profcénion ; cétte derniere opinion n’eft pas mieux
fondée»
L’hypofcénion étoit un lieu particulier pratiqué
fur l’orcheftre, comme un réduit dégagé pour la commodité
des joueurs d’inftrumens & des personnages*
du logéon ; car le choeur 8c les mimes fe tenoient dans
Yhypofcénion , jufquà ce que les néceffités de la re-
préfentation lès obligeaffent à monter fur le logéofi
pour l’exécution de leurs rôles. Les poètes mêmes
venoient dans Yhypofcénion , 8c c’eft ce qui eft jufti-
fié par Athénée , quand il raconte qu’Afopodore
Phliafien fe mo&jua plaifamment des injuftes acclamations
du théâtre , où bien fouvent les mauvaifes
chofes font applaudies ; il obferve que cet Apofodore
étant encore dans l’hypofcénion, 8c entendant l’approbation
éclatante que le peuple donnoit àun joueur
de flûte, « qu’eft-ceci, s’écria-t-il, vous verrez qu’on
» vient d’admirer quelque nouvelle fottife » ? Il pa*
roît de-là qu’Athénée ne confidere pas l’hypofcénion
comme une fimple façade ., mais comme un lieu 8c
eipace où étoit Afopodore, foit qu’ily fût pour y demeurer
tout le long du fpeûacle, foit qu’il n’y fût
qu’ep partant.
Pollux eft d’accord avec Athénée touchant l’hy-
pofcénion, 8c confirme la véritable définition de
cette partie du théâtre. Je ne rapporterai pas le grec
de Pollux, qu’on peut lire dans le xix. chapitre de
fon IV. livre ; mais voici le latin de Seberus : hypo-
fcenium autem columnis & imaginibus ornatum erat ,
ad theatrum converfum, pulpito fubjacens. Et vous remarquerez
que, dans le grec , il y à formellement le
mot de logéon y que Seberus a rendu par le mot de
pulpitmn.
L’enceinte de l’hypofcénion étoit parallèle à celle
du logéon. Sa largeur pouvoit être de fix à fept piés ;
mais enfin le logéon , l’hypofcénion , l’orchëftre 8c
le coniftra font les quatre endroits que beaucoup de
gens ont confondus fous le mot d’orchejlre, comme
les endroits fuivans ont été compris fous le mot dé
fcène. , . I
Le profccnion où pofte des comédiens s’élevoit
de deux piés au-deffus du logéon ; de forte qu’il avoit
environ fept piés de hauteur fur l’orcheftre , 8c onze
furie rez-de-chaufîee ; & il ne faut pas s’imaginer
qu’un auffi grand architefte que Philon eût donné
iâns raifon toutes fes diverfes élévations aux diffé-
rens portes de fes théâtres. Outre les égards de la vue, il
les avoit ainfi ménagés, afin que le fon des inftrumens
& la voix des afreurs fe puffent porter avec une diftri*
bution égale aux oreilles des fpedateurs, félon les
diverfes hauteurs des degrés qu’ils occupoient. Sur
le profcénion , il y avoit un autel, que les Athéniens
appelloient agyéus, c’onfacré à Apollon.
La fcène, félon ce' que nous avons déjà remarqué,
n’étoit autre chofe que les colonnes 8c les ornemens
d’architeôure qui etoient élevés dans le fond 8c fur
les ailes du profcénion, 8c qui en faifoient la décora-
‘ tion. Quand il y avoit trois rangs de colonnes l’un fur
l’autre,le plus hauts’appelloitepifcénion. Agatarchus
a été le premier décorateur qui a travaille aux era-
belliffemens de laJfcene, félonies régies de laperfpec-
tive ; Efchyle l’avoit inftruit.
On appelloit en général parafcénion l’ efpace qui
étoit devant 8c derrière la fcene, & on donnoit auffi
ce nom à toutes les avenues & efcaliers , par où l’on
paffoit des poftes de la mufique aux portes de la comédie.
Voilà comment, fous le nom de fcène, on a
confondu le profcénion, le parafcénion & la fcène.
