embraffer l’ouvrage qui remplit ces têtes, 8c le remporter
en-arriere.
Mais pour exécuter c,es mouvemens, comme il y
<1 loin de la barre à moulinet fur laquelle les têtes des
ondes étoient placées, jufqu’aux têtes des aiguilles ,
il a fallu amener les têtes des ondes &c les platines qui
y font attachées, en-devant ; c’eft ce que l’ouvrier a
fait, en tirant à lui la barre à poignée ou les abattans.
Il a fallu faire dcfcéndre lès platines , & par confé-
quent les têtes désondes auxquelles elles iont aflem-
blées, pour que les gorges des platines fe trouvaient
un peu au-delfous des têtes des aiguilles ; c’eft ce qu’il
a fait en tirant les abattans auffi bas qu’ils pouvoient
defcendre, & fe laiffant diriger par les arrêtons. C ’eft
pour rendre poffible ce dernier mouvement, que l’on
a évidé les ondes en-deflous ; car li elles avoient été
par-tout de la même largeur, elles n’auroient pu defcendre
; la barre à moulinet fur laquelle elles auroient
continué de porter, les en auroit empê’ché : mais en
les évidant elles ont céfle de porter fur la barre à moulinet
, & en les évidant alfez, elles n’ont rien rencontré
d’ailleurs qui les gênât dans leur defcente, 8c qui
empêchât la gorge des platines de parvenir jufqu’au-
deiTous des becs des aiguilles.
. Mais ce n’étoit pas tout, il fallôit que ces gorges
remportaffent l’ouvrage de deffous les becs des aiguilles
en-arriere : pour cet effet, l’ouvrier tenant ces gorges
entre les têtes des aiguilles, les repouffe en-arriere :
mais en les repoufl'ant en-arriere, qu’arrive-t-il ? c’eft
que le talon de l’échancrure des ondes rencontre la
barre à. moulinet. Si cette barre à moulinet étoit immobile
dans les boîtes, elle arrêteroit ce mouvementho-
rifontal, 8c l’ouvrage ne l'eroit point remporté en-arriere
par les gorges ; auffi l’a-t-on fait mobile : le talon
de l’échancrure des ondes la fait reculer ; l’ouvrage
eft remporté par les gorges y les ondes fe relevent ;
leurs talons cefl'ent d’appuyer contre la barre à moulinet
; le reffort circulaire qui agit contre cette barre la
reftitue dans fon premier état, 8c elle eft difpofée à
recevoir derechef la tête des ondes dans leur chute,
qui fe fera au nouveau cueillement.
Voilà les ufages de ces parties, qui paroiffoient li
fuperflues. On a dentelé la roue 69 du moulinet ^ figure
première , Planche V. afin qu’on pût fa voir de
combien on hauffoit ou baiffoit la barre à moulinet,
& évaluer à-peu-près par ce moyen de combien on
relâchoit ou refferroit les mailles, 8c relâcher & ref-
ferrer également de chaque côté. La partie 68,6.8,
qu’on appelle croifée du moulinet, fert de poignée à
l ’arbre, & puis c’elt tout.
Ilne nous refte plus qu’un mot à dire des jumelles,
6 1 ,6 1 ,fig. première, PL V. des platines, tant à ondes
qu’à plomb , 8c des gardes-platines. On a pratiqué aux
jumelles 6 1 ,6 1 , deux arrêtons 5 ,5 , l’un en-deffus 61,
& l’autre en-deffous s. L’ufage de celui de deffus eft
de contenir à une julte hauteur les épaulieres & les
abattans qui y font affemblés, malgré l’aâion du grand
reffort. Voye[ même Planche, fig. y. L’ufage de celui
de deflous eft d’empêcher, dans le crochement , les
mêmes épaulieres ainli que les abattans, 8c par con-
féquent les gorges des platines, à defcendre trop au-
deffous des têtes des aiguilles , & de les brifer & fauffer
toutes.
Toutes les linuolités que l’on remarque aux platines,
Pl. IV. fig. 2. ont leurraifon. On peut diftin-
guer quatre lieux principaux dans ces parties : leur
bec b , qui prend la foie étendue fur les aiguilles 8c
la fait defcendre entr’elles : le deffous du bec c , qui
amene la foie bouclée fous les becs & la corroi : le
ventre e , qui abat l’ouvrage : la gorge d , qui le reprend
8c le ramene en-arriere : la queue f j qui s’emboîte
dans la barre à poignée, & l’empêche de vaciller.
