Cette précaution de preffer à chaud l’étoffe moirée >
fait tenir l’onde plus long-tems; fans la preffe, l’humidité
agiroit tellement lur les ondes, qu’elle les ef-
faceroit dans les envois qu’on fait au loin des étoffes
moirées. On preffe tous les draps à plaque chaude,
excepté l’écarlate.
Il s’enfuit de ce qui précédé, que la moire n’eft ni
un effet du travail de l’étoffe, ni un effet de la teinture
; que ce n’eft autre chofe que les différentes im-
prelîions des plis de l’étoffe fur elle-même; ces plis appliqués
fur l’étoffe par unpoids immenfe , en écrafent
le grain en zig-zag, & forment en entraînant le rouleau,
ces ondes ou refleâs de lumière qui frappent
ii agréablement les yeux. Le maflif de pierre u s t ,
V S T, eft ordinairement de vingt-fix à vingt-fept mille
livres pefant : on le pouffe à la calendre royale jufqu’à
quarante mille.
Pourtabifer, on plie en deux, mais on ne fait
point de zig-zag ; on le contente de bien rouler l’étoffe
fur elle-même , & de bien ferrer les tours les uns
fur les autres. L’étoffe étant foible, fi on la mettoit
en zig-zag comme pour moirer, elle ne pourroit foû-
tenir l’impreflion des plis appliqués par le poids, fans
s’érailler & même fe déchirer. Quand on preffe les
étoffes tabifées, c’eft à froid ; on obferve feulement
d’en féparer chaque lit par les planches.
Mais foit moire, foit tabis, les étoffes ne paffent
qu’une nuit fous la greffe.
Les belfamines qui font fil & foie fe tabifent feulement.
On ne met les damas, fur fil à.la calendre que
pour les unir, leur donner plus d’oeil, les faire paroî-
tre ferrés, & les alonger. L’alongemenf eft de trois
aunes fur quarante, félon toutefois que la chaîne h ete
plus ou moins tendue , & la trame plus ou moins
frappée. Les étoffes de Paris, les fatins fur coton ,
la papeline , s’étendent à la calendre : mais quand
cette derniere eft déroulée, elle fe remet dans le
même état : ce qui eft commun à toutes les étoffes
en laine. Il y a des camelots qui fe moirent, mais
c ’eft à force de calendre & de preffe à feu. On calendre
les toiles à carreaux & les toiles de'coton; les toiles
de coton, pour les faire paroitre ferrées. Les toiles à
carreaux s’étendent beaucoup & ne fe remettentpas.
La calendre écrafe les fleurs des fiamoifes à fleurs &
d’autres étoffes figurées, & les empêche d’avoir du
relief. Les fiamoiles à raies font expofées à un inconvénient
fous la calendre, c’eft de faire ferpenter leurs
raies. On donne à ces étoffes & aux toiles à carreaux,
dix à douze .tours, eh deux reprifes; après les fix
premiers tours, elles fe lâchent tellement fur le rouleau
qu’il faut les refferrer. On donne plus ou moins
de tours, félon que l’étoffe eft plus ou moins dure.
Les papelines ne fe preffent point ; il faut les tenir
roulées, afin qu’elles ne fe retirent pas. On preffe les
toiles à carreaux, à coton ; mais on obferve d’avoir
des ais & de les rouler deffus;” autant de pièces, autant
d’ais. Les fiamoifes & les toiles communes, fe
preffent feulement, cueillies ou faudées, c’eft-à-dire
plis fur plis.
Il n’eft permis qu’aux maîtres Teinturiers d’avoir
des calendres. On paye la moire deux fous par aune ;
les belfamines, un fou ; les tabis, fix blancs ou deux
fous; les autres étoffes, à peine un liard; les toiles
communes, un liard.
Les rouleaux dont on fe fert font de charme; ils
ont trois piés huit pouces de long , y compris les
pommes ou poignées, fur fix à fept pouces de diamètre.
Ils fervent tout au fortir des mains du tourneur
; ils ne font pas tous également bons : les filamenteux
& blancs font préférables aux durs & roux.
Ces premiers ne fe paîtriffent ni ne fe caffent,,S.’il arrive
à un rouleau de s’écraïer, il faut arrêter fur le
champ la calendre; fans cela, les fragmens du rouleau
çouperoient l’étoffe.
