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eft un bois qui, quoiqu’il ne foit pas dangereux pour
une armée, eft difficile à paffer : car outre des défilés
de cinq milles de longueur , oîi il n’y a de paffage
libre que pour un cheval charge, les rochers lont
tellement elcarpés de côté 6c d’autre , qu’on ne peut
guère regarder en-bas fans que les yeux foient frappés
, 6c lans fe fentir faifi d’horreur. On eft effrayé
auffi du bruit que fait le Pénée, & de la profondeur
de la vallée où il coule.
Mais fi la topographie des lieux eft pour Tite-Live,
les poètes font pour moi, dans l’idée raviffante que
j’ai prife de Tempe en les lilant. Ils m’en font des def-
criptions qui difputent du prix de la beauté avec le
lieu qu’ils dépeignent. D’ailleurs Tempe a paffé en
proverbe pour un endroit délicieux ; 6c fes vallons
repréfentent toutes les autres vallées du monde, les
plus agréablement coupées par des ruiffeaux, les
mieux tapiffées de verdure , les plus ombragées de
toutes fortes, d’arbres 6c d’arbuftes , 6c telles enfin
que les oifeaux ne ceffent d’ en célébrer les charmes.
En un mot, Tite-Live m’attrifte, la fable m’égaie 6c
m’enchante, je m’ en rapporte donc à la fable pour I
mon amufement. (Le chevalier d e J au COURT. )
TEMPÉRAMENT, f. m. ( Philofop.) eft cette habitude
ou difpofition du corps , qui réliilte de la proportion
des quatre qualités primitives 6c élémentaires
dont il eft compofé. Voyez Q u al ité & Élém
en t.
L’idée de tempérament vient dq celle de mélange,
c ’eft-à-dire du mélange de différens élémens , comme
la terre, l'eau , l’air 6c le feu, ou pour parler plus ju-
f te ,à la maniéré des Péripatéticiens, du mélange du
chaud, du froid, du fec 6c de l’humide. Ces élémens
ou qualités, par leur oppofition, tendent às’affoiblir
mutuellement, 6c à dominer les unes lur les autres,
6c de toutes enfemble, rélulte une forte.de température
ou de mélange en telle ou telle proportion ; en
conféquence de quoi, félon la qualité qui prédomine
, nous difons un tempérament chaud, ou froid, fec
OU humide. V oye^MÉLANGE , CR ASE , &c.
On difpute dans les écoles, fi le tempérament comprend
proprement les quatre premières qualités, ou
fi l’altération que fouffrent ces qualités , par 1 aftion
réciproque qu’elles ont les unes fur les autres, ne les
détruit pas entièrement, en forte qu’il en réliilte une
cinquième qualité fimple. }
Les auteurs diftinguent deux fortes dé tempérament,
l’un qu’ils appellent uniforme, 6c l’autre' qu’ils appellent
difforme. Le premier eft celui où toutes les qualités
font mêlées dans un degré égal. Le fécond eft
celui où elles font mêlées dans un degré inégal. ^
Il ne peut y avoir qu’un leul tempérament uniforme.
Le tempérament difforme admet huit fortes de
combinaifons, puifqu’une feule qualité, ou deux
qualités à la fois peuvent dominer ; de-là le tempérament
chaud 6c humide, le tempérament froid 6c humide
, &c. De plus , quelques-uns confidérant que les
qualités qui dominent, peuvent n’être pas en degré
égal, 6c de même celles qui ne dominent pas ; ils font
plufieurs autres nouvelles cnmbinaifons de tempéra-
niens, 6c en ajoutent julqu’à douze au nombre ordinaire.
En effet, comme il y a une infinité de degres
entre le plus haut point 6c le plus bas point de chacun
des élémens, on peut dire auffi qu’il y a un nombre
infini de différentes températures. Voye{ D egre.
T empérament , en Médecine, s’entend plus particulièrement
de la conftitution naturelle du corps
de l’homme , ou de l’état des humeurs dans chaque
fujet. VoyezConstitut ion 6-Humeur.
L ’idée de tempérament vient de ce que le fang qui
coule dans les veines & les artères, ne fe conçoit pas
comme une liqueur fimple, mais comme une forte
de mixte impartait, ou un affemblage de plufieurs autres
liquides; car il n’eftpas çompül'é feulement des
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quatre qualités fimples ou primitives, mais encore
de quatre autres humeurs lecondaires qui en font
auffi compofées, 6c dans lefquelles on fuppofe qu’il
peut fe réfoudre ; lavoir la bile, le phlegme, la mélancolie
6c le J'ang proprement dit. Voyez Bil e , Phlegme,
Mélancolie , Sang.
