
pour avoir-monté àl’affaut ; navale, chargée de proues
& de pouppes de vaiffeaux, pour avoir vaincu fur
mer ; obfidionalc ou gr animale, de la première herbe
qu’on trouvoit, & que les Latins appelloient gramen,
pour avoir fait lever le liege ; civique, de chêne
, pour avoir ôté des mains de l’ennemi un citoyen
romain ; ovante, de myrthe, qui marque l’Ovation
ou petit triomphe ; & triomphale, de laurier, pour
le grand triomphe. Procope rapporte qu’il fut élevé
dans la place appellée Aûgufloeum, devant le palais
impérial de Conftantinople, une colonne de cette
forte, qui portoit la ftatue équeftre de bronze de
l’empereur Juftinien. (D. J .)
T riomphale, pierre, (Littéral.) c’étoit une coutume
afl’ez ordinaire chez les anciens, de faire graver
fur la pierre des faits hiftoriques, êc de confacrer
aux dieux ces monumens, pour en conferver la mé-
moirè à la poftérité. Telles étoient les pierres nommées
triomphales, où les noms de ceux qui avoient
mérité l’honneur dn triomphe, étoient marqués. On
en ufoit de même dans- les dangers preffans, & dans
les maladies fâcheufes, fi l’on avoit éprôuvé le fe-
cours des dieux; on gravoit alors fur le marbre ou
fur la pierre, le bienfait qu’On avoit reçu, pour fer-
vir de témoignage d’une reconnoiffance éternelle.
(O . J.) ■ ■ ■ ■
TRIOMPHATEUR anc.)cddi à qui
l’on a accordé les honneurs du triomphe.
TRIOMPHAUX, Jeux , ( Antiq. ron/.) on nom-
moitjeux triomphaux, ceux qu’on reprél'entoit à l’oc-
cafion de quelque triomphe.Foyer T riomphe. WBê H , I TRIOMPHE, ( Hiß. rom.) cérémonie & honneur
extraordinaire accordé par le fénat de Rome
& quelquefois par le peuple, pour récompenfer un
général qui par fes aérions & fesvi&oires avoit bien
mérité de la patrie. ,
Romulus & fes fucceffeurs furent prefque toujours
en guerre avec leurs voifins, pour avoir des citoyens,
des femmes & des terres. Ils revenoient dans la ville
avec les dépouilles des peuples vaincus •: c’étoient
des- gerbes de blé & des troupeaux, objets d’une
grande joie. Voilà l’origine des triomphes qui furent
dans la fuite la principale càufe d’es grandeurs où
parvint la ville de Rome; '
Le mot triomphé tire fon origine de SpU/bißcc, qui
eft un des noms de Bacchus conquérant des Indes.
Il fut le premier qui dans la Grece, félon l’opinion
commune, inftitua cette réception magnifique qu’on
faifoit à ceux qui avoient remporté de grands avantages
fur les ennemis. Les acclamations du foldat &
du peuple qui crioient après le vainqueur ; io triam-
p h e, ont donné naiffance au mot triumphus , &c
étoient imitées du io triambe Bacche, qu’on chantoit
au triomphe de Bacchus.
Tant que l’ancienne difeipline de la république
fubfifta , aucun général ne pouvoir prétendre au
triomphe, qu’il n’eût éloigné les limités de Tempire
par fes conquêtes , & qu’il n’eût tué au-moins cinq
mille ennemis dans une bataille, fans aucune perte
confidérable de fes propres foldats;cela étoit expref-
fément porté par une ancienne lo i, en confirmation
de laquelle il fut encore, établi par une fécondé
ordonnance qui décernoit une peine contre tout
général qui prétendroit au triomphe, de donner une
lifte fauffe du nombre des morts, tant dans l’armée
-ennemie, que dans la fienne propre.
* Cette même loi les obligeoit avant que d’entrer
élans Rome, de prêter ferment devant les quefteurs,
-que les liftes qu’ilsavoient envoyées au fénat, étoient
véritables. Mais ces lois furent long-tems négligées,
& traitées de vieillerie , & comme hors d’ufage.
Alors l’honneur du triomphe fut accordé à l’intrigue
à la faftion de tout général de quelque crédit qui
avoit obtenu quelque petit avantage contre des pirates
ou des bandits, ou qui avoient repouffé les
incurfions de quelques barbares fauvages , qui s?é-
toient jettes fur les provinces éloignées de l ’empire.
