bloient encore pour les jugemcns qui avoicnf donné
lieu à l’établiffement de leurs comices & qui pro-
cédoient, o\i des ajoùrnemens que les tribus dccer-
noicnt contre les particuliers, ou de la liberté que
les particuliers avoient d’appeller au peuple de tous
les magiftrats ordinaires : le peuple jouiffoit de ce
droit dès le tems des rois, 8c il lui tut depuis fous les
confuls confirmé par trois différentes fo is , & toujours
par la même tamille, c’eft-à-dire par les troislois
Valeria ; la première, de'l’an 146 ; la fécondé, de l’an
304 ; & la derniere, de l’an 412.
Il faut néanmoins remarquer qu’il n’y avoit que
les centuries qui euffent droit de juger à mort, &
que les tribus ne pouvoient condamner au plus qu’à
l’exil; mais cela n’empêchoit pas que leurs comices
ne fufîent redoutables au fénat; premierement, parce
qu’ils fe tenoient fans fon autorité ; fecondement,
parce que les patriciens n’y avoient point de part ;
& troifiemement, parce qu’ils n’étoient point fujets
aux aufpices ; car c’étoit-là d’oîi ils tiroient tout leur
pouvoir, & ce qui fervoit en même tems à les diftin-
guer des autres.
Çe$ comices, au refie, continuèrent de fe tenir
toujours régulièrement depuis leur inftitution , fi on
en excepte les deux années que le gouvernement fut
entre les mains des décemvirs ; & quoique Sylla eût
entrepris dans les derniers tems d’en diminuer l’autorité
, en ôtant aux tribuns du peuple le pouvoir de
publier des. lois , pour les punir d’avoir favorife le
parti de Marius ; comme cette fufpenfion de la puif-
fance tribunicienne n’empêcha pas les tribus■ de s af-
fembler à l’ordinaire, & ne dura même que jufqu’au
confulat de Pompée , les comices des tribus confer-
verent toute leur liberté jufqu’au tems des empereurs
; mais Céfar ne fut pas plutôt di&ateur qu’il
s’empara d’une partie de leurs droits , afin de pouvoir
difpofer des charges , & d’être plus en état de
changer la forme du gouvernement. L’hiftoire nous
apprend à la vérité qu’Augufie les •rétablit dans tous
leurs droits dès qu’il fut parvenu à l’empire , mais il
eft certain qu’ils ne s’en fervirent plus que pour prévenir
fes ordres ou pour les exécuter, & qu’enfin
Tibere les fupprima entièrement, & en attribua
toute l’autorité au fénat, c’eft-à-dire à lui-même.
Depuis ce tems, les tribus n’eurent plus de part
au gouvernement, & le deffein qu’eut Caligula de
rétablir leurs comices n’eut point d’exécution; mais
elles ne laiflerent pas néanmoins de fubfifter jusqu’aux
derniers tems de l’empire, & nous voyons
même que leur territoire fut encore augmenté fous
Trajan de quelques terres publiques par une fufcrip-
tion qu’elles firent élever en fon honneur, & qu’on
bous a confervée comme un monument de leur re-
connoiffance envers ce prince.
Telle eft l’idée générale qu’on peut fe former fur
l ’origine des tribus romaines , l’ordre de leurs éta-
bliffemens, leur fituation, leur étendue, leur forme
politique, & leurs différens ufages félon les tems ;
M. Boindin , dont j’ai tiré ce détail, a épuifé la matière
par trois belles & grandes differtations inférées
dans le recueil de l’académie des Belles-Lettres. ( Le
chevalier DE JAUCOURT. )
TR 1BULE, f. m. tribulus, {Hiß. nat. Botan.) genre
de plante à fleur en rofe, compofée de plufieurs pétales
difpofés en rond ; le piftil fort du calice, & devient
dans la fuite un fruit en forme de croix ou turbiné
, & compofé le plus fouvent de plufieurs parties
faites en forme de chauffe-trape, & réunies en
maniéré de tête qui contiennent des femences ordinairement
oblongues, & placées dans de petites loges
comme dans une niche. Tournefort, irtß. rei herbi
Voye{ Plante.