D e- là , fuivant que telle ou telle de ces humeurs
domine dans un fujet, on dit qu’il eft d’un tempérament
bilieux, phlegmatique, mélancolique, fanguin,
Oc. Voy.Sanguin, Mélancolique, Bilieux , &c.
Les anciens médecins prétendoient que le ternpé-<
rament animal répondoit au tempérament univerfel
• décrit ci-deffus. Ainfi on croyoit que le tempérament
fanguin répondoit au tempérament chaud 6c humide,
le tempérament flegmatique au tempérament froid 6c
humide le tempérament mélancolique au tempérament
froid 6c fec , 6-c.
Galien introcluifit dans la médecine ladoftnnedes
tempérament qu’il avoit tirée des Péripatéticiens, 6c
il en fit comme la bafe de toute la Médecine. L’art
de guérir les maladies ne confiftoit, félon lui, qu’à
tenlpérer les degrés des qualités des humeurs, érc.
Voyez Ga lén iq u e , D eg r é , &c.
Dans la médecine d’aujourd’hui on confidere
beaucoup moins les tempérament. Le doéteur Quincy,
6c d’autres auteurs méchaniciens, retranchent la
plus grande partie de la doétrine de Galien, comme
inutile 6c incertaine, 6c regardent feulement les tempérament
comme des diverlités dans le fang de diffé-
j rentes perlonnes, qui rendent ce liquide plus capable
dans un corps que dans un autre , à de certaines
combinaifons, c’eft-à-dire de tourner vers la bile, le
phlegme, &c. D ’où, fuivant ces auteurs, les gens
lônt nommés bilieux, phlegmatiquet, &c. Vvye{
Sang.
Les anciens diftinguoient deux fortes de tempérament
dans un même corps ; l’un qu’ils nommoient ad
pondut, l’autre qu’ils nommoient ad juflitiam.
Le tempérament ad pondut eft celui où les qualités
élémentaires fe trouvent en quantités & en proportions
égales : c’eft ainfi qu’on les fuppofoit dans la
peau des doigts s fans quoi ces parties ne pourroient
pas diftinguer affez exactement les objets.
Le tempérament ad juflitiam eft celui où les qualités
élémentaires ne font pas en proportions égalés
, mais feulement autant qu’il eft neceffaire pour
la fon&ion propre à une partie. Tel eft le tempérament
dans nos o s , qui contient plus de parties terreu-
fes que d’aqueufès, afin d’être plus dur 6c plus foli-
de pour remplir fa fonction de loutenir.
Galien oblerve que le tempérament ad pondut n’ eft
qu’imaginaire ; 6c quand il feroit réel, il ne pourroit
liibfifter qu’un moment.
Le doweur Pitcairn regarde les tempérament comme
autant de maladies naturelles. Selon cet auteur,
une perlonne de quelque tempérament qu’elle foit, a
en elle-même les lèmences d’une maladie réelle; un
tempérament particulier fuppofant toujours que certaines
fécrétions font en plus grande proportion
qu’il ne convient pour une longue vie.
Comme les différences des tempérament ne font
autre chofe que des différences de proportions dans
la quantité des liquides, lefquelles proportions peuvent
varier à l’infini ; il peut y avoir par conféquent
une infinité de tempérament, quoique les auteurs n’en
aient fùppofé que quatre. Ce qu’on appelle d’ordinaire
tempérament languin, Pitcairn dit que ce n’eft
qu’une pléthore. V jye^PLÉTHORE.
T empérament , f. m. en Mufique, eft la maniéré
de modifier tellement les fons, qu’au moyen d’une
légère altération dans la jufte proportion des intervalles,
on puiffe employer les mêmes cordes-à
former divers intervalles, 6c à moduler en différens
tons, fans déplaire à l’oreille.