• Quand les pièces ont peu d’aunage, on les calent
dre les unes fur les autres ; le moins qu’on en puiffe
calendrer à la fois, c’eft douze ou quinze aunes, quand
elles ne fe doublent pas ; &c fept à huit aunes, quand
elles fç doublent ou plient en deux. Toutes les étoffes
ne fe ferrent pas fur le rouleau également bien.
Quand on les apperçoit lâches, il faut les dérouler.
Pour empêcher les pièces de fe décharger les unes fur
les autres, ou on les fait feules, ou on les fépare par
des papiers blancs fur le même rouleau. Quand oa
a des rouleaux neufs, il eft à propos de les faire travailler
d’abord avec des pièces qui foient en largeur
de toute la longueur de ces rouleaux. Il arrive d’en
perdre jufqu’à vingt, trente, quarante en une fe-
maine.
Lorfqu’on s’apperçoit qu’il fe forme un bourlet à
l’étoffe moite, ou qu’étant feche & la calendre gliffant
deffus, le rouleau fe dérange, on le remet en place
avec une mailloche ; ce qui s’appelle en terme de
l’a r t, châtier le rouleau.
Mais la maniéré dont on fait mouvoir la maffe
M N , n m, avec fa charge, n’eft pas la feule qui foit
en ufage. Il y a des calendres où la piece de bois MN,
ntn y eft toute plate, comme on voit même Pl.fig. 3«,
La table inférieure eft terminée à fes deux extrémités
G g en plans inclinés; il y a à la maffe us t ,U S T >
deux anneaux P p ; il paffe dans ces deux anneaux
deux crochets R r; ces crochets font attachés aux
extrémités de deux cables, dont l’un fe roule fur
l’arbre X X z quand l’autre fe développe, on fait tourner
l’arbre X IXy par la grande roue T T , dans laquelle
des hommes montent, tantôt d’un côté, tantôt
de l’autre ; ce qui fait aller & venir la maffe M N x
nm y avec fa charge & fes rouleaux L l qu’elle preffe ;
quand on veut retirer les rouleaux, on fait avancer
la maffe M N, nm, versl’une.des extrémités de la table
G g , jufqu’à ce que la partie de cette maffe, qui
correfpond à un des plans inclinés, étant plus lourde
que l’autre , & l’emportant en haut, comme on voit
dans la figure, elle n’appuie plus deffus le rouleau.
Il y a à Paris deux calendres royales, la grande &
la petite ; la grande a fa table inferieure d’un marbre
bien uni, & la fupérieure .d’itne plaque de cuivre
bien polie : la petite a les deux tables de fer ou
d’acier bien poli ; au lieu que les calendres ordinaires
des Teinturiers n’ont que des, tables; de bois.
Avant M. Colbert il n’y iavoit point de calendre ea
France ; c’eft à l’amour que ce grand miniftre âvoit
pour les arts & pour les machines utiles, que nous
devons les premières calendres.
On prétend que la calendre à rpue eft meilleure que
la calendre à cheval y parce qu’elle-a le mouvement
plus égal & plus uni ; refte à favoir fi un peu d’irrégularité
dans le mouvement eft un defavàntage,
quand il s’agit de former des ondes fur une étoffé. ;
CALANDREUR, f. m. ( Commerce. ) c’eft âirifi
qu’on appelle dans quelques manufactures, l’ouvrier
qui met les étoffes fous la calendre.
CALENDRIER, f. m. (Hi/l. & A fron f c’eft une
diftribution de tems accommodée aux ufages. de la
vie ; ou bien c’éft une table ou un almanach qui contient
l’ordre des jours, des femaines, des mois,.des
fêtes, &c. qui arrivent pendant le cours dé.l’année.
Voye{ T ems , Année, Mois <5* Fête.
Il a été appelle calendrier, du mot calendes, que l’on
écrivoit anciennement en gros caraCteres au commencement
de chaque mois. Voyeç Calendes.
