y avoit affeniblé dix frères. Albert, patriarche de Jë-
rufalem , donna en 1109 à ces folitaires une réglé
qui fut approuvée deux ans après pa rle pape Honore
III. 8c que le pere Pabebrock a fait imprimer.
En 11-38, le roi S/Louis revenant de la Terre-fainte ,
emmena avec lui quelques-uns de ces religieux , &
lès établit en France où ils ont fept provinces. Cet ordre
qui eft un des quatre mendians aggrégés à l’urii-
verfité de Paris, s’eft rendu célébré par les évêques,
les prédicateurs, 8c les écrivains qu’il a donnes à 1 E-
glife. L’habit des Carmes eft une robe noire , avec
un fcapulaire & un capuce de même couleur, & par-
deffus une ample chape & im camaii de couleur blan-
-che.il n’étoit pas autrefois de même. V ,Ba rr-es.L ordre
des Carmes fe divife en deux branches ; ceux de
l’ancienne obfervance, qu’on appelle mitiges » parce
que Tauftérité de leur réglé fut adoucie par Innocent
IV.& par Eugene IV. 8c qui n’ont qu’un general
auquel obéiffent quarante provinces , & la congrégation
de Mantoue qui a un vicaire général ; ÔC
l’étroite obfervance, qui a deux généraux, l ’un en
Efpagne, qui a huit provinces de ion obéiflance, 8c
l’autre en Italie, quia douze provinces en différentes
parties de l’Europe. Carmes déchaussés ou deschaux , ainfi ap-
pcllés parce qu’ils vont nud-piés ; c’eft une congrégation
religieufe établie dans le xvj. fiecle par fain-
te Thérefe ; cette fainte la remit dans fa première
aûftérité vers l’ an 1561. Elle commença par établir
fa réforme dans les couvens de filles, 8c la porta en-
fuite dans ceux des hommes, aidée dans ce deffein
par le pere Antoine de Jefus, 8c le pere Jean de la
Croix, religieux Carmes. Pie V . l’approuva ; 8c cette
réforme fut confirmée par Grégoire XIII. en 1*80.
Il y a deux congrégations de Carmes déchauffes, dont
chacune a fon général 8c fes conftitutions particulières
: l’une eft la congrégation d’Efpagne, divifée
en fix provinces ; l’autre eft la congrégation d’Italie,
qüi comprend tout ce qui ne dépend pas de l’Efpa-
grie. Ils ont quarante-quatre ou quarante-cinq couvents
en France, où ils font établis depuis 160 5 . ( G)
CARMELITES , nom d’un ordre de religieufes
réformé par fainte Thérefe. C ’eft un ordre extrêmement
auftere. (G)
CARMIN, f. m. ( Peinture & Chimie.') c’eft une
efpece de laque très-fine & fort belle , de couleur
rouge fort éclatante 8c précieufe, dont on ne fait
giiere d’ufage que dans la mignature & peinture en
détrempe. Comme elle n’a pas beaucoup de corps,
non plus que toutes les laques , on ne peut la glacer
fur le blanc.
Pour faire le carmin , prenez cinq gros de cochenille
, trente-fix grains de graine de chouan, dix-huit
grains d’écorce de raucour, 8c dix-huit grains d’alun
dé roche ; pulvérifez chacune de ces matières à part
dans un mortier bien net ; faites bouillir deux pintes
& demie d’eau de riviere ou de pluie bien claire dans
urt vaiffeau bien net, 8c pendant qu’elle bout verfez-
y le chouan , & le laiffez bouillir trois bouillons, en
remuant toûjours avec une fpatule de bois, & paffez
promptement par un linge blanc : remettez cette
eau paffée dans un vaiffeau bien lavé , 8c la faites
bouillir : quand elle commencera à bouillir, mettez-
y la cochenille, 8c la laiffez bouillir trois bouillons ;
piiis vous y ajoûterez le raucour, & lui laifferez faire
un bouillon : enfin vous y verferez l’alun , 8c vous
ôterez en même tems le vaiffeau de deffus le feu ;
vous pafferez promptement la liqueur dans un plat
de fàyence ou de porcelaine bien net, 8c fans pref-
fer le linge : vous laifferez enfuite repofer la liqueur
rouge pendant fept à huit jours, puis vous verferez
doucement le clair qui fumage, 8c laifferez fecher
le fond ou les feces au foleil dans une étuve ; vous
les ôterez enfuite ayec une broffe ou plume, 8c ce
fera du carmin en poudre très-fine 8c très-belle eft
couleur.
