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avec cette inquiétude qu’ils marquent à l’approche
des grands orages : on entend iouvent des bruits
Semblables à ceux d’un tonnerre fouterrein, ou d’une
forte décharge d’artillerie ; ou l’on entend des déchi-
remens & des fifflemens violens ; en plufieurs endroits
les fources & les rivières fufpendent le cours
de leurs eaux, au bout de quelques tems elles recommencent
à couler , mais elles font troubles'&
mêlées de parties terreufes , de fable , & de matières
étrangères qui changent leur couleur (te leur qualité.
Les trtmbUmtns de terre font prefque toujours accompagnés
d’agitations violentes dans les eaux de la
mer, elle eft portée avec impétuoiité fur. fes bords,
les vaiffeaux s’entrechoquent dans les ports , &
ceux qui font en plaine mer ont fouvent éprouvé
des mouvemens extraordinaires, caufés par le foule-
vement du fond du lit de la mer ; ces effets font dus
aux efforts que l’air dilaté par le feu, fait pour s’ouvrir
un paflage & fe mettre en liberté ; les fecouffes
que caülent ces tremblemens fe fuccedent,'tantôt à de
grandes diftances les unes des autres , tantôt elles fe
fuivent très-promptement ; le mouvement qu’elles
inpriment à la terre eft tantôt une efpece d’ondulation
femblable à celle des vagues , tantôt on éprouve
un balancement femblable à celui d’un vaiffeau
battu par les flots de la mer ; de-là viennent ces nau-
fées.& ces maux de coeurs que quelques perfonnes
éprouvent dans quelques tremblemens de terre, fur-tout
lorfque les fecouffes font lentes & foibles :,ces fecouf-
Tes fuivent ordinairement une diredion marquée ;
de-là vient que quelquefois un tremblement de terre
renverfera des édifices & des murailles qui ne feront
point bâtis fuivant la dire&ion qu’il obferve,. (te détruira
totalement ceux qui fe trouveront dans une
direction oppofée ; les fecouffes font plus ou moins
fréquentes & fortes, fuivant que les matières qui les
excitent font plus ou moins abondantes , & fuivant
que leurs explofions feront plus ou moins vives: on
a vu en Amérique des tremblemens de terre durer pendant
plus d’une année entière, (te faire fentir chaque
jour plufieurs fecouffes très-violentes. En un mot rien
de plus terrible & déplus varié quel es effets que pro-
duilent les tremblemens de terre ; tantôt la mer fe retirera
de.plufieurs lieues & laiffera les vaiffeaux à fec,
pour revenir enfuite fubmerger les terres avec vio- ;
leiice ; quelquefois des terreins très-confidérables
changeront de place, couleront comme de l’eau, (te
iront remplir des lacs ; d’autres fois des montagnes
s’affaifferont, & des lacs viendront prendre leur place
; fouvent on a vu la terre s’entrouvrir & vomir
de fon fein des flammes , du fable calciné , des pierres,
des eaux fulphureufes & d’une odeur infupporta-
ble ; ces ouvertures qui fe font faites à la terre , fe
referment quelquefois fur le champ, d’autres fois elles
reftent au même état.
Un des phénomènes les plus étranges des tremblemens
de terre , c’eft leur propagation , c’eft-à-dire la
maniéré dont ils fe communiquent à des diftances
fouvent prodigieufes , en une efpace de tems très-
court ; la façon la plus naturelle d’expliquer cette
propagation, c’eft de dire que les embrafémens fou-
terreins fe communiquent par les cavités immenfes
dont l’intérieur de la terre eft rempli ; ces cavités
étant pleines des mêmes matières reçoivent le feu qui
leur, eft apporté de celles qui ont été les premières
allumées ; de cette manière l’embrafement fe tranf-
.metl.qiielquetois d’un des côtés du globe à l’autre.
L ’ofi peut encore fuppofer que la terre renferme plu-
'fleurs foyers, qui s’allument , foit fuccefliv.ement,
'foit enipeme tems, & qui produifent une fuite d’ex-
jjlôïipns) &c .d’ébranlemens dans les différentes parties
de la terre qu’ils occupent ; on a remarqué que
c’eft communément en fuivant la dire&ion des grandes
chaînes de montagnes , que la propagation des
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tremblemens de terre fe fait fentir ; ce qui donne lieu,
de préfumer que ces montagnes ont a leur bafe des
cavités par leiquelles elles communiquent les unes
aux autres.
