feroient de moins au corps de l’armée. Tout teci efl
tiré des Mémoires de M. le marquis de Feuquieres.
Camp volant, eft un petit corps d’armée composé
de quatre , cinq ou fix mille hommes , & quelquefois
d’un plus grand nombre , d’infanterie & de
cavalerie, qui tiennent continuellement la campagne,
& qui font différens mouvemens pour empêcher
les incurfions de l’ennemi, ou pour faire échoiier
leurs entreprises , intercepter les convois , fatiguer
le pays voifin , & pour le jetter dans une place aflié-
gée en cas de befoin. (Q ) , .
Camp prétorien , (LLift. une.) c etoit chez les
Romains une grande enceinte de bâtiment, qui ren-
fermoit plufieurs habitations pour loger les foldats de
la garde , comme pourroit être aujourd’hui l’hôtel
des inoufquetaires du Roi à Paris.
C a m p , (Commerce.") Les Siamois, & quelques autres
peuples des Indes orientales, appellent des camps
les quartiers qu’ils aflignent aux nations étrangères
qui viennent faire commerce chez eux : c’eft dans
ces camps, où chaque nation forme Comme une ville
particulière, que fe fait tout leur négoce ; & c'eft-là
où non-feulement ils ont leurs magafins & leurs boutiques
, mais aufli où ils demeurent , avec leur famille
, & leurs fadeurs & commiflionnaires. Les Européens
font pourtant exempts à Siam, & prefque
par- tout ailleurs, de cette fujétion ; & il leur eft libre
de demeurer dans la ville ou dans les faubourgs,
comme ils le jugent à - propos pour leur commerce. fSS - H H 11 ■ CAMPAGNA, (Géog.) ville dItalie au royaume
de Naples, dans la principauté ultérieure. Long. 32.
47’ 41,
CAMPAGNANO, ( Gèog.) petite riviere d’Italie
au royaume de Naples, dans la Calabre citérieure.
CAMPAGNE, f. f. en terme de Guerre , lignifie l’ef-
pace de tems de chaque année que l’on peut tenir
les troupes en corps d’armée.
Les Allemands commencent leur campagne fort
tard , & attendent fouvent jufqu’après la moiffon :
les François ouvrent la campagne de bonne heure ;
ils la commencent quelquefois dès la fin de l’hy ver ;
& cette méthode leur eft fort avantageufe. Ce qui
doit décider de l’ouverture de la campagne, ce font les
moiflons : il faut ou de grands magafins pour la nourriture
des chevaux , ou que la terre loit en état de
pourvoir à leur fubfiftance ; ce qui ne fe peut guere
que vers le milieu du mois de Mai. Voy. Fourrage.
i o . Y ,
CAMPAGNE, ( Marine. ) faire une campagne ; on
entend fur mer par le mot de campagne, le tems que
dure un armement , foit pour faire* un voyage de
long cours, foit le tems que dure une croifiere , ou
celui qu’une armée navale peut tenir la mer. (Z )
Campagne , (Géog.) petite ville de France dans
l’Armagnac, fur la Douze.
Campagne de Rome, ( la ) Géog. province d’Italie
bornée à l’oiieft par la mer & le Tibre ; au fud
& à l’eft par la mer, l’Abruzze , & le pays de Labour
; & au nord par la Sabine.
C AM P A N E , f. f. terme d'Architecture , du latin
campana, cloche. On donne ce nom au corps du chapiteau
corinthien & de celui du compofite, parce
qu’ils reffemblent à une cloche renverfée : on l’appelle
aufli vafe ou tambour , & le rebord qui touche
au tailloir fe nomme levre.
C ampane , ornement de fculpture en maniéré de
crépines , d’où pendent des houpes en forme de
clochettes pour un dais d’autel, de throne, de chaire
à prêcher, comme la campane de bronze qui pend
à la corniche compofite du baldaquin de S. Pierre
de Rome.
Campane de comble , ce font certains ornemens
de plomb chantournés & évuidés qu’on met au bas
du faîte d’un comble, comme il s’en voit de dorés
au château de Verfailles.
Campanes , voyei Gouttes. (P )
Campane , ouvrage de Boutonnier; c’eft une efpe-
ce de crépine ou de frange faite de fil d’or, d’argent
ou de foie, qui fe termine par en-bas d’efpace à autre
par de petites houpes femblables à des clochettes ■
ce qui leur a fait donner le nom de campane, quj
vient du mot latin campana.
Quoique les marchands Merciers vendent dans
leurs boutiques des houpes & campanes coulantes
ou arrêtées , montées fur moules & bourrelets
noiiées & à l’aiguille > il n’y a cependant que les
maîtres Paffementiers-Boutonniers qui ayent la faculté
de les fabriquer, fuivant l’article vingt-troi-
fieme de leurs ftatuts du mois d’Avril 1653.
