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tiers de gommes , de refines , de bîUfflfiS , SC d au»
très fucs de végétaux.
Régné minerai. Des colle&ions de terres, de pierres
communes 8c de pierres figurées, de pétrification
, d’incruftations, de réfidus pierreux , 8c de fta-
laÛites : une très-belle fuite de cailloux, de pierres
fines, brutes, polies, façonnées en plaques, taillées
en vafes, &c. 6c de pierres précieut'es, de cryftaux ;
toutes fortes de fels & de bitumes, de matières minérales
& fofliles, de demi-métaux & de métaux. Enfin
une très-nombreufe colleûion de minéraux du
royaume , & de toutes les parties de 1 Europe , fur-
tout des pays du nord, des autres parties du monde,
8c principalement de l’Amerique. ,
Toutes ces collerions font rangées par ordre méthodique,
8c diftribuées de la façon la plus favorable
à l’étude de l’Hiftoire naturelle. Chaque individu
porte fa dénomination, 6c le tout eft place fous des
glaces avec des étiquettes, ou difpofé de la maniéré
la plus convenable. ( I )
* Pour former un cabinet d'Hftoire naturelle, il ne
fuffit pas de raffembler fans choix, & d’entaffer fans
ordre 8c fans goût, tous les objets d’Hiftoire naturelle
que l’on rencontre ; il faut favoir diftinguer
ce qui mérite d’être gardé de ce qu’il faut rejetter,
& donner à chaque chofe un arrangement convenable.
L’ordre d’un cabinet ne peut être celui de la
nature ; la nature affette par-tout un defordre fu-
blime. De quelque côté que nous l’envifagions , ce
font des maffes qui nous tranfportent d’admiration ,
des grouppes quife font valoir de la maniéré la plus
furprenante. Mais un cabinet d’Hiftoire naturelle eft
fait pour inftruire ; c’eft-là que nous devons trouver
en detail & par ordre, ce que l’univers nous préfente
en bloc. Il s’agit d’y expofer les thréfors de la nature
félon quelque diftribution relative, (oit au plus
ou moins d’importance des êtres, foit à l’intérêt que
nous y devons prendre, foit à d’autres considérations
moins favantes 8c plus raifonnables peut-être, entre
lefquelles il faut préférer celles qui donnent un arrangement
qui plaît aux gens de goût, qui intéreffe
les curieux, qui inftruit les amateurs, 8c qui infpire
des vûes aux favans. Mais fatisfaire à ces différens
objets, fans les facrifier trop les uns aux autres ; accorder
aux diftributions feientifiques autant qu’il
faut, fans s’éloigner des voies de la nature, n’eft pas
une entreprife facile ; 8c entre tant de cabinets d’Hiftoire
naturelle formés en Europe, s’il doit y en avoir
de bien rangés, il doit aufli y en avoir beaucoup d’autres
qui peut- être auront le mérite de la richeffe, mais
qui Sauront pas celui de l’ordre. Cependant qu’eft-
ce qu’une collection d’êtres naturels fans le mérite de
l’ordre ? A quoi bon avoir raffemblé dans des édifices
, à grande peine & à grands frais, une multitude
de productions, pour me les offrir confondues pêle-
mêle 8c fans aucun égard, foit à la nature des chofes,
foit aux principes de l’Hiftoire naturelle ? « Je dirois
» volontiers à ces Naturaliftes qui n’ont ni goût ni
» génie : Renvoyé^ toutes vos coquilles à La mer ; ren-
» de? a la terre fes plantes & fon engrais , & nettoye£
» vos appartemens de cette foule de cadavres , d'oifeaux,
» de poijfons, & d’infecles , f i vous n'en pouvei faire
» qu’un chaos où je n’apperçois rien de dftincl , qu’un
» amas où les objets épars ou entaffès ne me donnent au-
» cune idée nette & précife. Vous ne fave^pas faire va-
» loir l'opulence de la nature , & fa richeffe dépérit en-
» tre vos mains. Refte[ au fond de la carrière , taille[
» des pierres ; mais laijfe^ à d’autres le foin ordon-
„ ner l'édifice ». Qu’on pardonne cette fortie au regret
que j’ai de favoir dans des cabinets , même célébrés
, les productions de la nature les plus prétieu-
fes, jettées comme dans un puits : on accourt fur
les bords de ce puits , vous y fuivez la foule, vous
cherchez à percer les ténèbres qui couvrent tant de
raretés ; mais elles font trop épaiffes, vous vous fatiguez
envain, 8c ne remporterez que le chagrin d’être
privé de tant de richeffes, foit par l’indolence de
celui qui les poffede, foit par la négligence de ceux
à qui le foin en eft confié.