L’on a fouvent confondu avec des tremblemens de
terre, certains mouvemens extraordinaires qui fe font
fentir quelquefois dans l’air , (te qui fouvent font af-
fez forts pour renverfer des maifons, & faire des ravages
confidérables , fans qu’on s’apperçût que la
terre fût aucunement ébranlée ; ces phénomènes ont
été obfervés fur-tout en Sicile (te dans le royaume
de Naples ; ils paroiffent dus à un dégagement fubit
de l’air renfermé dans le fein de la terre', qui eft mis
en liberté parles feux fouterreins, & qui excite dans
l’air extérieur une commotion femblable à celle d’un
coup de canon , qui caffe fouvent les vitres des mai-
fons^
‘Telles font les, circonftances principales qui accompagnent
les tremblemens de terre ; il n’eft guere
départies fur notre globe qui n’aient éprouvé plus ou
moins vivement, 8c en différens tems , leurs effets
funeftes ; & les hiftoires font remplies de deferip-
tions effrayantes , &. des révolutions tragiques qu’ils
ont produits. Pline nous apprend que fous le confu-
lat de L. Marcius , & de Sextus Julius , \\n tremblement
de terre fit que deux montagnes du territoire de
Modène fe heurtèrent vivement l’une l’autre * &
écraferent dans leur conflit les édifices 8c les fermes
qui fe trouvèrent entre elles ; fpecïacle dontun grand
nombre de chevaliers romains & de voyageurs furent
témoins. Voici fes propres paroles : factum eft
femel, dit-il , quod equidem in Hetrufca diJ'cipUnoe vo-
luminibus inveni , ingens ttrrarnm portentum. L. Marcio
& Sexto Julio cofr inagro mutinenji montes duo inter
fe concurrerunt , crépi tu maximo ajfultantes , recèdent
ef que , inter eos flammafumoque in coelurn exeunte
interdite ffpeclante e via E milia magna equitum roma-
noriim familiariumque & vlatorum miiltitudine : eo con-
curfu villa omnes Eûfe , animalia permulta , qua 'ultra
fuerant, exanimatd funt, &c.
Sous l’empire de Tibere, treize ville confidérables
de l’Afie furent totalement renverfées, & un peuple
innombrable fut enfeveli fous leurs ruines.La célébré
ville d’Antioche éprouva le m'ême fort en l’an 1 1 5 ,
le conful Pedon y périt, & l’empereur Trajan qui
s’y trouvoit alors , nefe fauvaqu’à peine dudéfaftre
de cette ville fameùfe.
En 7 4 1 , il y eut un tremblement de terre univerfel
en Egypte & dans tout l’Orient ; en une même nuit
près de fix cent villes furent renverfées , & une
quantité prodigieufe d’hommes périt dans cette oc-
cafion.
Mais qu’ eft-il befoin de parler des tremblemens de
terre anciens ? une expérience récente ne nous prouve
^que trop que les matières qui produifent cesévéne-
mens terribles, ne font point encore épuifées : l’Europe
eft à peine revenue de la frayeur que luiacaufée
l’affreufe cataftrophe de la capitale du Portugal. Le
premier de Novembre de l’année 1755 , la ville de
Lisbonne fut prefque totalement renverfée par un
tremblement de terre , qui fe fit fentir lé même jour juf-
qu’aux extrémités de l’Europe. Ce défaftre affreux
rat accompagné d’un foulevement prodigieux des
eaux de la m er, qui furent portées avec violence fur
toutes les côtes occidentales de notre continent. Les
eaux duTage s’élevèrent à plufieurs repçffes pour
inonder les édifices que les fecouffes avoient ren-
verfés. Au même inftant auquel cette fcène effroyable
fe paffoit dans le Portugal, l’Afrique étoit pareillement
ébranlée , les villes de Fez & deMequinez,
au royaume de Maroc , éprouvèrent un renverfe-
-ment prefque total. Plufieurs vaiffeaux, en revenant
des Indes occidentales, reffentirent en plaine mer
des fecouffes violentes & extraordinaires. Les îles
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Açorësforèrit en même;fërris vivement agitées. Au
mois de Décembre de la thème année i;pféfquè toute
l’Europe fut encore ébranlée de nouveàu par un j
tremblement de terre, qui s’èftfait fentir très-vivement1
dkhs quelques-unes de. fès' parties.• L’Amérique ne
fut point exempte de ces triftes ravages , ee-fu-t vers :
cë même tems que la ville" de Quito fut entièrement
renverfée. l!'-
; Tons les tremblemens de lerre ne fe font point fentir
avec la même violence ; il y en a qui ne prdduifeht
qiie des fecouffes légères,1 quelquefois infëhfibles.;-:
d’autres portent la deftniftiqn dans''lés endroits ôii .