Campane , tirage des foies ; c’eft le nom que les
Piémontois ont donné à une des roues principales de
la machine à tirer les foies. Voye{ à l'article Soie ,
le tirage des foies.
( CAMPANELLA , ( Philofophie de ). Campanella
étoit de Stilo, petite ville de la Calabre : il prit l’habit
de S. Dominique à l’âge de treize ans. On l’accufa
d’héréfie ; c’eft pourquoi les juges de l’inquifition le
tinrent en prifon pendant vingt-cinq ans. Le pape
Urbain VIII. obtint fa liberté. Il vint à Paris en 1634,
& le cardinal de Richelieu , qui avoit une eftime
particulière pour les favans , lui fit de grands biens.
Il mourut à Paris en 1639, âgé de 71 ans, après une
grande mélancholie, & un dégoût extraordinaire.
Campanella fe croyoit fait pour donner à la Philofophie
une face nouvelle : fon efprit hardi & indépendant
ne pouvoit plier fous l’autorité d’Ariftote , ni
de fes commentateurs. Il voulut donner le ton à fon
fiecle ; & peut-être qu’il en feroit venu à bout, s’il
n’eût fallu que de l’efprit & de l’imagination. On ne
peut nier qu’il n’ait très-bien apperçû les défauts de
la philofophe fcholaftique, & qu’il n’ait entrevû les
moyens d ’y remédier : mais fon peu de jugement &
de folidité le rendirent incapable de réuflir dans ce
grand projet. Ses ouvrages remplis de galimathias ,
fourmillent d’erreurs & d’abfurdités : cependant il
faut avouer qu’il avoit quelquefois de bons intervalles
; & on peut dire de lui ce qu’Horace difôit
d’Ennius :
Cum Jlueret lutulentus , erat quod tollere velles.
On afltire qu’il prétendoit connoître la penfée d’une
perfonne , en fe mettant dans la même fituation
qu’elle, & en difpofant fes organes à-peu-près de la
même maniéré que cette perfonne les avoit difpofés.
Ce fentiment de vroit paroître bien fingulier ; fi on ne
favoit qu’il n’eft pas néceflaire, pour prendre plaifir
à mettre au jour des cjiofes extraordinaires , de les
croire véritables ; mais qu’il fuffit d’efpérer que le
peuple les regardera comme des prodiges , & que
par leur moyen on paffera foi-même pour un prodige.
Dialectique de Campanella. Pour mettre les lecteurs
en état de fe former une idée de l’efprit phi-
lofophique de Campanella , nous allons mettre ici fes
fentimens.
1. La diale&ique eft l’art ou l’inftrument du fage,
qui lui enfeigne à conduire fa raifon dans les feien-
ces.
2. La Logique fe divife en trois parties , qui répondent
aux trois aôès de l’entendement, la conception
, le jugement, & le raifonnement.
3. La définition n’eft pas différente du terme : or
les termes font ou parfaits ou imparfaits.
4. Les termes font les femences, & les définitions
font les principes des fciences.
ç. La Logique naturelle eft une efpece de partie
cipation de l’intelligence de Dieu même, par laquelle
nous
nous fommes raifonnables : la Logique artificielle eft
l’art de diriger notré efprit par le moyen de certains
préceptes.
6. Les termes font les lignes de nos idées.
7. Le genre eft un terme qui exprime une fimili-
tude eflentielle qui fe trouve entre plufieurs êtres
communs.
8. L’efpece eft un terme qui exprime Une fimilitu-
de eflentielle entre plufieurs individus.
9. La différence eft un terme qui divife le genre,
& qui conftitue l’efpece.
10. La définition eft un terme complexe, qui renferme
le genre & la différence.
11. Le propre eft un terme qui lignifie l’état particulier
des chofes.
12. L’accident eft un terme qui lignifie ce qui n’eft
point elfentiel à un être.
13. La première fubftance, qui eft la bafe de tout,
& qui ne fe trouve dans aucun fujet, c’eft l’efpace
qui reçoit tous les corps : en cefens Dieu eft une fubftance
improprement dite.
14. La fubftance eft un être fini, réel, fubfiftant
par lui-même, parfait, & le premier fujet de tous
les accidens.
1 <. La quantité, qui eft le fécond prédicament,
eft la mefure intime de la fubftance matérielle ; &
elle eft de trois fortes; le nombre, le poids, & la
maffe ou la mefure.
16. La divifion eft la réduâion d’un tout dans fes
parties, foit qu’on regarde le tout comme intégral,
ou comme quantitatifs ou comme effentiel, ou comme
potentiel 9 ou comme univerfel.