Pythagore,
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Tÿtbagore, qui trouva le pr'èmiér les rapports des
intervalles harmoniques, prétendoit que ces rapports
fuirent obfervés dans toute la rigueur mathématique
; fans rien accorder à la tolérance de l’oreil-
4c. Certe févéritépouvoit être bonne pour fôn teins ,
Où toute l’étendue du fyftème fè bornoit encore à un
fi petit nombre de cordes. Mais comnie la plupart
des inftrumens des anciens étoient 'cpmpofcs de cordes
qui fe touchoient à vuide , 6c qu’il leur firlloit ,
par conféquent, une corde pour chaque fon;à nrefurè
que le fyftème s’étendit -, ils ne tardèrent pas à s’ap-
percevoir que‘la réglé de-Rythagore eut trop multiplié
les cordes, 6c empêché d’en tirer tous les ufages
dont elles étoient lùfceptibles. Ariftoxene , difciple
d’Ariftote, voyant combien l’exaéütude des calculs
de Pythagore étoit nuifible au progrès de la Mufique,
6c à la facilité de l’exécution-, prit l’autre extrémité ;
& -abandonnant prelque entièrement ces calculs , il
•s’en rapporta uniquement au jugement de l ’oreille ,
6c rejetta comme inutile tout ce que P.ythagor avoit
-établi.
Ce'là forma dans la Mufique deüx fefles "qui "ont
iong-tems fubfifté chez les Grecs ; l’une , des Arifto-
xémeiïs, qui étoient les muficiens de pratique ; 6c
Taiftre, des Pythagoriciens , qui étoient les philo-
fophesv
Dans la mité , Ptolomée & Dydime t'roùvàftt >
dVec raifon , que Pythagore & Ariftoxene avoiertt
donné dans des extrémités également infoutenables ;
6c confultant à la-fois le fens 6c la raifon f travaillèrent
chacun de leur côté à la réforme de l’ancien fyftème
diatonique. Mais comme ils ne s’éloignèrent pas
des principes établis pour la divifion des tétracordes,
6c que reconnoiffant la différence du ton majeur au
ton mineur, ils n’oferent toucher à celui-ci pour le
partager comme l’autre par une corde chromatique
en deux parties égales $ le fyftème général demeura
encore long-tems dans un état d’imperfection qui ne
perméttoit pas d’appercevoir le vrai principe du tem*
pérarnènh •
Enfin G uy d’Arezzê vint, qui refondit- en quelque
Ihaniere la Mufique, 6c qui inventa , dit-on, le cla-
Vecirk Or il eft certain que Cet infiniment n’a pu fub-
fifter, non plus que l’orgue j du-moins tels où à-peu-
près qiie nous les connoifl'ons aujourd’hui, que l*on
n’ait eh même terns trouvé le tempérament $ lans le*1
quel il eft impoffible de les accorder. Ces diverfes inventions
, dans quelque t'ems qu’elles aient été trouvées
> n’ont donc pu être fort éloignées l’une de l’autre
; c’ëft tout ce que nous en favons.
Mais quoique la réglé du tempérament foit eonnuë
depuis lüng-tems, il n’en eft pas de même du principe
fur leqùel .elle eft établie. Le fiecle dernier qui fut le
fiecle des décoüvertes en tout genre, eft le premier
qui nous ait donné des iumieres bien nettes lùr cette
pratique. Le pere Merfënne & M. Loullié fe font
éxercés â en nous eh donrfer des réglés. M. Sauveur
à troiivé des cfivifions de l’oûave qui fourniffent tous
les tempérament poffiblès. Enfin M. Rameau $ après
tous les autres., a cru développer tout de nouveau la
Véritable théorie du tempérament, 6c a même prétendu
fur cette théorie établir fousfon nom une pratique
très-ancienne dont nous parlerons bientôt. En voilà
affez fur l’hiftoire du tempérament ; paffons à la chofe
même.
Si l’on aCcdrde bien jufte quatre quintes de fuite $
Comme «r, f o l , ré , la , mi9 on trouvera que cette
quatrième quinte mi, fera avec Yut une tierce majeure
discordante, 6c de beaucoup trop forte ; c’eft que
ce mi engendré comme quinte de la , n’eft pas le même
fôn qui doit faire la tierce majeure de Yut. En
Voici là raifon. Le rapport de la quinte eft de i à 3 ,
ou , fi 1 On v eu t, d’ i à 3 ; car.c’eft ici la même chofe,
1 6c 1 étant l’oâave l’un de l’autre : ainfi la fuccef-
Tôme X F f
. T Ë M _ ïf
fioh dés quintes formant une progreffioh triple , on
àurà rte 1 ,fo l 3 , ré y , la 1 7 , & 'mi 81.