Les Athéniens employoient fouvent des machi-
jies ; la principale s’appelloit théologéon. Elle étoit
élevée en l’air , 8c portoit les dieux que le poète in-
troduifoit. C’eft de celledà que les favàns de l’antiquité
ont tant condamné l’ufage , parce qu’elle fer-
y o ü de garant à la ftérilité du mauvais poète ; 8c
quand il aVoit embarraffé l’intrigue de fon fujet, aii-
'.1 ju d’en fortir par des moyens ingénieux Sc par un
dénouement naturel, il s’en tiroit d’affaire en intro-
duifant fur le théologéon un dieu q u i, de pure autor
rité 8c par un côntre-tems ridicule , ramenoit dés
pays éloignés un homme abfent de fa patrie, rendoit
tout-à-coitp la fanté à un malade, ou la liberté à un
prifonnier. Auffi les Athéniens en avoient fait un mot
de ra illerie8c quand il voyoient un homme déconcerté
, ils s’écrioient en fe mocquant, apo micanisi
A leur exemple , les critiques de Rome difoient en
pareille occalion, deus è machiriâ.
Cependant il ne falloit pas que la comédie des anciens
fut toujours auffi ridicule qu’on l’imagine à cet
égard. Quand les dieux paroiffoient fur le théologéon
On n’entendoit rien que de bon : voici ce que le plus
éloquent des Romains a dit de cette machine, ex eâ
d'à effata fotpè fabantur homines ad virtutem excitabant±
à ■ Picio détendant>
L’enceinte extérieure de l’édifice étoit toute dé
marbre, 8c compofée de trois poétiques l’un au-defr
fus de l’autre, dont le Cercys étoit le plus élevé.
Il n’y avoit point de toit qui couvrît ce fpeétacle«’
Pour le théâtre de Regilla , qui étoit auprès du temple
de Théfée, il étoit couvert magnifiquement, 8c
avoit une charpente de cèdre. L’odéon ou théâtre dé
mufique avoit auffi un toit, 8c Plutarque vous dira
comment fa couverture donna lieu au poète comique
Gratinus j de railler ingénieufement Periclès qui
en avôit pris foin. Au théâtre de Bacchus il n’y avoit
rien de découvert que le profcénion 8c le cercys : auffi
comme les Athéniens y étoient expofés aux injures
de l’air > ils y venoient d’ordinaire avec de grands
manteaux pour fe garantir du froid 8c de la pluie,
8c pour fe défendre dii folèil ; ils avoient un feiadiort
qui eft notre parafol. Les Romains en portoient auffi
au théâtre, 8c,1’appelloient umbtlla : de cette manie-,
re , s’il arrivoit quelque orage inopiné; la repréfen-
tation étoit interrompue, 8c les fpe&ateurs fe fau-
voient, ou fous les portiques de l’enceinte exté--
rieure, ou fous le portique d’Eumenicus qui joignoit
au théâtre. Quoique le temple de Bacchus en fût proche,
il n’étoit pas poffible de s’y retirer, car on ne
l’ouvroit qu’une fois l’année. Cependant quand la
comédie fe donnoit dans le fort de l’été, la magnificence
des Athéniens enchériffoit par mille artifices,
fur la non-température des beaux jours : ils faifoient
exhaler par tout le théâtre des odeurs agréables, 8c
le plus fouvent on y voyoit tomber une petite pluie
de liqueurs odoriférantes ; car le troifieme corridor,
8c le cercys, étoient ornés d’une infinité de riches fta-
tues, qui par des tuyaux cachés, jettoient une grande
rofee lur le fpeélacle, 8c teirfpéroient ainfi les
chaleurs du tems & d’une fi nombreufe affemblée.
Mais on ne fait pas fi les Athéniens pratiquoient
au théâtre une chofe affez curieufe que Varron remarque
des Romains. A R ome, quand on croyoit
être retenu trop long - tems au théâtre par les charmes
de la repréfentation, les pères de famille portoient
dans leur fein des colombes domeftiques, qui
leur fervoient à envoyer des nouvelles à leur mai-
fon : ils attachoient un billet à la colombe, lui don-
noient l’effor, & elle ne manquoit pas d’aller porter
au logis les ordres de fon maître.