. Tournefort en établit quatre efpeces, & nomme
la première tribulus terreßrts, ciceris folio ,fruUu acu-
Uato, ƒ. R. H. 2<5\5. Sa racine eft fimple , blanche,'
fibreufe. Elle pouffe plufieurs petites tiges, couchées
par terre, rondes , noueufes , velues , rougeâtres,
divifées en plufieurs rameaux. Ses feuilles font ailées
ou rangées par paires le long d’une côte, femblables
à celles du pois chiche, velues. Ses fleurs fortent des
aiffelles des feuilles portées fur des pédicules affez
longs, compofées chacune de cinq pétales ou feuilles
jaunes, dilpofées en ro fe, avec dix petites étamines
dans le milieu. A ces fleurs fuccedent des fruits durs,
armés d’épines longues & aiguës ; ce fruit eft compofé
de quatre ou cinq cellules, dans lefquelles fe
trouvent renfermées des femences oblongues.
Cette plante croît abondamment dans les pays
chauds, en Efpagne, en Provence & en Languedoc
aux environs de Montpellier ; elle fort de terre fur la
fin de Mai, fleurit en Juillet, & graine en Août ^elte
eft fort incommode aux jardiniers , parée que fes
fruits qui tombent dès qu’ils font mûrs, leur bleffent
rudement les piés nuds par leurs piquans aiguillons;
cependant fa graine eft d’ufage : elle paffe pour être
aftringente & bienfaifante dans la diarrhée. {D . J.)
TRIBULE AQUATIQUE , (Botan.) tribulus aquati-,
eus, C . B. J. B. Parkinfon, Tournef. &c. C ’eft lafeule
efpece du genre de plante que Tournefort acarafté-
riié fous le nom de tribulo'ides , & Ray fous celui de
potamogiton.
Cette plante aquatique pouffe des tiges longues
grêles, fucculentes , garnies par efpace de beaucoup
de fibres, qui lui fervent de racines pour s’attacher ;
ces tiges groffiffent vers la fuperficie de l’eau ; elles
jettent des feuilles larges prefque femblables à celle
du peuplier, mais plus courtes, & ayant en quelque
maniéré la forme rhomboïde , relevées de plufieurs
nervures crenelées en leur circonférence , attachées
à des queues longues & groffes. Ses fleurs font petites
, blanches , ibutenues par un pédicule arrondi,
folide, couvert d’un petit duvet ; il leur fuccede des
fruits femblables à des petites.châtaignes, mais armés
chacun de quatre groffes pointes ou épines dures
, de couleur grife, revêtu d’une membrane qui
fè fépare ; enfuite ce fruit devient noir, prefque
comme du jais, liffe , poli ; on appelle ce fruit vulgairement
châtaigne-d.'eau : fa fubftance eft une forte
d’amande formée en coeur, dure, blanche, couverte
d’une peau très-fine, & bonne à manger. On en peut
faire de la farine qui reffemble à celle de feves, & en
paîtrir du pain. Cette plante croît dans les ruiffeaux,
fur le bord des lacs & des rivières en Italie & en Allemagne.
( D . J.')
TRIBUN, {Hift. rom.) tribunus ; mot général qui
fignifioit chef, & le mot qu’on ajoutoit à celui-ci *
defignoit la chofe commile à la garde, aux foins, à
l’infpe&ion ou à l’adminiftration de ce chef. Aiitfi le
tribun du peuple étoit le chef, le défenfeur du peuple.
Tribun militaire, étoit un magiftrat qui com-
mandoit les armées. Tribuns des légions étoient des
officiers qui commandoient tour-à -tour pendant
deux mois à toute la légion. Tribun des céleres étoit
le commandant de ce corps de cavalerie.
Le nom de tribun fe donnoit ehcore à d’autres fortes
d’officiers. Les tribuns de la marine,par exemple,
tribuni marinorum, étoient des intendans des côtes &
de la navigation des rivières. Les tribuns du tréfor
public, tribuni ararii, étoient des tréforiers établis
pour payer les milices ; comme font aujourd’hui
nos tréforiers des guerres. Les tribuns des fabriques,
tribuni fabricarum, préfidoient à la fabrique des armés.
Les tribuns des notaires, tribuni notariorum ,
étoient les premiers fecrétaires des empereurs. Les
tribuns des plaifirs, tribuni voluptqtum, dans le code
Théodofien, /. XIII.de fcenic. avoient foin des jeux,
des fpeéfades ôc autres divertiffemens femblables du
peuple. Ënfiti tribun défignoit chéz les Romains, le
chef d’une tribu. {D. J.')