S’il n’y avoit point de garde-platine , 9 4 ,9 4 ,
PL VI. fig. 2. quand dans la trôifieme opération on
amene l’ouvrage fur les becs avec la vente des platines
, ce ventre viendroit frapper contre la preffequi
eft alors appliquée, 8t fe défîgureroit : mais le garde-
platine empêche ce choc ; il permet aiix ventres des
platines d’approcher affez de la preffe pour que l’ouvrage
foit bien amené fur les becs , mais non de la
frapper, en rencontrant lui-même affez-tôt pour prévenir
cet inconvénient, le bras de prejfe.
Il furvient en travaillant plufieurs acçidens, 8c il
y a plufieurs autres chofes à obferver , dont je vais
faire mention.
Lorfqu’il fe rencontre des noeuds dans la foie ou
qu'elle le caffe, on ne peut continuer l’ouvrage fans
faire ce que les ouvriers appellent une enture.
Pour enter, on étend bien fur les aiguilles la partie
du fil de foie qui tient à l’ouvrage , 8c l’on couche
l’autre partie, non pas bout à bout avec la première ;
mais on la paffe entre la cinq , la fept, &c. avant le
bout du fil qui tient à l’ouvrage ; en forte que le fil fe
trouve double fur ces cinq, fept aiguilles, & l’on
continue de travailler comme fi le fil étoit entier.
Tout bas fe commence par un ourlet, 8c voici
comment on s’y prend pour le faire. On paffe la foie
dans la tête de la première aiguille, & on l’y arrête
en la tordant ; on embraffe enlûite en-deffous les deux
fui vantes ; on la ramene en - deffus fur la première ;
puis on la paffe en-deffous, 8c on embraffe la quatrième
& la cinquième, fur lefquelles on la ramene, 8c
fur la trôifieme fous laquelle on la paffe, 8c on embraffe
la fixieme & la feptieme fur lefquelles on la
ramene, 8c fur la cinquième fous laquelle on la paffe
enfuite, 8c on embraffe la huitième 8c la neuvième*
8c ainfi de fuite.
Un bas n’eft pas par-tout de la même venue ; on eft
obligé de le rétrécir de tems en tems. Suppofons
donc qu’on ait à rétrécir d’une maille , on prend un
petit outil qu’on appelle poinçon , on s’en fert pour
porter la maille de la trôifieme aiguille fur la quatrième
aiguille , la maille de la fécondé fur la trôifieme ,
la maille de la première fur la fécondé, & la première
fe trouve vuide.
On demandera peut-être pourquoi on porte latroï-
fieme maille fur la quatrième aiguille, & non la première
fur la fécondé tout (ffun coup : puifqu’il faut
qu’il fe trouve deux maillesrfur une aiguille , pourquoi
donner la préférence à la quatrième ? Je répons
que c’eft afin que la lifiere foit plus nette ; car fi la
maille double le trouvoit au bord de la lifiere, elle
tireroit trop. Il faut même, fi l’on veut que la lifiere
ne foit pas trop ferrée, bien repouffer l’ouvrage en-
arriere , 8c ne pas accoller la platine avec la foie
quand on la jette.
Au refte on rétrécit d’une maille de chaque côté
du métier, de quatre rangées en quatre rangées, 8c
l’on ne commence à rétrécir qu’à un pouce au-deffus
de la façon, ou de cet ornement qu’on pratique au-
deffus des coins.
