593 T R E
Philippe-Augufte , puis chancelier fous Louis VIH.
fit S. Louis. , , , I
Il recueillit-ce qu’il put trouver de copies de chartes
qui a voient été enlevées , Sc rétablit le furplus
de mémoire le mieux qu’il lui fut poffible. r i
Il fut arrêté que l’on mettroit ce qui avoit ete àinli
rétabli, & ce qui feroit recueilli à l’avenir, en un
lieu oh ils ne fuffent point expofés aux mêmes ha-
fards ; Sc Paris fut choifi, comme la capitale du royaume
, pour y conferver ce dépôt précieux. .
Il eft préfentement placé dans un petit batiment
en forme de tour quarrée , attenant la Ste Chapelle,
du côté feptentrional : au premier etage de ce bâtiment
eft le trêfor de la Ste Chapelle ; & dans deux
chambres l’une fur l’autre , audeflus du Infor delà
Ste Chapelle, eft le tréfor des chartes. _ .
Mais ce dépôt n’a pu être placé dans cet endroit
que fous le régné de S. Louis ; Sc feulement depuis
1246 , la Ste Chapelle n’ayant été fondée par ce roi
que le 12 Janvier de cette année. , A
Les chartes ou titres recueillis dans ce depot lont
les contrats de mariages des rois & reines, princes
& princeffes de leur lang, les quittances de dot, affi-
gnations de douaire, lettres d’apanages, donations,
teftamens , contrats d’acquifition, échangés , & autres
aftes femblables , les déclarations de guerre, les
•traités de paix, d’alliance, &c.
On y trouve aufli quelques ordonnances de nos
■ rois , mais elles n’y font pas recueillies de fuite, ni
exaôement ; car le regiftre de Philippe-Aimufte Sc
autres des régnés fuivans jufqu’en 13B1, ne font pas
des recueils d’ordonnances de ces princes, mais des
regiftres de toutes les chartes- qui s*.exgédioient en
chancellerie . parmi iefquelles il le trouve quelques
ordonnances. .
Le roi.enjoignoit pourtant quelquefois par fes ordonnances
mêmes de les dépofer en original au tréfor
dts chartes., téirçoin celle de Philippe‘V t touchant la
régale du mois. d'Oftobre 1344, à la fin de laquelle
il eft dit qu’elle fera gardée f a r original au' itifor’ics
chartes Sc lettrés du ro i, ordonnances de la troifieme
race, tome V. , . , . ..
Lorlque le tréfor des chartes fut établi^dans le heu
oh il eft préfentement, on créa aufîi-tot un gardien
de ce dépôt, que l’on appelle tréforier des chartes de
France , Sc que l’on a depuis appellé tréforier-garde
des chartes <$* papiers de la couronne, ou , comme on
dit vulgairement, garde du tréfor des chartes.
Suivant des lettres de Louis XI. de 1 an 1481 , il
doit prêter ferment de cette charge en la chambré des
comptes.
En inftituant le tréforier des chartes, on lui donna
non-feulement la garde de ce dépôt, mais on le
chargea aufîi de recueillir les chartes & titres delà
couronne, de les dépofer dans le tréfor, & d en faire
de bons Sc fideles inventaires. _ ■ . .
Il nous refte encore quelques notions de ceux qui
ont exercé la charge de tréjorier des chartes.
Le plus ancien qui foit connu, eft Me. Jean de
Calais.
Depuis Etienne de Mornay qui l’etoit en 1305»
on connoit a liez exactement ceux qui ont rempli
cette charge. .
On trouve qu’en 1318, Pierre d’Eftampes ou de
Stampis étoitgarde du tréfor; mais M. Dupuy dit
qu’il y a lieu de douter fi ce Pierre d’Eftampes^&
ceux qui lui fuccéderent en cet emploi jufqu’en
1370, étoient véritablement gardes du tréfor des
charteé ; il prétend qu’ils étoient feulement gardes
des chartes de la chambre des comptes, que l’on appelle
aujourd’hui gardes des livres.^
Cependant ils ne font pas qualifiés fimplement gardes
des livres ou lettres du roi, mais gardes du tréfor de
lettres du roi ; par exemple, à la marge des lettres de
T R E
Charles, régent du royaume, pour le rétabliffemeflt
du bailliage royal de Saint-Jangon en Mâconnois ,
du mois de Décembre 13 5 9 , qui font au mémorial
D de la chambre des comptes de Paris ; fol. 1 , eft
écrit : e"0 Adam Boucherii clericus domini regis & euf-
tos thefauri litterarum regiarum, recepi in caméra compo-
torum originale hujus tranferipti per manum magijlri
Jokannis Aquil. die penult. Januarii , anno 136$.