Nous n’aurions jamais fait, fi nous entreprenions
la critique ou l’éloge de toutes les collections d’Hiftoire
naturelle qui font en Europe ; nous nous arrêterons
feulement à la plus floriffante de toutes, je veux
dire le cabinet du Roi. Il me femble qu’on n’a rien négligé
, foit pour faire valoir, foit pour rendre utile
ce qu’il renferme. Il a commencé dès fa naiffance à
intereffer le public par fa propreté 8c par fon élégance
: on a pris dans la fuite tant de foins pour le compléter
, que les acquifitions qu’il a faites en tout genre
, font fur prenantes, fur-tout fi on les compare avec
le peu d’années que l’on compte depuis fon inftitu-
tion. Les chofes les plus belles & les plus rares y ont
afflué de tous les coins du monde ; & elles y ont heu-
reufement rencontré des mains capables de les réunir
avec tant de convenance , & de les mettre en-
femble avec tant d’ordre, qu’on n’auroit aucune peine
à y rendre à la nature un compte clair 8c fidele de
fes richeffes. Un établiffement fi confidérable & fi
bien conduit, ne pouvoit manquer d’avoir de la célébrité
, & d’attirer des fpe&ateurs ; aufli il en vient de
tous états, de toutes nations, & en fi grand nombre ,
que dans la belle faifon,lorfque le mauvais tems n’empêche
pas de refter dans les falles du cabinet, leur espace
y fuffit à peine. On y reçoit douze à quinze cents
perfonnes toutes les femaines : l’accès en eft facile;
chacun peut à fon gré s’y introduire , s’amufer, ou
s’inftruire. Lesprodu&ions de la nature y font expo-
fées fans fard, & fans autre apprêt que celui que le
bon goût, l’éîegance, la connoiffance des objets
dévoient fuggérer : on y répond avec complaifance
aux queftions qui ont du rapport à l’Hiftoire naturelle.
La pédanterie qui choque les honnêtes gens , 8c
la charlatanerie qui retarde les progrès delà fcience,
font loin de ce fanûuaire : on y a fenti par une im-
pulfion particulière aux âmes d’un certain ordre ,
quelle baffeffe ce feroit à des particuliers qui auraient
quelques collerions d’Hiftoire naturelle, de prétendre
s’en faire un mérite réel, 8c de travailler à enfler
ce mérite , foit en les étalant avec fafte, foit en les
vantant au-delà de leur jufte prix , foit en mettant
du myftere dans de petites pratiques qu’il eft toûjours
affez facile de trouver, lorfqu’on veut fe donner la
peine de les chercher. On a fenti qu’une telle conduite
s’accorderoit moins encore avec un grand établiffement
, oîi l’on ne doit avoir d’autres vûes que le
bien de l’établiffement, où en rendant le public témoin
des procédés qu’oh fuit, on en tire de nouvelles
lumières, & l’on répand le goût des mêmes occupations.
C ’eft le but que M. Daubenton , garde 8c
démonftrateur dix..c a b in e t du Roi, s’eft propofé, &
dans fon travail au cabinet même qu’il a mis en un lï
bel ordre , & dans la defeription qu’on en trouve
dans l’Hiftoire naturelle. Nous ne pouvons mieux
faire que d’inférer ici fes obfervations fur la maniéré
de ranger 8c d’entretenir en général un cabinet d’Hiftoire
naturelle ; elles ne font point au-deffous d’un
aufli grand objet.