Le calendrier romain , qui eft, encore en ufage
doit fon origine à Romulus : mais depuis il a fui» différentes
réformes. Ce légiflateur ftiftribua le tetris én
différentes périodes, pour l’ufagé du peuple qui vi-
voit fous fon gouvernement: mais comme il étoit
beaucoup plus verfé dans la guerre que dans les matières
agronomiques, U nç divifa l’année qu’en dix,
mois,,
«lois oui étoient alternativement de trente-un & de
trente jours : elle commençait le premier de Mars ; &
Romulus croyoit qu’au, moyen de cette diltabunon
l ’année recommençait toujours au pnntems , s imaginant
que leFoleil parcourait toutes les faifons dans
Pefpace de trois cents quatre, jours, au lieu qu’en effet
il s’en falloit foixante-un jours que cette’ année ne
s’accordàt.avec la vraie année foiairc. I
Le calendrier de Romulus fut réformé par Numa ,
qui y ajouta deux mois de plus, Janvier & Février,
qu’il plaça avant le mois de Mars, De plus Numa ordonna
que le mois de Janvier aurait vingt-neuf jours,
Février vingt-huit, & les,autres mois alternativement
trente-un & vingt-neuf, excepte Août & Septembre,
qui en avaient vingt-neuf chacun ; de maniéré
que l’année de Numa çonfiftoit en tra« cents
cinquante-cinq jours, & commençait au premier de
Janvier. Il s’en falloit dix jours par an, & quaranteun
jours au bout de quatre ans, que cette annee ne
s’accordât avec le cours du foleil ; & l’année gre-
qffe lunaire, qui étoit de trois cents cinquante-quatre
jours, donnoit en quatre ans quarante-cinq jours d’erreur.
Cependant Numa , à l’imitation des Grecs,
aima mieux faire une intercalation de quarante-cinq
jours , qu’il divifa en deux parties , intercalant un
mois de vingt-deux jours à la fin de chaque deuxieme
année, & à la fin de deux autres années fuivantes
un autre mois de vingt-trois jours. Il appella ce mois
ainii interpole , le macédonien ou le Février intercalaire.
- i i '
On ne fut pas long-tems fans s’appercevoir du defaut
de -cette intercalation, & on y ordonna une reforme.
Voye{ An .
Mais cette réforme étant mal obfervée par les pontifes
auxquels Numa en confia le foin, occafionna de
grands defordres dans la conftitution de l’année.
Céfar, en qualité de fbuverain pontife, tâcha d’y
remédier. Dans cette vue il s’adrefla à Sofigenes, célébré
aftronome de fon tems. Cet aftronome trouva
que la diftribution du tems dans le calendrier ne pourroit
jamais être établie fur un pié bien fur, fans avoir
auparavant obferve avec beaucoup de foin le cours
annuel du foleil ; & comme le cours annuel du foleil
ne s’acheve qu’en trois cents foixante-cinq jours fix
heures il reduifit l’année à ce même nombre de
jours. L’année de cette corre&ion du calendrier^ fut
line année de confufion ; caron fut obligé, afind’ab-
forber l’erreur de foixante-fept jours dans laquelle
on étoit tombé, & qui étoit caufe de la confufion,
d’ajouter deux mois outre le macédonien, qui fe trou-
voit avoir lieu dans cette même année ; de maniéré
qu’elle fut compofée de quinze mois, ou de quatre
cents quarante-cinq jours. Cette réformation fe fit
l ’an de Rome 708, quarante-deux ou quarante-trois
ans avant J-. C.
Le calendrier romain, que l’on appelle aufli calendrier
julien, du nom de Jules Céfar fon réformateur,
eft difpofé en périodes de quatre années. Les trois
premières années, qu’on appelle communes, ont
trois cents foixante - cinq jours ; & la quatrième,
nommée bijfextile, en a trois cents foixante-fix, à
caufe des fix heures qui, dans l’efpace de quatre ans,
compofent un jour. Il s’en faut a la vérité quelque
cho£ : en effet, après un efpace de cent trente-quatre
ans, il faut retrancher un jour intercalaire. Ce
fut pour cette raifon que le pape Grégoire XIII. fui-
vant les confeils de Clavius & de Ciaconius, ordonna
que la centième année de chaque fiecle ne feroit
point biffextile, excepté celle de chaque quatrième
tfiecle ; c’eft-à-dire que l’on feroit une fouftraâion.
de trois jours biffextiles dans l’elpace de quatre fie-
cles , à caufe des onze minutes qui manquent dans
les fix heures dont la biffextile eft compofée. Voyei Bissextile.