Voyez les ordonnances de la troifieme race y tom, III,
p. 380 y aux notes. ’ . ’ .
Dans la confirmation desprivileges que le roi Jean
accorda en Janvier 13 5® » mix habitans de la ville de
Florence, il eft dit qu’il fit tirer des, regiftres de fon
pere ( Philippe VI. ) lefdites lettres de privilèges qui
font du mois de Mai 1344, Sc ces regiftres s entendent
du tréfor des chartes. Voyez les ordonnances de la
troifieme race y tom. I P • pag. 3 7 , Scia note de M. Se-
couffes , à la table des matières, au mot tréfor des
chartes. , 1 1
En 1364, Pierre Goneffe étoit garde des chartes
& des privilèges royaux dont on lui remettoit les
originaux; il donnoit des expéditions fignées de lui
des lettres- qui y étoient contenues; il eft qualifié
euftos cartarum & privilegiorum regiorum, ce qui ne
pàroît pas équivoque. Voye\ les ordonnances de la
troifieme race, tom. IP . p. 474 y 47$ & 47^* '
Il eft encore parlé du tréfor des chartes fans des lettres
de Charles V. du 14 Mars 1.367, ordonnances
de la troifieme race, tom. V.p. 100 & 103.
Les premiers gardes du tréfor des chartes ne firent
que des inventaires fi fuccints , qu’on n’en peut pref-
que point tirer d’inftruttion. Au mois de Janvier
1371 ; Charles V . ayant vifité en perfonne Ion tréfor
des chartes y Sc voyant la confufion qui y étoit, en
donna la garde à Gérard de Montaigu qu’il fit fon
notaire Sc fecrétaire tréforier Sc garde de fon tréfor
des chartes y Sc par fes lettres patentes il ordonna qu’à
l’avenir-ceux qui auroient la garde dudit tréfor y fe-
roient appelles tréforiers & fes J ecrétaires perpétuels.
Il eft parlé de ce Gérard de Montaigu en ladite
qualité à la marge des lettres de Charles V . du mois
de Septembre 13 7 1 , qui font au cinquième volume
des ordonnances de la troifieme race,/». 42S & 428.
Il fut garde du tréfor jufqu’en 1375. Dreux Bude lui
fuccéda en cette fonaion le 7 Février 1375. Le, e
Septembre 1376 le même Gérard de Montaigu etoit
garde du tréjor de la chapelle. Foye{ le recueil des ordonnances
de la troifieme race, p. 3 o , 5 6 & 218. Chopin
, de dom. lib. I II. p. 4 6 9 , dit que D reux (Draco)
& Jean Bude, aïeul Sc pere de Guillaume Bude,
furent fucceflivement gardes du tréfor des chartes,
ainfi que Guillaume Budée le remarque en fa note
fur la loi nec quicquam ff. de offic. proconful.
Pour revenir aux inventaires du tréfor des chartes,
Gérard de Montaigu en fit un , mais qui fut encore
très-fuccint, fuivant lequel il y avoit alors 310 layet-
tes'ou boëtes, 109 regiftres, Sc quelques livres de
juifs, defquels il n’eftrefté que quatre hébreux quiy
font encore. Montaigu mit à part les papiers inutiles
& plufieurs coins de monnoie, qui font à préfent
rongés de la rouille, Sc que l’on a mis en la chambre
haute. ■ ' r .
Les regiftres font feulement cottés audit inventai
re félon les tems, depuis Philippe Augufte jufqu en
1381 , tellement que pour trouver une charte dans
ces regiftres, il faut favoir le tems qu’elle a ete enregiftrée
en l’audience de la chancellerie ou plutôt
levée, parce qu’on n’en faifoit regiftrequ’aprèsquelle
avoit été délivrée.