« L’arrangement, dit M. Daubenton, le plus fa-
» vorable à l’étude de l’Hiftoire naturelle, feroit l’Or-
» dre méthodique qui diftribué les chofes qu’elle
» comprend, en claffes, en genres,& en efpeces ; ainfi
» les animaux , les végétaux, & les minéraux, fe-
» roient exactement féparés les uns des autres ; cha>
» que regne auroit un quartier à part. Le même or-
» dre fubfifteroit entre les genres & les efpeces ; on
» placeroit les individus d’une même efpece les uns
» auprès des autres, fans qu’il fut jamais permis de
» les éloigner. On verroit les efpeces dans leurs geri
»tes '8c les genres dans leurs claffes. Tel eft I’arfan-
» gement qu indiquent les principes qu’on a imagin
é s pour faciliter l’étude de l’Hiftoire naturelle;
» tel eft l’ordre qui feul peut les réalifer. Tout en
♦ » effet y devient inftru&if; à chaque coup-d’oeil,
» non-feulement on prend une connoiffance réelle
» de l’objet que l’on confidere, mais on y découvre
» encore les rapports qu’il peut avoir avec ceux qui
» .l’environnent. Les reffemblances indiquent le gen-
„ r e , les différences marquent l’efpece; ces caraûc-
»> res plus ou moins reffemblans, plus ou moins dif-
» férens, 8c tous comparés enfemble, préfentent à
» l’efprit & gravent dans la mémoire l’image de la
» nature. En la fuivant ainfi dans les variétés de fes
. » produûions, on paffe infenfiblement d’un régné à
» un autre ; les dégradations nous préparent peu-à-
» peu à ce grand changement, qui n’eft fenfible dans
» fon entier que par la comparaifon des deux extrè-
» mes. Les objets de l’Hiftoire naturelle étant préfen-
» tés dans cet ordre, nous occupent affez pour nous
» intéreffer par leurs rapports, fans nous fatiguer,
» 8c même fans nous donner le dégoût qui vient or-
» dinairement de la confufion 8c du defordre.
» Cet arrangement paroît fi avantageux, que l’on
» devroit naturellement s’attendre à le voir dans tous
,, les cabinets ; cependant il n’y en a aucun où l’on
» ait pû le fuivre exaftement. Il y a des efpeces &
» même des individus qui, quoique dépendans du
» même genre & de la même efpece, font fi dif-
» proportionnés pour le volume, que l’on ne peut
» pas les mettre les uns à côté des autres ; il en eft
» de même pour les genres, 8c quelquefois aufli pour
» les claffes. D ’ailleurs on eft fouvent obligé d’inter-
» rompre l’ordre des fuites ; parce qu’on ne peut pas.
*> concilier l’arrangement de là méthode avec la con-
»venance des places. Cet inconvénient arrive fou-
» vent, lorfque l’efpace total n’eft pas proportionné
»au nombre des chofes qui compofent les collec-
» rions: mais cette irrégularité ne peut faire aucun
» obftacle à l’étude de l’Hiftoire naturelle : car il n’eft
»pas poflïble de confondre les chofes de différens re-
» gnes & de différentes claffes ; ce n’eft que dans le
» détail des genres & des efpeces, que la moindre
» équivoque peut, caufer une erreur.
» L’ordre méthodique qui, dans ce genre d’étude,
» plaît fi fort à l’efprit, n’eft prefque jamais celui qui
» eft le plus avantageux aux yeux. D ’ailleurs, quoi-
» qu’il ait bien des avantages, il ne laiffe pas d’avoir
» plufieurs inconvéniens. On croit fouvent connoî-;
» tre les chofes, tandis que l’on rien connoît que les
» numéros 8c les places : il eft bon de s’éprouver
» quelquefois fur dés collerions, qui ne fuivent que
>» l’ordre de la fymmétrie & du contrafte. Le cabinet
» du Roi étoit affez abondant pour fournir à l’un &
» à l’autre de ces arrangemens ; ainfi dans chacun des
» genres qui en étoit fuiceptible, on a commencé par
» choifir une fuite d’efpeces, & même de plufieurs
» individus, pour faire Voir les variétés aufli-bien
» que les efpeces confiantes ; 8c on les a rangés mé-
» thodiquement par genres & par claffes. Le furplus
» de chaque colïeûiona été diftribué dans les endroits
» qui ont paru le plus favorables, pour en faire un
» enfemble agréable à l’oe il, 8c varié par la différen-
» ce des formes 8c des couleurs. C’eft-là que les ob-
», jets les plus importans de l’Hiftoire naturelle font
» préfentés à leur avantage; on peut les juger fans
» être contraint par l ’ordre méthodique, parce qu’au
» moyen de cet arrangement, on ne s’occupe que des
» qualités réelles de l’individu, fans avoir égard aux
» caraderes arbitraires du genre & de l’efpece. Si on
» avoit toûjours fous les yeux des fuites rangées mé-
» thodiquement, il feroit à craindre qu’on ne le laiffât
» prévenir par la méthode, 8c qu’on ne vînt à négii-
p ger l’étude de la nature, pour fe livrer à des eon-
Tome //.