Considérons maihtehant ce mi comme tierce ma-
j’eure d’ûe. Son rapport eft 4 , 5 , ou 1 , ç ; car 4 n’eft
que la double oftave d’ i. Si nous rapprochons d’oc-
tàve en odtave ce //w du précédent, nous trouverons
mi 5 , mi i ô , mi i o , mi 40 6c mi 80 ; ainfi la quinte
de la étant mi 81 , la tierce majeure à’ut eft mi 80 ;
cès deux mi ne font donc pas le même ; leur rapport
eft f-f : ce qui fait préciiément lé comma majeur.
P un autre côté , fi nous procédons de quinte en
quinte jufqu’à la douzième puiffance cYite qui eft le A”
dièfé , nous trouverons que ce ƒ excède Yut dont il
dôvroi't faire l’ùhiftbn , 6c qu’il eft avec lui en rapport
de 53 1441 à 5 1 4 ^ 8 , rapport qui donne lé
comma de Pythagore. De forte que parle calcul précédent
le f i dièle devroit exceder Yut de trois com-
ihà majeurs, & par celui-ci, il doit feulement l’excéder
du comma de Pythagore.
Mais il faut que le même fon mi qui fait là quinte
du lu , ferve encore à faire la tierce majeure de Yut :
il faut que le meme f diefe , qui forme la treizième
quinte de ce même ut, en fafle en même tems l’octave
, & il faut enfin que ces deux différentes réglés
fe Combinent de manière qu’elles concourent à la
conftitution générale de tout le fyftème. C’eft la
maniéré d’exécuter tout cela qu’ôn appelle tempé-
Tamttit. '
Si l’on aécorde toutes les quintes jùftés, toutes les
tierces majeures feront trop fortes , par conféquent
les tierces mineures trop foibles -, 6c la partition au-
lieù dé fe trouver jufte , voye^ Partit ion , don*
nera à la treizième quinte une oâa ye de beaucoup
trop forte: . , r
Si l’oh diminué chaque quinte dé la quàtriemé
partie du comma majeur, lestiérces majeures feront
très-juftes , mais lestiérces mineures feront encoré
trop foibles ; 6t quand on fera au bout de la parti-
tioii, on trouvera l’oftave fauffe, 6c trop fôible dé
beaucoup:
Qùé fi Bon diminue proportionnellément chaqué
quinte ( c’ eft le fyftème de M. Rameau), feulement
de la douzième partie du comma de Pythagore , ce
fera la diftribùtiori là pliis égalé qu’on puifl'e imaginer
, & la partition fe trouvera jufte ; mais toutes les
tierces majeures feront trop Fortes.
Tout ceti n’eft que des conféquétices riéceffâireS
de ce que nous venons d’établir, 6c l’on peut voir
par-là qu’il eft impoffible d’éviter tous les iriconvé-
hiens. On né faufoit gagner d’iin côté qu’oii ne perdé
de l’autre. Voyons de quelle maniéré on combiné
tout cela, & comment par le tempérament ordinaire*
on met cette perte même à profit.
Il faut d’abord remarquer ces trois choses : i 6i
que l’oreille qui foüffre & demandé même quelque
àffoibliffement dans la qüinté, eft blefféë de la moindre
altération dans la jiifteffede la tiérce majeure. 20.
Qu’en tempérant les quintesjcomme on voudra, il eft
impoffible d’avoir jamais toutes les tierces juftes*
30. Qil’il y a des tdris béaùcoùp moins ufités que
d’autres, & qù’onn’emploieguere cès premiers que
pour les morceaiix d’exprefliori.
Relativement à ces ôbfervatioris, les régies dti
tempérament doivent dont être i° . de rendre autant
qu’il eft poffible les tiercés juftes, même aux dépend
des quintes , 6c de rejetter dans les tons qu’on emploie
le moins celles qu’on eft contraint d’altérer ;
car par cette méthode On fait enteridré ces tierces lé
plus rarement qu’il fe peut, & l’on les referve pour
les morceaux d’ëxpreman qui demandent une harmonie
plus extraordinaire. Or c’eft ce qu’on obfervé
parfaitement par la réglé commune du tempétàthenu
Pour cela i° . on commence par Yut du milieu dit
clavier, & l ’on affoiblit les quatre premières quintes
H