Remarquez que dans un tems froid on ne peut pas
faire le carmin, attendu qu’il ne fe précipité pas au
fond de la liqueur , mais fait une efpece de gelée &
fe corrompt.
La cochenille qui refte Bans le linge après avoir
paffé la liqueur , peut être remife au feu dans de
nouvelle eau bouillante, pour en avoir un fécond
carmin; mais il ne fera ni fi beau, ni en fi grande
quantité que le premier.
Enfin la cochenille qui refte dans le linge , 8c la
liqueur rouge qui fumage au carmin, peut fe meler
avec la teinture de bourre d’écarlate, pour en faire
la laque fine. Voye^i'arùcle Laque , 8c la fuite de
celui-ci. ^
Autre maniéré. Prenez trois chopines B eau bien
pure, c’eft-à-dire, trois livres pefant ; mettez - les
dans un pot de terre verniffé ; placez ce pot devant
un feu de charbon ; ajoûtez-y a-ufti - tôt un grain au
plus de graine de chouan : quand ce mélange bouillira
fortement, paffez-le par un tamis ferré,8c remettez
cette première eau dans le même pot fur le feu,
y ajoutant aufli-tôt deux gros de cochenille mefte-
que , & remuant le tout une fois avec une fpatule.
Quand ce nouveau mélange bouillira bien fort, ajoû-
tez-y un grain d’autour, 8c immédiatement enfuite
huit grains de creme de tartre pilée, autant de talc
blanc, 8c autant d’alun de Rome broyé ; laiffez bouillir
le tout pendant deux à trois minutes ; éloignez-le
enfuite du feu, 8c le laiffez refroidir fans y toucher ,
jufqu’à ce qu’il foit tiede, alors l’eau paroitra plus
rouge que l’écarlate : paffez-là tiede au-travers d’un
linge net un peu fin, dans un plat de fayence ; laiffez
le marc au fond du pot pour le paffer 8c preffer
à part dans un autre plat ; ce qui vous donnera le
carmin commun : laiffez repofer vos plats pendant
trois jours ; décantez-en l’eau, \e,carmin reftera au
fond des plats : faites-le fecher à l’ombre 8c à l’abri
de toute poufliere, 8c quand il fera fec, enlevez-le
avec une petite broffe ; vous aurez dix-huit à dix-
neuf grains de beau carmin, fans compter le commun.
Obfervez que le talc blanc doit être purifié de la
maniéré fuivante pour l’opération qu’on vient de
dire. Prenez du talc, calcinez-le dans un bon feu ,
jettez-les enfuite dans de l’eau, remuez 8e délayez
avec les mains ;>quand l’eau paroîtra blanche, enle-
vez-la avec une tàffe, 8c la paffez par un tamis dans
un grand vaiffeau, où vous la laifferez repofer pendant
deux heures ; le talc fe précipitera au fond du
vaiffeau, dont vous decanterez l’eau : faites fecher
ce fédiment , ce fera le talc dont vous employerez
huit grains au carmin.
Quoique les méthodes précédentes puiflent être
bonnes, nous confeillons au leéleur de donner la préférence
à celle qui fuit ; elle eft de Kunckel. Voici
comment cet auteur enfeigne à faire le carmin.
- « Prenez , dit-il, quatre onces de cochenille, une
» livre d’alun, de laine bien fine 8c bien nette une de-
» mi-livre, de tartre pulvérifé une demi - liv re, de
» fon de froment huit bonnes poignées ; faites bouil-,
» lir le fon dans environ vingt-quatre pintes d’eau,
» ou plus ou moins à volonté ; laiffez repofer cette
» eau pendant une nuit, pour qu’elle devienne bien
» claire ; 8c pour la rendre encore jplus. pure, filtrez-
» la : prenez un chauderon.de cuivre affez grand pour
» que la laine y foit au large ; verfez, deflu^la xpoitié
» de votre eau de fôn, 8c autant d’eau commune à
» proportion de la quantité dè laine que vous aurez
» à y faire bouillir ; mettez?y l’alun , le tartre ,-8c la
» laine ; enfuite vous ferez bouillir le tout.pendant
»deux heures, en obfe,ryant de remuer la laine de
» bas en haut ou de haut en bas, afin qu elle fe nettoyé.