» ventiohs auxquelles elle n’a fouvent que très-peu
» de part. Tout ce qu’ôn peut raffembler de fes pro-
» duérions, dans un cabinet tThifioire naturelle, de-
» vroit y être diftribué dans l’ordre qui approcheroit
» le plus de celui qu’elle fuit, lorfqu’ellé eft en liber-
» té. Quoique contrainte, on pourroit encore l’y re-
» connoître-, après avoir raffemblé dans un petit ef-
» pace des productions qui font difperféës au loin fur
» la terre ; mais pour peu que ces objets foiént nom-
>» breux, on fe croit obligé d’en faire des claffes,
» des genres & des efpeces, pour faciliter l’étude de
» leur hiftoire : ces principes arbitraires font fautifs
» pour la plûpart; ainfi il ne faut les fuivre rangés
» méthodiquement, que comme des indices qui con-
» duifent à obferver la nature dans les collections où
» elle paroît, fans prefqu’aucun autre apprêt que
» ceux qui peuvent la rendre agréable aux yeux. Les
» plus grands cabinets ne fuffiroient pas, fi on vouloit
» imiter fcrupuleufement les difpofitions & les pro-
» greffions naturelles. On eft donc obligé, afin d’évi-
» ter. la confufion, d’employer un peu d’art, pour
» faire de la fymmétrie ou du contrafte.
»Tant qu’on augmente un cabinet d'hiftoire natu-
» rel, on n’y peut maintenir l’ordre qu’en déplaçant
» continuellement tout ce qui y eft. Par exemple ,
» lorfqu’on veut faire entrer dans une fuite une ef-
» pece qui y manque, fi cette efpece appartient au
>» premier genre, il faut que tout le refte de la fuite
» foit déplacé, pour que la nouvelle efpece foit mife
» en fon lieu. . . . . Quoique ce genre d’occupa-*
» tion demande de l’attention, & qu’il emporte toû-
» jours beaucoup de tems, ceux qui font des collec-
» tions d’hiftoire naturelle ne doivent point le négli-
» ger : on ne le trouvera point ennuyeux, ni même
» infruClueux, fi on joint au travail de la main l’ef-
» prit d’obfervation. On apprend toujours quelque
» chofe de nouveau en rangeant méthodiquement
» une collection ; car dans ce genre d’étude plus on
» voit, plus on fait. Les arrangemens qui he font faits
» que pour l’agrément, fuppofent aufli des tentati-
,» ves inutiles ; ce n’eft qu’après plufieurs combinai-
» fons qu’on trouve un réfultat fafisfaifant dans les
>» chofes de goût : mais on eft bien dédommagé de la
» peine qu’on a eue par le plaifir qu’on reffent, lorf-
» qu’on croit avoir réuffi. Ce qu’il y a de plus defa-
>, gréàble font les foins que l’on eft obligé de pren-
>, dre pour conferver certaines pièces fujettes à un
» prompt dépériffement ; l’on ne peut être trop at-
» tentif à tout ce qui peut contribuer à leur confer-
» vation, parce que la moindre négligence peut être
» préjudiciable. Heureufement toutes les pièces d’un
„ cabinet ne demandent pas autant de foins les unes
,, que les autres, 8c toutes les faifons de l’année ne
j » font pas également critiques.'
» Les minéraux en général ne demandent qüe d’ê-
» tre tenus proprement,-& de façon qu’ils ne puiffent
» pas fe choquer les uns Contre les autres ; il y en a
», feulement quelques-uns qui craignent l’humidité ,
» comme les tels qui fe fondent ailément, & les py-
» rites qui fe fleuriffent, c’eft-à-dire qui tombent en
» pouffiere. Mais les animaux & les végétaux font
» plus ou moins iiijets à la corruption. On ne peut
» la prévenir qu’ en les defféchant le plus qu’il eft
» poffible, ou en les mettant dans des liqueurs pré-
» parées ; dans ce dernier cas, il faut empêcher que
» la liqueur ne s’évapore ou ne fe corrompe. Les
» pièces qui font defféchées demandent encore un
» plus grand foin ; les infedes qui y naiffent & qui
»» y trouvent leurs alimens, les détruifent dans l’in-
» térieur avant qu’on les ait apperçûs. Il y a des vers,
» des fearabées, des teignes, des papillons, des mi-
» tes, 6*c. qui s’établiffent chacun dans les chofes qui
» leur font le plus convenables ; ils rongentles chairs,
» les cartilages, les peaux, les poils, & les plumes,