Le 12 Septembre 1481, Jacques Louvet commença
un inventaire qui n’étoit que de 7 5 layettes, 1 -
g fon l’ancienne quote, dontil s’en trouva deflors plufieurs
de manque. ,
Suivant la commiffion qui avoit ete donnée pour,
faire cet inventaire dès Pan 1474, on voit que le tré-
’ibr fermoit à trois clés, dont l’une demeura à Jean
Bude , ancien tréforier des chartes , une audit Lou-
v et tréforier a â u e l, & la troifieme à MM. de la
chambre des comptes auxquels tout ce qui fe faifoit
ie rapporto.it par cahiers.
: Sous le roi François I. on porta au tréfor quinze
coffres appehés. les coffres des chanceliers, parce quhls
contenoient les papiers trouvés chez les chanceliers
duPrat, dû Bourg & Poyet. fceux de ce dernier furent
faifis quand on-lui fit fon procès au mois de Juin
1542, Sc enfuite mis au tréfor des chartes.
Il faut remarquer à cette occafion qu’ancienne-
nient après la mort ou .démiffion des chanceliers ou
gardes des fceaux, l’on fetiroit d’eux ou de leurs héritiers
les papiers du roi, ainfi qu’on l’a vu pratiquer
par la décharge qui fut donnée aux héritiers du chancelier
des Urfins.
- Du tems que M. de T2hou , fils du premier préfixent,
fut tréforier des chartes,M. duTillet, greffier
en chef du parlement, auteur du recueil des rois de
France Sl autres oeuvres qu’il compofa tant fur les
regiftres du parlement & fur ceux de la chambre des
comptes, .que fur le tréfor des ■ chartes, eut pour cet
effet permimon d’entrer au tréfor me me, de tranfpor-
ter ce dont il auroit befoin : ce qui fut fait avec fi peu
d’ordre, que les .titres dont i l s’étoit fervi ne furent
point remis à leur place , plufieurs ne furent point
rapportés, & demeurèrent chez lui ou fe trouvèrent
perdus. ' . . . .
Le défordre s’accrut encore par l’entrée qu’eut au
tréfor M. Briffon la première année qu’il fut avocat
du roi, lequel .emporta de ce dépôt beaucoup de bons
‘mémoire^, même les remontrances faites àl’occafion
du .con.cp.rdaL
M. Jean de la Guefle procureur général, voyant
le circuit qu’il étoit obligé de faire pour avoir quelque
titre du tréfor, qu’il fàdloit préfenter requete au
ro i, puis obtenir une lettre de cachet, fit démettre
celui qui étoit alors tréforier des chartes, & unir
.cette .charge à perpétuité à celle de procureur general
, ce qui fut fait au mois de Janvier 1582; & le
procureur général prend depuis ce tems la qualité de
tréforier-garde des chartes & papiers de la couronne, ÔC
tel eft le dernier état au moyen de quoi MM. Dupuy
& G odefroi, commis fous M. Molé , procureur général,
tréforier des chartes, firent en 1615 un inventaire
lors duquel ils trouvèrent beaucoup de titres
pourris, -partie des layettes brifées & pourries
faute d’avoir entretenu la couverture. Ils remirent
l’ordre qui y eft aujourd’hui, ayant rangé les layettes
par les douze gouvernemens , puis les affaires étrangères
, les perfônnes & les mélanges, tellement qu’ils
mirent-en état 3 50 layettes, 1 5 coffres & 52 lacs.
Pour les regiftres ils furent rangés félon l’ordre chronologique
du rçgne des rois.
L’inventaire des layettes , coffres & facs contient
huit volumes de minute. MM. Dupuy & Godefroy
n’acheverent pas celui des regiftres, ayant été occupés
à d’autres affaires.
M. Molé fit apporter au tréfor les papiers de M. de
la Guefle , procureur général ; on les mit dans des
facs étiquetés , ce qui remplit une partie d’une
grande armoire diftribuée en quarante-deux guichets.
