere , eft en paftel ; les paffages des
flottes de Portugal & d’Efpagne, qui vont aux Indes,
au Bréfil, au Cap-verd, apportent par le commerce
jdu profit aux habitans.
Les Portugais ayant obfervé que Iorfqu’un vaif-
feau eft au méridien des Açores, l’aiguille marine
frottée d’aiman , regardedireftement le feptentrion,
fans aucune variation ni vers l’orient, ni vers l’occident
, mais qu’au-delà 6c au-deçà, elle incline un
peu vers l’une ou l’autre partie du monde, cette observation
leur a fait placer à Tercere le premier méridien
, au-lieu que les François le pofent dans l’île de
F e r , l’une des Canaries. (D . J. }
T E R C O T , TER CO, 0« TER CO L , Voye^ T orco
u .
TÉRÉBENTHINE, f .f. (Hift. des drogues exot.}
c ’eft un fuc réfineux de divers arbres ; car quoique
ce mot ne convienne qu’à la feule réfine qui découle
du térébinthe, on l’étend à divers autres fucs ; mais
on connoît en particulier, dans les boutiques des droguiftes
curieux, cinq fortes de térébenthines , dont
nous allons parler , favoir celle de Chio , de Perfe,
deVenife, de Strasbourg, & la commune.
La térébenthine de Chio, s’appelle ttrebenthina Chia,
vel Cypria, off. c’eft un fuc réfineux liquide, qui
découle du térébinthe , blanc , jaunâtre, ou de la
couleur du verre , tirant un peu fur le bleu , quelquefois
tranfparent, de confiftance tantôt plus fer-,
me, tantôt plus molle , flexible 6c glutineux. Lorf-
qu’on frotte la térébenthine entre les doigts, elle fe
brife quelquefois en miettes ; le plus fouvent cependant
, elle eft comme le miel folide, elle cède 6c
s’attache aux doigts comme lui ; fon odeur eft forte,
mais non défagréable, femblable à celle de la réfine
du mélefe , c’eft-à-dire à la térébenthine deVenife,
fur-tout lorfqu’on la manie dans les mains , ou qu’on
la jette fur les charbons; elle eft modéremment amere
au goût & acre : on eftime beaucoup celle qu’on ap-
P® e direûement des îles de Chio , & de Cypre ;
c eft de ces îles qu’elle tire fon nom. Les anciens la
connoifloient, 6c enfaifoient ufage.
Cette réfine découle d’un arbre qui vient fans cul-
jpre dans ld e de Chio. II eft déjà décrit : parlons
Tome X V E —
donc du même térébinthe de Languedoc & du Dau*
phiné; c’eft le terebinthusvulgaris, C. B. P. terebinthus,
J. B. Cet arbre eft toujours verd, de la grofleur d’un
poirier ayant une écorce cendrée 6c gerfée ; fes branches
s’étendent au large, 6c les feuilles y font alternativement
rangées , conjuguées , roides & fermes *
peu differentes de celles du laurier , mais plus obf»
cures ; les fleurs, au commencement de Mai, fe trouvent
ramaffees par grappes au bout des petites branches
; ces fleurs font des étamines de couleur pourpre
, auxquelles il ne fuccede aucun fruit ; car l’ef-
pece qui rapporte du fruit, a des fleurs qui n’onc
point^ d’étamines ; les fruits viennent aufli en grappes
; ils font arrondis, longs de deux ou trois lignes ,
a^ ant une cocIue membraneufe , rougeâtre ou jaunâtre
, un peu acide, ftyptique, 6c réfineufe : cette
coque n’a qu’une loge, fouvent vuide, d’autres fois
pleine d’une amande.
Cet arbre eft chargé vers l’automne de certaines
vefîies attachées aux feuilles 6c aux rameaux , affez
femblables à celles qui naiffent fur les feuilles de l’orme
, mais de couleur purpurine ; quelquefois l’on
trouve à 1 extrémité des branches des excroiflances
cartilagineufes, de la figure des cornichons, longues
de quatre , cinq, fix doigts , & davantage , de formes
differentes , creufes 6c rouffâtres : ces excroif-
fances étant ouvertes, paroiflent contenir , de meme
que les veflies, une petite quantité d’humeur vif-
queufe , couverte d’ordures cendrées 6c noirâtres ,
&de petits infe&es aîlés. Tous les auteurs qui ont
parlé de.cet arbre , ont fait mention de ces excrôif-
fances, 6c elles ne font autre chofe que des efpeces de
gales produites par des infe&es qui piquent les feuil-
les, y dépofent leurs oeufs , 6c leur fourniffent par-
là une matière propre à les faire éclore, les nourrir
enfuite , 6c les conferver par une fage prévoyance
de la nature. On ne ramafle point de réfine de ces
veflies, ni de ces excroiflances ; mais on la retire du
bois : on fait des incifions aux troncs, & aux branches
de cet arbre, après qu’il a pouffé fes bourgeons
, ainfi qu’aux aùtres arbres qui font réfineux £
de ces incifions il découle une réfine d’abord liquide ,
qui s’épaiflit peu-à-peu , 6c fe déffeche.
Celle que répand abondamment le térébinthe de
Chio , eft epaifle , d’une couleur blanche tirant fur
le bleuâtre , prefque fans faveur, 6c fans odeur ,
s’attachant fort légèrement aux dents, 6c s’endurcif-
fant facilement. La récolte de ce fuc fe fait en inci-
fant en-travers, avec une hache, les troncs des gros
térébinthes , depuis la fin de Juillet, jufqu’en Octobre
; la térébenthine qui en coule, tombe fur des pierres
plates, placées fous ces arbres par les payf'ans ;
ils l’amaflënt avec des petits bâtons qu’ils laiflent
égoutter dans des bouteilles : onia vend fur les lieux
trente ou trente-cinq parats l’oque, c’eft-à-dire, les
trois livres 6c demie 6c une once. Toute l’île n’en
fournit pas plus de trois cens oques. Cette liqueur
paffe pour un grand ftomachique dans le pays ; nous
parlerons plus bas de fes vertus.
Kæmpfer fait particulièrement mention de la térébenthine
de Perfe , très-ufitée parmi les Orientaux;
elle n’eft pas différente de celle de Cypre : on la recueille
des térébinthes qui abondent dans les montagnes
, dans les déferts , aux environs de Schamachia
èn Médie , de Schiras en Perfe , dans les territoires
de Luriftan , 6c ailleurs. Les habitans retirent beaucoup
de liqueur réfineufe, qui coulependant la grande
chaleur, du térébinthe auquel on a fait une inci-
fion, ou de lui-même , ou des fentes & des noeuds
des fouches qui fe pourriffent. Ils font un peu cuire
cette liqueur à un feu lent, & ils la verfent avant
qu’elle commence à bouillir; étant refroidie , elle a
la couleur 6c la confiftance de la poix blanche.
Cette térébenthine ne fert chez les Orientaux que
T i j