Il arrive quelquefois , après le coup de preffe
qu’un bec d’aiguille ne fe releve pas, mais demeure
dans fa chaffe : lors donc qu’on a cueilli & qu’on vient
à abattre l’ouvrage, il y aune maille qui n’ayant pas
été mife dans la tête de l’aiguille, mais ayant paffé
par-deffus, ne fera pas travaillée, 8c qu’il faudra relever
; il pourra même fe trouver plufieurs mailles
non travaillées de fuite. Pour les relever, voici comment
on s’y prendra : on faifira la derniere qui eft
bien formée à l’ouvrage, avec le poinçon, 8c on la
paffera dans la tête de la tournille ou d’une aiguille
emmanchée,puis on prendra avec le poinçon la bride
de deffus cette maille ; on paffera cette bride fur la
tournille : à-mefure qu’elle avancera le long du bec ,
la bonne maille fortira de deffous, & bien-tôt la bonne
maille fe trouvera entièrement fortie & fort loin
B A S
8u bec, 8c ia bride à portée de paffer défions. Ôn l’y
fera donc paffer ; puis quand elle y.fera, on preffera
avec le poinçon le bec de l’aiguille 8c l’on le tiendra
dans la chaffe ; cependant on tirera la tournille, ce
qui fera avancer fia bride dans la tête de la tournille
& paffer la bonne maille par-deffus le bec, alors la
maille fera relevée : on continuera de cette maniéré
s’il y en a plufieurs de tombées, traitant toujours celle
qui fe trouvera dans la tête de la tournille comme
la bonne , &la bride d’au-deffus comme Iajjiauvaife
ou comme la maille à relever ; 8c quand on en fera
à la derniere, on la mettra dans la tête de l’aiguille.
Voye^ cette manoeuvre , Planche III. du bas au rnetiery
figure 2 , 3 . On-entend par bride, la petite portion de
foie, qui au lieu de paffer dans la tête de l’aiguille,
a paffé par deffus, & n’a point été travaillée.
J’obferverai pourtant qu’il faut faire cette opération
en-deffous ou à l’endroit, c’eft-à-dire du côté
de l’ouvrage qui ne regarde pas l’ouvrier ; fans quoi
les mailles relevées formeront un relief à l’envers,
& par conféquent un creux à l’endroit.
Il arrive encore qu’il fe forme des mailles doubles ;
cet inconvénient arrive de plufieurs façons : s’il y a
quelque groffeur dans la matière, fi une aiguille a le
bec de travers, s’il y a quelque aiguille fatiguée qui
ne preffe pas , une aiguille n’aura point de maille 8c
fa voifine en aura deux.
Dans ce cas, de deux mailles on arrête la première
fous le bec de l’aiguille ; on fait tomber la fécondé ;
cette fécondé tombée, formera une bride qu’on relèvera
8c qu’on portera fur l’aiguille vuide.
Il y a encore des mailles mordues ; on entend par
une maille mordue, celle qui eft moitié dans la tête
de l’aiguille, moitié hors , ou qui eft à demi tombée.
On fait entièrement tomber la maille mordue, 8c on la
releve en plein.
Les ouvriers entendent par la tige du bas, ce pouce
d'ouvrage qui eft au-deffus des façons & fur lequel on
rétrécit.
Sur un métier de quinze pouces, on laiffe du milieu
d’une façon au milieu de l’autre , cinq pouces &
un quart. Si le métier a moins de quinze pouces, la
diftance du milieu d’une façon au milieu de l’autre
diminuera proportionnellement.
Quand on travaille la façon, on continue de ra-
petiffer d’une aiguille de chaque côté de quatre en
quatre rangées. Pour reconnoître les milieux des façons
> on fait un peu lever les deux aiguilles qui les
indiquent.
On fait ufage dans les façons de deux efpeces de
mailles, qui ne font pas de la nature de celles dont le
refte àabas eft tricoté ; ce font les mailles portées 8c
les mailles retournées* On entend par une maille portée
, celle qui fans fortir de fon aiguille, eft portée
dans la tête de celle qui la fuit immédiatement, qn
allant vers la gauche de l’ouvrier : 8c par une maille
retournée on entend celle qu’on fait tomber 8c qu’on
releve fur la même aiguille, de maniéré qu’elle faffe
relief à l’envers 8c creux à l’endroit du bas. Pour cet
effet on n’a , comme nous l’avons dit à l’oceafion des
mailles tombées, qu’à la relever du côté du bas qui
regarde l’ouvrier.
Les façons faites , il s’agit de partager les talons.
Pour cet effet on prend la maille des aiguilles qui mar-
quoient les milieux des façons, & on la jette fur les
aiguilles voifines, en allant à la gauche de l’ouvrier ;
puis on prend la maille de chacune des aiguilles voifines
de ces aiguilles vuides, en allant à droite, &
on la jette fur les aiguilles qui leur font Yoifines, en
allant auffi à droite.