Le roi ayant fait râfer le château de Mercurol en
Auvergne , où étoient fes-titres pour ledit pa ys, on
les a mis au tréfor des chartes dans la chambre haute 5
tnais on en a tiré peu d’utilité;
On y a auffi mis quelques papiers de M. Pithou,
des papiers concernant Metz, Tottl & Verdun, la
Lorraine ; on apporta de Nancy fix grands coffres
qui font au tréfor-. ■
. M. Dupuy dit que les miniftres ont négligé de faire
porter îe$ ùtres aM tréJçr des chartes : que pour ce
qui eft dès f-égiftres des chartes qui s*expédioierit en
la chancellerie , & pour lefquels on exige eijcore un
droit,l’on n’en a point apporté au tréfor des chartes depuis
Charles IX. qu’à l’égard des originaux, on n’y
en a point mis non plus depuis longtems, fi ce n’eft
quelques pièces fingulieres, comme le procès de la
diffolution du mariage d’Henri IV. avec la reine Marguerite.
M. de.Lomenie, fecrétaire d’état, fit remettre à
M. Molé , procureur général, les originaux dès actes
paffés pour ie mariage d’Henriette de France
avec Charles I. roi d’Angleterre , pour être dépofés’
ail tréfor. de chartes.
Le cardinal de Richelieu y fit auffi mettre grand
nombre de petits traités & attes faits par le roi avec
les princes Sc états voifins.
On y chercha le contrat de mariage de Louis XIII.
qui fe trouva enfin dans un lieu où il ne devoit pas
être.
Le garde des fceaux de Marillac fit rendre un ar*
rêt du confeiLd’état le 23 Septembre 1628, portant1
que les traités , a£tes de. p aix, mariages, alliances
Sc négociations , de quelque nature qu’elles foient,
paffées avec les princes, feigneuries Sc communautés
, tant dedans que dehors le royaume, feroient
portés au tréfor des chartes Sc ajoutés à l’inventaire
d’icelui, & il fut enjoint aux chanceliers gardes des
fceaux d’y tenir la main.
M. Dupuy dit que tout cela a encore été mal exécuté
, & que les chofes font reftées comme auparavant.
Mais par les foins de MM. Joly de Fleury pere 8t
fils, plufieurs pièces anciennes très-importantes ont
été recouvrées Sc mifes ati tréfor des chartes.
Par exemple, le regiftre 84, qui depuis très-long-'
tems étoit en déficit dans ce dépôt, s ’étant trouvé
dans la bibliothèque de M. Rouillé du Coudray ,
confeiller d’état, Sc lors de fa mort arrivée en 1729^'
ayant pafte entre les mains de M. de Fourqueux, procureur
général de la chambre des comptes de Paris
fon neveu, ce magiftrat l’a remis au tréfor des chartes,
& ce regiftre a été réuni aux autres qui font confer-
vés dans ce dépôt. Voyeqf avertijfement deM.Secouffé
qui eft au troifieme volume des ordonnances de la
troifieme race, p. 673.
Pour ce qui eft des pièces modernes , il y a plus
de cent ans que l’on n’en n’a mis aucune au tréfor des
chartes ; on en a d’abord mis quelques-unes aux ar^
chives du louvre, enfuite on a mis toutes celles qui
font furvenues dans le dépôt des manuferits de la bibliothèque
du roi, où il y a déjà plus de pièces qu’au
tréfor des chartes.
Il y a préfentement plufieurs commiffaires au tre*
for des chartes qui font nommés parle roi, & qui fous
l’infpeâion de M. le procureur général, travaillent
aux inventaires Sc dépoüiüemens des pièces qui font
dans ce dépôt, dont on fait différentes tables & extraits,
non-feulement par ordre des matières, mais
auffi des tables particulières des noms de lieu , des
noms des perfonnes, Sc fingulierement de ceux des
grands officiers de la couronne, dés titres qui étoient
alors ufités, des noms des monnoies,& autres objets
femblables qui méritent d’être remarqués.
On travaille auffi à une table générale dès regiftres
Sc à une autre de toutes les pièces originales qui
font au tréfor ; on fe propofe même de faire une table
générale de toutes les chartes du royaume qui fè trou*
vent difperfées dans différens dépôts, depuis le commencement
de la monarchie jufqu’en 1560, tems
depuis lequel les a&es qui ont fuivi, ont été recueillis
avec plus de foin dans différentes collerions.
Il feroit à fouhaiter que le public pût profiter bientôt
de ce travail immenfe, dans -lequel on puiferoit
fans -doute .une infinité de connoiflances curieufes ôc
utiles. ( A )