Tome II,
La réformation du calendrier, ou le nouveau ftyle ,
ainfi qu’on l’appelle en Angleterre, commença le 4
Ottobre 1582, où l’on retrancha tout-d’un-coup dix
jours qui, faute d’avoir tenu compte des onze minutes
, s’étoient introduits dans le comput depuis le
concile deNicéc en 315 : ce concile a voit fixé l’equi-
noxe pafchal au z 1 de Mars.,
Le calendrier julien des Chrétiens eft celui dans lequel
les jours de la femaine font déterminés par les
lettres A , B , C ,D , E , F ,G , au moyeu du cycle
folaire ; & les nouvelles & pleines lunes, particulièrement
la pleine lune de Pâque , avec la fête de
Pâque & les autres fêtes mobiles qui en dépendent,
par celui des nombres d’or, difpofés comme il faut
dans tout l’efpace de l’année julienne. Voye^ Nombre
d’or & Cycle solaire.
On fuppofe dans ce calendrier, que l’équinoxe d’automne
eft fixé au vingt-unieme de Mars ( V , Equinoxe)
, & que le cycle de dix-neuf ans, ou les nombres
d’o r , indiquent conftamment les lieux des nouvelles
& pleines lunes ; cependant l’une & l’autre de
ces fuppofitions eft erronée ( voye\ Cycle) : aufli
cette erreur fit naître une fort grande irrégularité
dans le tems de la Pâqye.
Pour, démontrer cette erreur d’une maniéré plus
évidente, appliquons cette méthode de; comput à
l’année 17 15 , où l’équinoxe du printems tomboit au
iode Mars, fuivant le vieux ftyle, & au z 1 , fuivant
le nouveau. La vraie pleine lune d’après l’équinoxe
tomboit au 7 d’Avril ; ainfi c’étoit trois jours trop
tard par rapport au cycle lunaire 5ou nombre d’o r ,
qui donnoit cette annee la pleine lune pafchale le. 10
d’Avril : or le 10 d’Avril fè trouvant un dimanche ,
la Pâque doit être remife au 17 , fuivant la réglé ;
ainfi la Pâque qui devroit être le dixième d’Avril,
ne feroit que le dix-feptieme. L’erreur confifte ici
dans la poft-polition de la pleine lune ; ce qui vient
du défaut du cycle lunaire. Si la pleine lune eût tombé
le onzième de Mars, Pâque auroit tombé le treizième
du même mois ; ainfi l’erreur qui vient de l’anticipation
de l’équinoxe , auroit exçeffivement aug- .
menté celle qui procédé de la poft-pofition. Voyeç
Métemptose.
Ces erreurs étoient fi multipliées par la fucceflion
du tems ,. que Pâque n’avoit plus aucune régularité
dans le calendrier. Ainfi le pape Grégoire X I I I . en
i}8z retrancha dix jours du mois d'O&obre, pour
rétablir l’équinoxe dans fa vraie place, c’eft-à-dire
au vingt-unieme de Mars^ Il introduifit de cette maniéré
la forme de l’année grégorienne, ordonnant
que l’on prendroit toujours l’équinoxe au vingt-unieme
Mars. Ce pape déclara qu’on n’indiqueroit plus
les nouvelles & pleines lunes parles nombres d’o r ,
mais par les épaêtes. Voye[ Ep acté. Cependant on
fuit encore aujourd’hui (en 1749) l’ancien calendrier
en Angleterre, fans cette correftion ; & c’eft ce qui
caufe une différence de onze jours entre le comput
des Anglois & celui de la plupart des autres nations
de l’Europe.
Le calendrier grégorien eft donc celui qui détermine
les nouvelles & pleines lunes, le tems de la Pâque ,
avec les fêtes mobiles qui en dépendent dans l’année
grégorienne, par le moyen des épaftes difpofées dans
les différens mois de l’année. | f
C’eft pourquoi le calendrier grégorien eft different
du calendrier julien , i°. par la forme de l’année (voy.
An) ; i° . par les épaftes qui ont été fubftituees au
lieu des nombres d’or : quant à leur ufage & à leur
difpofition, vcyc[ Epacte. f f
Quoique le calendrier grégorien foit préférable au
calendrier julien, il n’eft pas cependant fans défaut :
peut-être n’eft-il pas poffible, ainfi que le conjeâu-
rent Caflini & Tycho-Brahé , de porter ce comput
à une jufteffe qui ne laiffe rien à defirer ; car pre-
A iA .a a