Ç’étoit une loi dans la république de Rome qu’un
général victorieux &, qui demandoit le triomphe ne
devoit point entrer dans la ville avant que de l’avoir
obtenu.
Il falloit encore, pour obtenir le triomphe, que le
général eût les aufpices, c’eft-à-dire, qu’il fut revêtu
d’une charge qui donnoit droit d’aufpices; & il falloit
aufii que la guerre fût légitime & étrangère. On
ne triotnphoit jamais lorfqu’il s’agifioit d’une guerre
civile.
Le général qui avoit battu les ennemis dans un
combat naval, avoit les honneurs du triomphe naval.
Ce fut C.Duilliusqui les eut le premier l’an 449,
après avoir défait les Carthaginois : car c’eft -à-peu-
près dans ce tems-là que les Romains mirent une
flotte en mer pour la première fois L’honneur que
L’on fit à Duillius fut d’élever à fa gloire une colonne
roftrale, roftrata, parce qu’on y avoit attaché les
proues des vaiffeaux : on en voit encore aujourd’hui
une inferiptio* dans le capitole.
Comme pour triompher, il falloit être général en
chef, lorfqu’il n’y eut plus d’autre général ou chef
que l’empereur, les triomphes lui dévoient être réfer
vés. Cependant, comme le dit très-bien M. l’abbé
de la Bletterie, Augufte en habile politique, accoutumé
à tout atttendre 6c à tout obtenir du tems ne
fe hâta point de tirer cette conféquence. Au contraire
il prodigua d’abord le triomphe, & le fit décerner
à plus de trente perfonnes. Mais enfin l’an de
Rome 740 Agrippa,doit par modeftie, foit pour entrer
dans les vues d’Augufte, qu’il féconda toujours
d’aufli bonne foi que s’il eût approuvé la nouvelle
forme de gouvernement; Agrippa, d is - je , ayant
remis fur le trône Polémon , roi de la Cherfonnèfe
taurique , n’écrivit point au fénat. , & refufa le
triomphe.
. L’exemple d’Agrippa, gendre d’Augufte, & fon
collègue dans ,1a puiffance tribunitienne , eut force
de loi : on.fentit que l’on faifoit fa cour au prince
en s’excluant foi-même de cet honneur ; & les bonnes
grâces d’Augufte valoient mieux que les triomphes.
Ceux qui cômmandoient les troupes, quelques
vidoires qu’ils euffént remportées, n’adrefferent plus
de lettres ail fénat, & parrlà fans exclufion formelle,
le triomphe devint un privilège des empereurs &
des princes de la maifon impériale. -.
En privant les particuliers de la pompe du triomphe
, on continua de leur, accorder les diftin&ions
qui de tout tems en avoient été la fuite ; c’eft-à-dire,
le droit de porter la robe triomphale à certains jours
&c dans certaines cérémonies, une . ftatue qui les re-
préfentoit avec cet habillement, & couronnés de lauriers,
enfin quelques autres prérogatives moins connues
qui font renfermées dans ces paroles de Tacite:
E t quidquid /vo triumpho datur. .
Augufte, pour faire valoir & pour ennoblir cette
efpece de dédommagement dont il étoit inventeur,
voulut que Tibere, quoique devenu fon gendre apres
la mort d’Agrippa,fe contentât des ornemens triomphaux
, au-lieu du triomphe que le fénat lui avoit décerné
: ce ne fut que long-tems depuis, & pour d’autres
vi&oires, qu’il lui permit de triompher.
Le dernier des citoyens qui foit entré, dans Rome
en triomphe, eft Cornélius Balbus, procoriful d’Afrique
, neveu de ce Cornélius Balbus connu dans l’hi-
ftoire par fes liaifons avec Pompée, -Cicéron &
Jules-Céfar. Balbüs, le neveu, triompha l’an de
Rome 735, pour avoir vaincu les Garamantes, chez
qui les armes romaines n’avoient point encore pénétré.