On a donc en deux endroits de la largeur du bas
deux aiguilles vuides , qui partagent cette largeur en
trois parties.
On travaille ces trois parties avec trois fils de foie
B A S n t
fépafés, 8c qu’on jette chacun féparément. Jetter eft
fynonyme à cueillir.
De ces trois parties , celle du milieu eft pouf le
deffus dupié, 8c les deux autres font les deux parties
du talon. On travaille le deffus fans le rapetiffer.
Pour les parties du talon ,'on les rétrécit chacune
d ’une maille de fix rangées eh fix rangées ; 8c cette
maille on la prend à leurs extrémités ou aux côtés
qui doivent le réunir pour former la couture du ta»
Ion , ou fur la première & la derniere aiguilles pleines
, ou fur l’aiguille pleine la plus à droite de l’ouvrier
,8c fur l’aiguille pleine la plus à gauche ; car ce
n’eft-là que plufieurs maniérés différentesde défigner
les mêmes aiguilles*
On continue de rapetiffer ou rétrécir les parties
du talon de la maniéré que nous avons dit, jufqu’à
ce qu’elles n’ayent plus chacune que deux pouces 8c
demi. Alors on forme la pointe du talon, en retré-
ciffant ces deux parties de la maniéré fuivante. Pour
la partie qui eft à droite de l’ouvrier, on compte les
aiguilles pleines en allant de droite à gauche, 8c ori
jette la maille de la quatrième aiguille , fur la fixieme
aiguille ; la maille de la trôifieme aiguille auffi
fur la fixieme ; la maille de la fécondé aiguille fur la
cinquième , 8c la maille de la première aiguille fur la
quatrième , qui eft la feule qui refte vuide. Pour la
partie du talon qui eft à gauche, on compte les aiguilles
pleines , en allant de gauche à droite , 8c on
jette la maille de la quatrième aiguille , fur la fixieme
aiguille ; la maille ae la trôifieme aiguille pareillement
fur la fixieme ; la maille de la fécondé aiguille
fur la cinquième, 8c la maille de la première aiguille*
fur la quatrième qui eft, la feule qui refte vuide. Ort
continue ces rapetiffemens finguliers, trois, quatre,
cinq fois, félon la fineffe du bas, 8c cela de quatre
en quatre rangées.
# On finit les talons par une rangée lâche. Cette rangée
lâche fe fait en defcendant les platines, comme
quand on veut croifer , 8c en repouffant la barre à
moulinet avec le talon des ondes.
On avance enfuite fous les becs , en prenant bien
garde d’amener trop ; car on jetteroit le deffus du pié
en bas.
On a fait cette rangée lâche, afin de pouvoir, à
l’aide de la tournille , la divifer en deux 8c terminer
le talon. Pour cet effet, on prend la première maille
avec la tournille, 8c la maille fuivante avec le poinçon
; à mefure que la fécondé paffe fur le bec de la
tournille, l’autre fort de deffous la tête. Celle-ci eft
loin du bec, quand celle-là eft à portée d’entrer deffous.
On l’y fait donc entrer, 8c quand elle y eft, ou
preffe le bec de la tournille avec le poinçon; on tiré
la tournille, 8c la première paffe furie bec & forme
avec celle qui eft deffous , le commencement d’une
efpece de chaînette,qu’on exécute exactement, comme
quand on releve les mailles tombées ; avec cette
différence que les mailles tombées fe relevent dans
une direction verticale, 8cque cette chaînette fe forme
horifontalement.
Pour arrêter là chaînette , on fait fortir la derniere
maille qui eft fous la tête de la tournille, en avançant
la tournille ; on met le fil de foie à fa place : on
preffe enfuite le bec de la tournille ; on tire la tournille
, & la maille paffe fur le bec 8c par conféquent
le fil de foie à - travers elle. On recommence cette
opération plufieurs fois ; cela fait on jette bas les talons
fans aucun danger, 8c l’on continue le deffus du
pié.A
vant que d’achever le bas, j’obferverai que l’ort
pratique une rangée lâche, & fur cette rangée quelques
autres à l’ordinaire, toutes les fois qu’on veut
ôter un ouvrage de deffus le métier, fans donner lieu
aux mailles de s’échapper.
Lç deffus du pié s’acheve comme on l ’a commen