Les repréfentations ne fe faifoient que de jour. A
Rome, quand Lentulus Spinter fefi.it avifé de couvrir
les théâtres de toile, on y jôuoit quelquefois la nuit*
Le droit d’entrer au théâtre de Bacchus coûtoit à chaque
citoyen, tantôt deux oboles, tantôt trois ; l’obole
valoit environ deux ou trois fols de notre monnoie de
France. Cet argent n’étoit employé qu’aux petites réparations
du bâtiment; car les personnes de la première
qualité faifoient les frais du pompeux appareil
des repréfentations a ôc l’on tiroit au fort un homme
de chaque tribu, qui étoit obligé dé faire cétte ’dé*
penfe. À la création des archontes ou premiers raa-
giftrats , on donnoit au public cinq ou fix différentes
comédies, où l’émulation des concurrens pour le
prix de la poéfie 8c de la mufique les tranfportoit dé
telle forte, que les poètes,’ Alexis & Cléodeme;
moururent publiquement de joie fur la fcene de ce
•théâtre, au milieu des applaudiffemens du prix qu’ils
venoient de gagner. La brigue 8c la cabale' déro-
boient quelquefois la vittôire au mérite ; on fait le
bon mot de Ménandre, qui voyant le poète Philé-
mon triompher a fon préjudice par la corruption des
fuffrages, le vint trouver au milieu de la multitude-,
& lui dit froidement : N ’asrtu pas honte de m’avoir
vaincu ? Ménandre, en cinquante ans qu’il a vécu ,
a compofé cent & cinq comédies, 8c n’en a cliqué
huit qui aient été favorifées du triomphe : pour Euripide
, qui a fait autant de tragédies qu’il a vécu
d’annees | favoir foixante 8c quinze, il n’a remporté
le j >rix que de. cinq-.
Voilà quel étoit le théâtre de Bactlius, qui ne fer-
Voit pas feulement aux jeux publics & aux affèm-
blées de l’état, puifque les philofophes les plus fameux
y venoient encore expliquer leur dofrrine à*
leurs ecoliers ; & en général les théâtres n’étoient pas
fi fort décriés parmi lés premiers chrétiens, que l’on
veut nous le faire croire ; les premières prédications
du chriftianifme y ont été prononcées ; Cujas & Arif-
tarchus furent enlevés du théâtre d’Ephefe comme ils
y expliquoient l’Evangile * & S. Paul fut prié par fes
difciples de ne s’y pas préfenter, de peur d’une pa^
reille violence.
celui û Athènes,M. de la Guilletiere n’auroit pas cru;
que de tous les ouvrages de la belle & curieufe architecture
-, ce fut celui-là qui demanda lès plus grands
efforts de l’art. Ce n’avoit pas été affez à Phylon d’y,
employer en excellent architecte, une agréable fym-
métrie par le jurte rapport des parties dè main droite
aux parties de main gauche ,& par. l’ingénieufe convenance
des parties fupérieures aux inférieures, il
affeCta d y travailler en muficien & en médecin.
Gomme la voix fe feroit perdue dans un lieu vafté
& découvert, & que le bâtiment étant de marbre,
il ne fe faifoit point de repereuffion pour la foutenir,
Pnilon pratiqua des réduits ou cellules dans l’épaif-
feur des corridors, où il plaça les vaiffeaux d’airain
dont j’ai parlé; echcea; ils étoient foutenus dans leurs
petites cellules par des coins de fer , ne touchoient
point à la muraille, & on les avôit difpofés dé forte
que la voix fortant de la bouche des «tCfeurs comme
d’un centre, fe portoit eirculairement vers les corridors
ou paliers, & venoit frapper la concavité des
vaiffeaux; qui renvoyoient le fon plus fort & plus
clair. Mais fes inftrumens des muficiens qui étoient
places dans l’hypofcénion,y avoient encore de plus
grands avantages ; car on avoit fitué ces vaiffeaux
d airain avec une telle proportion mathématique
que leur diftance s’accordoit aux intervalles & à la
modulation de la mufique ; chaque ton différent
etoit foutenu par la repereuffion de quelqu’un de
ces vaiffeaux place méthodiquement pour cela : il y
en avoit vingt-huit. \ 1 R 9 SSÉIIÈ11111 ie juftifie ce que j’ai avancé
ci-delius, quand j ’ai dit que Vitruve avoit mal détermine
le nombre des diaçoma. ou paliers : de prétendre
qu’ilait juftifié ce nombre, quand il a dit que
tL I T T M P fur, ces Paliers»& qu>ily avoit trois
rangs d e cW d an s les grands théâtres, deux rangs
dans les moyens, & im rang dans les petits, cé
feroit trop prétendre. En effet, comment diftinaue-
rons-nous eequi efl grand, médiocre & p e t i t fV
H no" s,.d0nne t e mefures *auelles de 1 un ou de 1 autre! Vitrure ne nous en » riepdétermine
par dès déterminations de l’ufage, lui qui nous
a marqué en mefures romaines l’étendue de quel-
ques-autres parties dti théâtre beaucoup moins importantes
; car pour les proportions fondées fur les
parties du diamètre de l’orcheftre, elles font fembla-
bles dans ces trois ordres de théâtres, & ne diftinguent
pas le grand du petit: ainfi cette expreffion vague dé
\ îtruve n a pas déterminé véritablement le nombre
des paliers-.