Deux fmgularités çar&érifent fon triomphe, :
1°. BalbüS eft le feul, qui, n’ étant citoyéft romain
que par grâce, & n’ayant pas même l’avantage d’être
né dans l’Italie, ait obtenu le plus grand honneur au*
quel un romain ait pu alpirer. i° . Nul particulier
n’eut cet honneur depuis le jeune Balbus. On né
fauroit alléguer férieufement contre cette propofi*
tion l’exemple de Bélifaire qui triompha fix cens
ans après à Conftantinople fous le régné de Juftinien.
Il arrivoit quelquefois, que, fi le fénat refufoit
d’accorder le triomphe, à caufe du défaut de quelque
condition néceffaire , alors le général triomphoit fur
le mont Albain. Papirius Mafia fut le premier qui
triompha de cette maniéré l’an 521 de Rome.
Lorfque les avantages qu’on avoit remportés fur
l’ennemi ne méritoient pas le grand triomphe, on ac-
cordoit au général le petit triomphe, nommé ovation.*
celui qui triomphoit ainfi, marchoit à pié ou à cheval
, étoit couronné de myrthe, & immoloit une
brebis.dl n’étoit pas même néceffaire d’être général
d’armée, & d’avoir remporté quelque viftoire pour
obtenir ce triomphe ; on le décernoit quelquefois à
ceux qui n’étant chargés d’aucune magiftrature ni
d’aucun commandement en chef, rendoient à l’état
des fer-vices fignalés.
Aufii trouvons-nous qu’un particulier obtint cet
honneur l’an de Rome 800, quarante-feptieme de
Jefus-Chrift, plus de cinquante ans depuis l’établif-
fement de la monarchie ; je parle d’Aulus Plantius
qui fous les aufpices de Claude,avoit réduit en province
la partie méridionale de la grande-Bretagne.
L’empereur lui fit décerner le petit triomphe, alla
même au-devant de lui le jour qu’il entra dans:
Rome, l’accompagna pendant la cérémonie, & lui
donna toujours la main. Aulo PLantio etiam oratio-
nem decrevit, ingrejjoque urbem obviant progréjfïïs, 6*
in capitolium eunti, & indè rurfùs revertenti latus texit,
dit Suétone. L’hiftoire ne fait mention d’aucune ovation
qui foit poftérieure à celle de Plantius.
Au refte, peu de perfonnes étoient curieufes d’obtenir
ce triomphe, tandis que le grand triomphe étoit
l’objet le plus flatteur de l’anïbition dé tous les Romains.
Comme on jiigeoit de la gloire d’un général
par la quantité de l’or & de l’argent qu’on portoit
à ion triomphe il ne laiffoit rien à l’ennemi vaincu.Ro-
me s’enrichiffoit perpétuellement, & chaque guerre
la mettoit en état d’en entreprendre une autre.
Lorfque le jour deftiné pour le triomphe étoit arrivé,
le général revêtu d’une robe triomphale, ayant
une couronne de laurier fur la tête, monté fur un
char magnifique attelé de quatre chevaux blancs,
étoit conduit en pompe au capitole, à-travers la ville.
Il étoit précédé d’une foule immenfe de citoyens
tous habillé's de blanc. On portoit devant lui les dépouilles
des ennemis, & des tableaux des villes qu’il
avoit prifes & des provinces qu’il avoit fubjliguées.
Devant fon char marchoient les rois & les chefs ennemis
qu’il avoit vaincus & faits prifonniers.
Le triomphateur montoit au capitole par la rue
facrée. Lorfqu’il étoit arrivé, il ordonnoit qu’on renfermât
fes prifonniers, & quelquefois qu’on en'fît
mourir plufieurs. A la fuite de ces prifonniers, étoient
les vi&imes qu’on devoit immoler. Ceux qui Envoient
le triomphateur de plus près, étoient fes pa~
rens & fes alliés. Enfuite marchoit l’armée avec
toutes les marques d’honneur que chaque militaire
avoit obtenues du général. Les foldats couronnés >de
lauriers, crioient, io triumphe, qui étoit un cri de
joie; ils chantoient aufii des vers libres, & fou-
vent fort fatyriques contre le général même.
On trouve dans les anciennes bacchanales qttel-.
ques tracés de cètte licence. Elle regnoit dans les fa-
turnales,dans les fêtes appellées matronales, & prefque
dans tous les jeqx. Ceux du cirque en particulier
a voient leurs pîaifans dans la marche folemnelie qui
fe faifoit depuis le capitole. Denis d’Halicarnaffe dit
que . cette coutume bifarre rie venoit ni des Ombriens
ni des Lucaniens ni des anciens peuples d’Ita^
lie , & que c’étoit une pure invention des Grecs
qu’il compare à l’ancienne comédie d’Athènes-.