» tôye parfaitement ; mettez la laine, après qu’elle
» aura bouilli le tems néceffaire, dans un filet, pour
» la Iaiffer égoutter : prenez pour lors la moitié qui
» vous refte de votre eau d#fon, joignez-y vingt-
» quatre pintes d’eau-comrtuine , 8c faites-les bien
» bouillir; dans le fort de la cuiffon mettez-y la co-
>> chenille pulvérifée au plus fin , mêlée avec deux
« onces de. tartre ; il faut remuer iàns ceffe ce mélan-
» ge.pour l’empêcher de fuir: on y mettra la laine,
» On l’y fera bouillir pendant Une heure 8c demie ,
» en obfervant de la remuer , comme il a déjà été
» dit;-lorfqu’elle aura pris couleur , on la remettra
» dans un filet pour égoutter; elle aura pour lors une
« belle couleur écarlate;
- » Voici la maniéré de-tirer la laque où le carmin
» de cette.laine ainfi colorée. Prenez environ trente-
» deux pintes d’eau claire , faites-y fondre affez de
».pôtafle pour en faire une lefîive fort acre ; purifiez
» cette leflive en la filtrant-*; faites-y bouillir votre
» laine jufqu’à ce qu’elle ait perdu toute fa couleur,
»8c foit devenue toute blanche, 8c que la lefiive fe
» foit chargée de toute fa teinture ; preffez bien vo-
*> treiaine, 8c paffez la leflive parla chauffe ; faites
» fondre deux livres d’alun dans de l’eau , verfez
» cette folution dans la leflive colorée ; remuez bien
» le tout ; par cette addition la leflive fe caillera 8c
» s’épaiflira ; repaffez-la à la chauffe, elle fortira tour
t e claire 8c pure : fi elle étoit encore chargée de
» couleur, il faudroit la mettre bouillir , 8c y ajoû-
» ter encore de l’alun diffous ; elle achèvera de fe
» cailler, & le carmin ou la laque ne paffera point,
» mais reftera dans la chauffe. On aura foin de ver-
» fer à plufieurs reprifes de l-’eau fraîche par-deffus,
» pour achever d’en ôter l’alun ou les fels qui pour-
» roient y être reftés : on fait fecher enfuite la cou-
» leur, qu’on réferve pour l’ufage , après l’avoir ré-
» duite en une poudre impalpable. Si dans l’opéra-
» tion on trou voit que l’eau fe fût trop diminuée par
» la cuiffon, il faudra bien fë garder d?y verfer de
» l’eau froide ; mais il faut dans ce cas n’y mettre que
»•de l’eau bouillante ».
Si on vouloit faire dû carmin à moins de frais , 8c
fans fe donner la peine de commencer par teindre la
laine, il n’y auroit qu’à faire bouillir dans la leflive
fufdite de la bourré tontiffe de drap écarlate, & procéder
en toutes chofes de la rhaniere qu’on vient de
décrire. Kunckel dit avoir fouvent fait ces deux opérations
, 8c toûjôiîrs avec fuccès. Voÿe^fes remarques
fur fart de La Verrerie <£Antoine Néri , liv. VII.
On contrefait le carmin avec du bois de Brefil ou
de Fernambouc ; on les pile pour cet effet dans un
mortier, on les met tremper dans du vinaigre blanc ;
on fait bouillir ces matières, 8c l’écume qui en vient
donne une efpece de carmin : mais il n’approche nullement
de la beauté de celui que nous venons d’indiquer.
On tire aufli une couleur rouge des grains de
kermès 8c de la garance. Voye{ l'art. Rouge. (—)
CARMINA, ( Géog.) île de l’Archipel, habitée
par des Grecs 8c des Turcs, qui ne s’occupent qu’à
la piraterie.
CARMINACH ou CARMINIAH , (Géog.) ville
d’Afie , dans la grande Tartane, dans la contrée de
Bochara. Long. 88. lat. 3^. 30.