ils exercent leur fureur^ Gn a remarqué1 que quél- •
ques pays font plus fujets à ces eonv'ùlfibns de la
térre que d’autres ; lés pays xhauds ÿ paroiffent fur-
tout les plus expofés, ce qui viént;,' foit de ce que là
chaleur du climat eft en état dé faire fortir du fein
de la terre un plus grand nombre de vapeiifs propr'es :
à’S’enflammer & à faire déS explofionS 7,-foit'’.'de Cè";
que ces pays contiennent un plus grand nombre de
matières combuftibles , & propres à'alimehter & à
propager les feux fouterreins. L’Amérique & fur-tout
lé Pérou paroiffent être fujets à des agitations : très-
fréquentes. Suivant le chevalier Hanfloanej on s’attend
à efluyer tous les ans un tremblement de terre à la
Jamaïque. L’Afie & l’Afrique né font point exemptes
de ces terribles aceidens. En Europe, la- Sicile , le
royaume de Naples , & prefque toute la Méditerranée
font trés-fréquemment les théâtres de ces fatals.
evénemens. Nous voyons aufli que les pays du nord,
quoique moins fouvent que les pays chauds, ont
éprouvé en différens tems des 'fecouffes de la part
des tremblemens de terre ^ l’Angleterre , l’Iftaride, la .
Norvège nous en fourniffent des preuves convaincantes
; M. Gmelin nous apprend en av.oir reffenti
dansjla Sibérie , on lui a même aflftré qu’une partie
de cette contrée fi feptentrionale éprouvoit un tremblement
de terre annuel & périodique. Les provinces
méridionales de la France, qui font bornées par les
monts Pyrénées, ont aufli reffenti quelquefois des
fecouffes très-violentes : en 1660, tout le pays compris
entre Bordeaux & Narbonne fut défolé par un
tremblement de terre ; entr’autres ravages , il fit difpa-'
roître une montagne du Bigore , & mit un lac en fa
place ; par cet événement, un grand nombre de
foûrces d’eau chaudes furent refroidies, & perdirent
leurs qualités falutaires. Dans les derniers tremblemens
de l’année 1755 , c ’eft aufli cette partie de la
France qui a éprouvé le plus fortement des fecouffes
qui ne fe font fait fentir que très-foiblement à Paris,
éc dans les provinceis plus Septentrionales.
A la vue des effets prodigieux des tremblemens de
terre, on fent qu’il eft naturel de les regarder comme
la principale caufe des changemens continuels qui arrivent
à notre globe. L’hiftoire nous a tranfmis quelques
unes des révolutions que la terre a éprouvées de
la part des feux fouterreins, mais le plus grand nombre
& les plus confidérables d’entre elles font enfe-
velies dans la nuit de l’antiquité la plus reculée ; nous
ne pouvons donc en parler que par des conjectures
qui paroiffent pourtant affez bien fondées. C’eft ainfi
qu’il y a tout lieu de préfumer que la grande Bretagne
a été arrachée du continent de l’Europe, la Sicile
a été pareillement féparée du refte de l’Italie.