Quelle que foit l’origirie de cet ufage, il ëft certain
qu il avoit lieu dans les triomphes , comme on le voit
parle récit des l’hiftoriens. Tite-Live ,/. X X X IX i
parlant du triomphe de Cn. Manlius V olfo, qui avoit
dompté les Gaulois d’Afie, dit que les foldats firent
comprendre par leurs chanfons, que ce général n’en,
étoit point aimé. Pline, liv. X IX . c. viij. obferve
que les foldats reprochèrent à Jules-Céfar fon avarice
pendant la pompe d’un de fes triomphes , difant
■ hautement qu’il ne les avoit nourris que de légumes
fiuiVages, & lorfque ce même diâateur eut réduit les
Gaules, parmi toutes les chanfons qui fe firent con->
tre lui, pendant la marche du triomphe, il n’y en eut
point de plus piquante quécelle où on lui reprochoit
fon commerce avec Nicotnede, roi de Bithynie. G allias
Ccejar fubegit, Nicomedes Coefarem. Ecce Coefat
nunc triumphat qui fubegit G allias. Nicomedes non triuiii*
phat, qui fubegit Coefarêrii. On ne l’épargna pas non
plus fur toutes fes autres galanteries, & c’étoit tout
dire , que de crier devant lui; Urbani, feivate uxores,
moechum calvum adducimus. Suétone & Didon Caf-
fins, liv. X L I I l. nous rapportent tous ces détails.
LorfqU’il tt’y avoit point de prife du côté des vertus
, on fe rabattoit fur la naiffance, ou fur quelqu’au-*
tfe défaut. Nous en avons un exemple remarquable
dans le triomphe de Veritiditis Baffus, homme de baffe
extraftiort, mais que Céfar avoit élevé à la dignité
de pontife & de conful. Ce général triomphant des
Parthes, félon le rapport d’Aulu-Gelle, /. I. c. iv.
On Chanta pendant la marche cette chanfon : teneur-*
rite omhes augures, arufpices , Portentum inujîtatum
conflatüm ejl recens : millos qui fric abat confulfac-*
tus eft; ,
Velîenis Patercuîus ,. raconte que Lépide ayànt
proferiffon frere Paulus, ceux qui fuivoient le chat
de triomphe, mêlèrent parmi leurs fatyres ce bon mot;
qui tombe fur une équivoque de la langue latine : de
Germants, non de Gallis triumphant duo confules. Mar*
t ia l, /. /. épigr. 4. après avoir prié Domitiert de fe
dépouiller, pour lire fes ouvrages, de cette gravité
qui féyoit à un empereur, ajoute que les triomphes
même fouffrent les je u x , & que le Vainqueur ne
rougit pas de fervir de matière aux railleries : '
Confuevere joeôs Vefri quoque ferre triumphi ,
Matenam diclis nec pudet ejfte ducem.
Enfin ; pour que le triomphateur ne sVnôtgueillîc
pas de la pompe de fon triomphe, on faifoit monter fui*
le même char un efclave prépofépouf le faire foüvenic
de la condition humaine, fi fujette aux caprices de la
foftune. il avoit ordre de lui repeter de tems-en-femS
Ces paroles., refpicè "poli te ; hominém mémento te ;
cet efclave eft nommé- ingénieufement par Pline
carnifcx glorice, le bourreau de la gloire. Derrière le
char pendoient un fouet & une fonnette.
Ce qu’il y a de plus étrange, c’eft que dans ce même
jour où le triomphateur étoit revêtu fté l’autorité
fouvetaine, il y avoit tçl cas où les tribuns du peu-,
pie pouvoient le renvérfer de fon char, & le faire
conduire en prifon.
Vàlérè Maxime nous rapporte que la faérion de
ces inagiftrats plébéiens ayant formé cette entreprifé
violente contre Claudius > dans la marche de font
triomphé, fa fille Claudia, .qui étoit une des veftales*
voyant qu’un des tribuns avoit déjà la main fur fon
perea,fe jetta avec précipitation dans le char, 6c fe