A ces foins de 1 harmonie du théâtre grec oii avoit
ajouté les foins de la médecine. L’excellent architeâé
étant toujours garant de la fanté de ceux qu’il loge 8c
de ceux qu’il place, Philon n’aVoit pas cru indigne dé
fes reflexions, de eonfidérer qüe fans le fecours de fon
art, la joie des fpefracles agitant extraordinairement
les corps ; pouVôit caufer. dé l’altération dans les eft
pnts. Il y pourvut par la difpofition du bâtiment,
par la judiçie.ufe ouverture des jours ou entre-colon-
hes, & par l’économie des Vents falutaires 8c des
» dont il fut ménager le .cours 8c lè
pàffage : fur-tout il eût égard au vent d’occident i
parce qu’il a une force particulière fur l’ouïe 8c
qu’l1 porte à l’oreille les fons de plus loin 8c plus
diftinctement que les autres ; & comme ce vent eft
ordinairement chargé de Vapeurs, ce fut un chef-
d oeuvre de l’art, de tourner les jours des portiques
avec tant de jufteffe, que fintempérie dé l’oueft ne
caufat point de rhumes en interceptant la tranfpira-
tion ; ainfi dans fon théâtre la fcene regardoit la montagne
de la citadelle ; 8c avoit à dos la collihe de Cy-
nofargue ; celle du Muféon étoit à main droite 8c lé
ehemm ou la rue du Pyrée étoirà gauche. ’ '
Il ne refte rien aujourd’hui du -portique d’Eume-
meus qui etoit derrière la fcene ; mais c’étoit un
üouble portique, compofé de deux allées, divifées
lune de l’autre par des colonnes. Le plan du portique
etoit eleve fur le rez-de-chauffée, de-forte que
de la rue on n’y entroit pas de plain-pié, mais on y
9 1 Par, des perrons : il formoit un quârré long ,
de terre renfermoit étoit embelli dé
paliffades 8c de verdure, pour réjouir la vue dé
ceux qui fe promenoient dans le portique; on y
faifoit les répétitions des ouvrages de théâtre comme
les répétitions de la fymphonie fe faifoient dans '
1 odèon.
portique d KUmenicus, non pas pour régler l ’écono-i
mie.des ouvrages de théâtre, comme à Athèùes , mais
pour en reformer la morale, 8c condamnef au filen-
cè lés auteiirs dû bas ordre qui deshonorent la fcene
(£>b/ f ant k PUdeUr Par dC groffieres é(îuivoqiies!
T héâtre an a tom iq u e , ( 4 rchite&.) è 'eû dans
une eçple de médecine ou de chirurgie, une fall©
-avec plufieurs fiéges en amphithéâtre Circulaire, 8c
une table pofée fur un pivot, au milieu, pour là dift
feftion 8c la démonftratiOn des cadavres : tel eft lé
^trynàtomiqtte du Jardin-royal des plantes à Paris,’
T héâtre d’eau, ( Àrchit. hydraul. Décorât.)c’eft.
une difpofition d’une ou plufieurs allées d’eau ornées
de rocailles, de figures, &c. pour former divers
chhrigêmens dans une décoration perfpéèïive 8c
pour y repréfenter des fpefracles : tel eft le théâtre '
d eau de Verfailles. (D . J. )
T héâtre , (Marine.) on appelle ainfi fur ia Méditerranée
un chateau d’avant, yoye^ Chateau. 1
T réatre de jard in, (Décorai. de Jardins.)efpe-
-ce de terraffe élevée fur laquelle eft une décoration.;
perfpefrive d’allées d’arbres ; ou de charmille, pour
jouer des paftorales; L’amphithéatre qui . lui eftop-
pofé, a plufieurs degrés de gazon ou de pierre ; 8c
l ’efpacq le .plus bas entre Iç théâtre 8c l’amphithéâtre
tient lieu de parterre* *