T ribu n du peu p le , {Hljl. & gouvern. rorh.') ma-1
eiftrat romain, pris du peuple pour le garantir de
j’oppreffion des grands, de la barbarie des ufuriers ,
& pour défendre fes droits & fa liberté contre les ‘
entreprifes des confuls & du fénat. En deux mots,
les tribuns du peuple étoient cenfés fes chefs & fes
prote&eurs. Entrons dans les détails hiftoriques qui
concernent cette magiftrature»
Le peuple ne pouvant cultiver fes terres à Caufe
des querelles fréquentes que la république avoit à
foutenir, il fe trouva bientôt accablé de dettes , &
fe vit conduire impitoyablement en efclavage par
fes créanciers, quand il ne pouvoit pas payer. Il s’a-
dreffa fouvent au fénat pour trouver quelque foui
lagement, mais il ne put rien obtenir. Laffé des vai«-
nés promeffes dont on l’amufoit depuis long-tems ;
il fe retira un jour fur le mont Sacré, l’an de Roiiîe
259, à l’inftigation de Sicinius, homme de courage
& de réfolution ; enfuite il ne voulut point rentrer
dans la ville qu’on ne lui eût remis toutes fes dettes,
& promis de délivrer ceux qui étoient efclaves pour
ce fujet. Il fallut outre cela, lui permettre de créer
des magiftrats pour foutenir fes intérêts. On les nomma
tribuns, parce que les premiers furent pris d’entre
les tribuns militaires. Ainfi on en créa deux dans
lés comices par curies; & depuis la publication de
la loi Publicola, l’an 283 , on en nomma cinq dans
les comices par tribus. Enfin l ’an 297, on en élût
dix, c’eft-à-dire deux de chaque claffe. Cicéron dit
cependant qu’on en créa deux la première année, &
dix la fécondé, dans les comices par centuries.
Les tribuns du peuple tiroient au fort pour préfider
à ces affemblées par tribus, & s’il arrivoit que l’af-
femblée fut finie avant que tous les dix fuffent nommés
, le refte l’étoit par le college des tribuns ; mais
cela fut abrogé par la loi Trébonia, l’an 305. On prétend
qu’il y en avoit une ancienne qui ordonnoit que
les tribuns qui n’auroient pas créé leurs fucceffeurs
pour l’année fuivante, feroient brûlés vifs. C ’eft Va-
lere Maxime qui le dit ; mais ce n’eft pas un auteur de
grande autorité.
Comme les premiers tribuns furent créés le quatrième
des ides de Décembre, dans la fuite le meme
jour fut deftiné pour l’éleftion de ces magiftrats. Ces
tribuns étoient toujours choifis d’entre le peuple. Aucun
patricien ne pouvoit être revêtu de cette charge
, à-moins que l’adoption ne l’eût fait paffer dans
l’ordre plébéien. Un plébéien qui étoit fénateur, ne
pouvoit pas même être tribun.
Ils n’avoient point entrée au fénat ; ils demeu-
roient feulement alfis fur les bancs vis-à-vis la porte
du lieu où il étoit affemblé, d’oîi ils entendoient les
réfolutions qui s’y prenoient. Ils pouvoient cependant
affembler le fénat quand il leur plaifoit. Dans
la fuite par la loi Atinia (Âtinius étoit tribun l’an 63 3,
félon Pighius) , il fut ordonné qu’aucun romain ne
pourroit être élu tribun du peuple, s’il n’étoit fénateur
plébéien.
Au commencement l’unique devoir des tribuns
etoit de protéger le peuple contre les patriciens ; en
forte que leur pouvoir confiftoit plutôt à empêcher
qu’à agir. Ils ne pafferent pas d’abord pour magiftrats;
aufli ne portoient-ils point la robe prétexte : on les
regardoit plutôt comme le frein de la magiftrature.
Cependant dans la fuite on leur donna communément
le nom de magijlrats. Ils avoient le droit de délivrer-
un prifonnier, & de le fouftraire à un jugement prêt
a être rendu contre lui. Aufli pour fignifier qu’ils fai-
foient profeflion de fecourir tout le monde, leurs
• maifons dévoient être ouvertes jour & nuit, & il ne
leur étoit pas permis de coucher hors de la v ille , ni
meme*l’en fortir, fi nous en croyons Appien. (Civil.