Seroi t-ce un fentiment fi hafardé que de regarder la
mer Méditerranée comme un vafte baflin creufé par
les feux fouterreins , qui y exercent encore fi fouvent
leurs ravages ? Platon & quelques autres anciens
nous ont tranfmis le nom d’une île immenfe ,
qu’ils appelloient Atlantide, que la tradition de leur
tems plaçoit entre l’Afrique & l’Amérique ; cette
vafte contrée a entièrement difparu : ne peut - on
pas conjeClurer qu’elle a été abîmée fous les eaux de
l.Ocçan , à qui elle a donné fon nom 3 ôc que i,es îles
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• clu'Gap-verd , les Canpnts, les A'çôfcs rie font que
; des vertiges infortunes <if'la terrible iéyâuiion qui
j a fait dilparoîtré cette contrée • de 'ïlcflus la fdee dé
I la terre ?' Peut-être Ià m erNdife, la nier Càftienne,
i la mer Baltique, &c, flëfont-élles dues qu’l 1 dès ré-
! volutions pareilles , arrivées dans tics tems'dont aucun
monument hiftofiqUèjte nous a'pti cùnférver le
1 foüveriir. •'
: ; hJeptiis lè Pérou jûfqu’aii Japon, déplus i’Iflancîe
: jusqu’aux Moiuqties rioû^Voyons que lés entrailles
\ de la terre font pL!rpéhlelIcment déchirées‘par des
embrafémens qui' agiffént fans celle avec' plus on
j moins de violence ; des caùfes fi püiéntes n e peu-
■ vent? manquer de produire des effets qui influent fut
j la màffe totale de notre globe ; ils dôiveriYa la, lon-
■ gué changer fon centre dè gravité, mettre t ’fec quel-
! qûes-unes de fes ■ parties pour en fubmerVèï d’aütres,
j enfin contribuer à fairer parcourir à-lâ nàtiifè ie cer-
; de- de fes révolutions. Eft-il furprenant après,' cela
j que le voyageur étonné ne retrouve plus des mers ,
; des lacs , dès rivières , des villes fameufês'decrites
dans les anciens géographes, & dont aujourd’hui il
| ne refte plus aucune 'trace ? Comment la fureur des
; élémens eût-elle'rèfpêdé;ies ouvrages'tôiiraùrs’. fo^
i blés‘de la main dés‘hommes , ^ "tan'di^quHïïè^branle
l & détruit la bafe, folide qui leur fert d’appui/ (—)
T remblement , (Médecine.) un mouvement alternatif,
involontaire, lâche, & défofdôhné dans un
de nos organes particuliers j ou dans plufieurs enfem-
blé s’appelle trèmbUnrehï.- ' • ■ -
• Cette maladie'qui confifte dans une violente agi-
j tation des membres en dir.eCHons contraires;, éft due
' au manque de ton, & aux efforts des parties attaquées
pour reprendre ce ton; ;
Les Médecins diftïrfguërit deux eljjeces dé tremblemens
, qu’ils nomment trèniÜlemenïzÙiî8t tremblement
pâfiif.- Le tremblement- ad if eft celui qui arrivé'dans
les violentes paflions', telles que la terreur, la co?
lere, la, joie fubit e , &c. l’ôn doit rapporter cet état
à des mouvemens demi-çonvulfifs. Lé tremblement
paflif eft du à' une caufe particulière y & approche
des affeCtions demi-paralytiques ; maïs Xts tremblemens
paflîfs çonfiderés comme maladie , doivent être
diftingués de ceux qui font produits par dès caufes
accidentelles, telles qu’eft le tremblement qüîfücced’e
au bain dans? une eau très-froide.
Caufes. Les caufes internes des tremblemens paflîfs
çonfiderés comme maladie , font là'flaccidité des
nerfs , le relâchement du ton des parties , le manque
ou le cours déréglé des efprits animaux les caufes
externes & accidentelles font en grand nombre ,
comme l’omilfion des évacuations accoutumées, les
trop grandes évacuations , les longues .maladies qui
ont précédé, l’abus des liqueurs fpirituéufës, lés humeurs
cacochimiques & mélancoliques., les trop
grandes veilles, la débauche du vin éc dès femmes,
les exhalaifons minérales dans ceux qui travaillent
aux mines, &c.
Prognoftiques. Le tremblement de naiffance ou de
vieilleffe eft inguériffable ; en général, plus le tremblement
eft confirmé par le tems , & moins aifément
peut-on y remédier. Le tremblement qui vient du travail
des mines de mercure admet rarement des re-
medes, & fait craindre qu’il ne dégénéré en pa'ra-
lyfie. Le tremblement qui vient de lui-même dans les
femmes groffes , annonce d’ordinaire l’avortement
ou l’accouchement prochain ; celui qui fuccede à
l’accoucheirçent (te qui eft caufé par la fuppreflîon des
vuidanges eft très-dangeréux , & ôccafionne quelquefois
l’épilepfie.
Méthode curative. L’abus des veilles, celui des plai-
firs de l’amour, les trop grandes évacuations du fang
& des humeurs, & la diete pouffée trop loin , font
autant de chofes qui épitifent les efprits ôc qui pro