CARMINATIF, adj. (Med.) nom que l’on a donné
à certains médicamens, qui ont la vertu d’expul-
fer les vents retenus dans la cavité de l’eftomac 8c
des inteftins. Quincy penfe que la promptitude avec
laquelle ces remedes agiffent, les a fait nommer car-
minatifs, qu’il tire du mot latin carmen ; vers ; parce
que l’on loiioit en vers tout ce qui paroiffoit furpre-
nant, 8c tenant du charme ou de L’enchantement. On
explique leur aftion par la raréfaâion de l’air arrêté
par une humeur vifqueufe, placée dans l’eftomac ou
dans les inteftins. Lorfque cette efpece de digue eft
Tome //,
tompiië par* quelque remède atténuant, alors l’air
fort avec explofion 8c occafionne du bruit par haut
ou par bas. Rien n’eft plus capable de produire cet
effet que les femences que l’on employé contre les
vents, 8c que l’on appelle carminatives : telles font les
femences d’anis, de fenouil, de perfil, & e . les eaux
diftillées de ces mêmes plantes ; l’infufion de leurs
fleurs, auxquelles on peut ajouter celles de camomille
, de mélilot, de matricaire 8c d’aneth. Leur nature
chaude les rend très-propres à raréfier l’air, 8c à faire
fur la membrane de l’eltomac 8c des inteftins , une
petite irritation, 8c un petit mouvement capable de
broyer ces humeurs vifqueufes , 8c d’en détruire la
ténacité. Voye^ Vent. (N )
CARMONE, (Géog.) ville d’Efpagne, dans l’An*
dàloufie. Long. 12. 2$. lat. 3 7 . 24.
CARMONS ou CORMONS, (Géog.) petite villô
d’Italie, dans le Frioul, près de la riviere d’Indri.
* C A R N A y C A R N E ou CARDINEA , f. %
( Myth. ) Déeffe révérée chez les Romains. Elle pré*
fidoit à la confervation de la fanté des parties intérieures
du corps, 8c à l’embonpoint des autres. On.
lui facrifioitle premier de Juin ; l’offrande étoit d’une
bouillie de farine 8c de lard. Il étoit encore de fon
miniftere d’écarter les efprits folets , qui tourmen-
toient les enfans au berceau. Voye^ Esprits.
CARNACIER, adj: QHifl. nat.) épithete qu’on
donne aux animaux qui le nourriffent naturellement
de chair. Voye{ Animal & Nourriture.
Les Phyficièns font en difpute fur la queftion, fi
l’homme eft ou n’eft pas naturellement carnacier : il
y en a qui prétendent que les fruits de la terre étoient
deftinés feuls à le nourrir ; 8c que ç’a été le befoin
dans quelques pays, 8c le luxe dans d’autres, qui les a
portés à fe nourrir des animaux auxquels ils ont tant
'de reffemblarice. Pythagore 8c fes leélateurs regar-
doient cette action comme une grande impiété, 8c
s’en abftenoient rigoureufement d’après l’opinion où
ils étoient fur la metempfycofe ; 8c les Bramines leurs
fucceffeurs continuent encore à en faire autant aujourd’hui.
Voye^ Abstinence, Brachmanes , &ck
La réflexion lur laquelle Gaffendi infifte le plus,
pour prouver que les hommes ne font pas naturellement
animaux carnaciers j c’eft la conformation de
nos.dents , dont il y en a plufieurs d’incifives 8c de
molaires ; aulieuque nous n’avons de femblables aux
animaux carnaciers , 8c propres à déchirer la chair ,
que les quatre canines ; comme fi la nature nous avoit
deftinés plutôt à couper des herbes , des racines, &c.
Cette raifon paroît affez foible. Mais on peut obfer-
v e r , que fi nous nousnourriffons de viandes, ce n’eft
qu’ aprës une préparation par coâion, 8c en la mangeant
foit bouillie, foit rôtie, &c. 8c qu’alors même,
fuivant que l’obferve le do&eur D rake, elle eft plus
difficile à digérer que toutes les autres nourritures ;
ce qui fait qu’on la défend dans les fievres 8c dans
d’autres indifpofitions : enfin que les enfans ont de
l’éloignement pour les viandes, jufqu’à ce que leur
palais ait été vicié par l’habitude ; 8c que la maladie
des vers à laquelle ils font fujets, ne vient que de ce
qu’on leur fait manger trop tôt de la viande.
Le do&eurWallis en apporte encore une autre preuve
: c’eft que les quadrupèdes qui broutent les plantes
, ont un long colum avec un ccecum à fon extrémité
inférieure, ou quelque chofe d’équivalant, qui
porte la nourriture de l’eftomac en en-bas par un
chemin fort long 8c fort large , par où la nature paroît
avoir eu en vue de rendre le paffage des nourritures
dans les inteftins plus lent, 8c de les y faire
arrêter plus long-tems ; au lieu que dans les animaux
carnaciers , on ne trouve point de ccecum , mais on
trouve en fa place un boyau plus court 8c plus grêle,
par où il eft évident que le paffage de la nourriture
doit fe faire plus promptement. Or le cæcum
S $ s s