' Tome X E I ,
/. ii.pag. % & . Edit. Tollii.) D ’ailleurs hor$ de Rome
, ils n’avoient aucune autorité, fi ce n’eft dans les
fêtes latines, ou lorfqu’ils fortoient pour les affaires
de la république»
Leur principal pouvoir donfiftoit à s’oppofer aux
arrêts du fénat, & à tous les afres des autres, magif-*
trats, par cette formule fi célébré: veto, intercedo, je
m’oppofe, j’interviens; La force de cette oppofition
étoit fi grande, que quiconque n’y obéiffoit pas, foit
qu’il fût magiftrat, loit qu’il fût particulier, on le
faifoit aufli-tôt conduire en prifon par celui qu’on
nOmmoit viator ; ou bien on le citoit devant le peuple
comme rebelle à la puifl’ance facrée qu’ils repré-
îentoient. De-là vient que quiconque les offenfoit
de parole ou d’aftion, étoit regardé comme un facri-*
lege, & fes biens étoient confilqués.
Lorfque les tribuns dupeuplc ne s’oppofoient point
aux decrets du fénat, on mettoit au bas de l’afre la
lettre T , pour marquer l’approbation. S’ils s’oppoa
foient, le decret n’étoit point appellé Jenatiis-confuU
tum, mais feulement fenaiûs aucloritas. Dans l’enre-*
giftrement, ce mot fignifioit que tel avoit été l’avis
du férîat. Un feul tribun pouvoit s’oppofer à ce que
faifoient fes collègues^: il l’annuloit par cette oppofition.
Le fénat po^fiibjuguer le peuple, fe fervoit
fouvent de ce moyen, & tâchoit toujours de met-*
tre de fon côté quelqu’un des tribuns, pour rompre les
mefures des autres.
Quoiqu’ils euffent déjà une très-grande autorité,
elle devint dans la fuite bien plus confidérable. En
vertu de la puiffance facrée dont ils étoient revêtus,
non feulement ils s’oppofoient à tout ce qui leur dé-
plaifoit, comme aux afiembléespar tribus, & à la levée
des foldats; mais encore ils affeiribloient le fénat
& le peuple quand ils vouloient, & ils rompoient les
affemblées de même. Tous les plébifcites ou decrets
du peuple qu’ils publioient, n’obligeoient au commencement
que le peuple feul : dans la fuite ils obligèrent
tous les trois ordres , & cela après la publication
des lois Horatia & Hortenjia, en 464 & 466.
Enfin ils portoient fi loin leur autorité, qu’ils don«-
noient ou ôtoient à qui bon leur fembloit, le manie-
menthes deniers publics ^la recette des impofitions,
les départemens, les magiftratures, les Commande-
mens d’armées, & toutes fortes de charges, &c. Par
l’abus qu’ils firent de ce pouvoir immenle, ils furent
caufe des plus grands troublés de la république,
dont Cicéron fe plaint amèrement, de legib. Ub. ///.
c. ix.
Cette puiffance illimitée ne fubfifta pas toujours.
L. Sylla attaché au parti des grands , s’étant rendu
maître de la république à main armée, diminua beaucoup
l’autorité des tribuns, & l’anéantit prefque entièrement
par une loi portée l’an 672, qui défendoit
que celui qui avoit été tribun pût jamais parvenir à
aucune autre charge. Il leur ôta par la même lo i , le
droit de haranguer le peuple, de faire des lois ; & les
appellations à leur tribunal furent abolies. Il leur laiffa
feulement le droit de s’oppofer.
Cependant le conful Cotta, l’an 679, leur rendit
le droit de parvenir aux charges de la république ; &C
l’an 683 , le grand Pompée les rétablit dans tous leurs
anciens privilèges. Leur puiffance fubfifta jufqu’à
Jules-Céîar. La 731 année de Rome, le fénat rendit
un decret par lequel il transféroit à Augufte & à'fes
fucceffeurs, toute l’autorité des tribuns du peuple,
qu’on continua de créer pour la forme. Augiifte s’étant
ainfi rendu maître de la puiffance tribunitienne,
n’accorda aüx tribuns que le feul privilège de ne pouvoir
être cités en jugement avant que d’avoir quitté
leur charge; & fous Tibere, ils eurent encore lë
droit fiûif d’oppofition.Enfin du tems des empereurs
Nerva & Trajan, la dignité de tribun du peuple n’étoit
plus qu’un fantôme, un vain titre fans fonction
K K k k i j ' 4