17. Il y a plufieurs maniérés de définir, parce qu’il
y a plufieurs maniérés d’être.
18. Dieu ne peut point être défini, parce qu’il n’a
qu’une différence négative.
19. La defeription eft un difeours qui indique l’ef-
fence d’une chofe par des propriétés, par des effets,
& par des fimilitudes.
20. Le nom eft un terme qui lignifie proprement
Vejfence des chofes; & le verbe eft un terme qui lignifie
Vaction des chofes.
21. L’argumentation eft l’a&ion par laquelle l’efprit
va de ce qui lui eft connu à ce qui lui eft inconnu
, pour le connoître, le déclarer, & le prouver.
22. Les fens font le fondement de toutes les fciences
humaines.
23. Le fyllogifme efteompofé de deux propofi-
tions, dans l’une defquelles le trouve le fujet de la
conclu lion, & dans l’autre l’attribut de la même
conclufion.
24. L’induftion eft un argument qui conclut du
dénombrement des parties au tout.
25. L’expofition eft la preuve d’une propofition,
par d’autres propofitions plus claires & équipol-
lentes.
26. L’enthimème eft un fyllogifme tronqué, dans
lequel on foufentend ou la majeure ou la mineure.
27. La fcience confifte à connoître les chofes par
leurs caufes.
Voilà ce qu’il y a de moins déraifonnab'le dans la
Logique de Campanella : le leéteur eft en état de juger
s’il eft ou plus clair ou plus méthodique qu’Arif-
tote, & s’il a ouvert une route plus aifée & plus courte
que cet ancien philofophe.
Phyfique de Campanella. 1. Les fens font la bafe de
la Phyfique : les connoiffances qu’ils nous donnent
font certaines, parce qu’elles naiffent de la préfence
même des objets.
2. L’effence d’une chofe n’eft point différente de
fon exiftence ; ce qui n’a point d’exiftence ne peut
avoir d’effence.
3. Ce qui exifte phyfiquement, exifte dans un
lieu.
Tome II,
4. Le lieu eft la fubftance première : elle eft {pi*
rituelle, immobile, & capable de recevoir tous le$
corps4
5 i II n’y à point de vuide, parce que totls les corpS
fentent, &c qu’ils font doués du fens du taél : mais il
eft poflible qu’il y ait du vüide par violence.
6. Le tems eft la durée fucceflive dés êtres : c’eft
la mefure du mouvement, non pas réellement, mais
feulement dans notre penfée.
y. Le tems peut mefurer le repos, & on peut le
concevoir fans le mouvement ; il eft çompofé de parties
indivifibles d’une maniéré fenfible : mais l’imagination
peut le divifer fans fin.
/ 8. Il n’eft point prouvé que le tems ait commencé
: mais on peut croire qu’il a été fait avec l’ef-
pace.
9. Dieu mit la matière au milieu de l’efpace, & il
lui donna deux principes aftifs, favoir la chaleur &
le froid.
10. Ces deux principes orit donnétiaiflance à deux
fortes de corps : la chaleur divifa la matière & en fit
les deux : le froid la condenfa, & en fit la terre.
11. Une chaleur violente divifa fort Vite une portion
de matière, & fe répandit dans les lieux que
nous appelions élevés : le froid fuyant fon ennemie
étendit les d eu x , & fentant fon ipipuiffanCe, il réunit
quelques-unes de fes parties, & il brilla dans cd.
que nous appelions étoiles.
12. La Lune eft compofée de parties qui ne brillent
point par elles-mêmes, parce qu’elles font engourdies
pa'f le froid de la terre ; au lieu que les deux
étant fort éloignés du globe terreftre, & n’en craignant
point le froid, font remplis d’une infinité d’étoiles.
13. Le Soleil renferme une chaleur fi confidérable,"
qu’il eft en état de fe défendre contre la terre.
14. Le Soleil tournant autour de la terre & la combattant
, ou il en divife les parties, & voilà de l ’air
& des vapeurs ; ou il la diflout, & voilà de l’eau ; ou
il la durcit, & il donne naiffance aux pierres : s’il la
diflout & la durcit en même tems, il fait naître des
plantes ; s’il la diflout, la durcit ,& la divife en même
tems, il fait naître des animaux.
15. La matière eft invifible, & par conféquent
noire.
16. Toutes les couleurs font compofées des ténèbres
, de la matière, & de la lumière du Soleil.
17. La lumière eft une blancheur v ive : la blancheur
approche fort de la lumière ; enfuite viennent
le rouge, l’orangé, le verd, le pourpre, &c.
18. Les cieux ne font point fujetsà la corruption ,
parce qu’ils font compofés de feu, qui n’admet point
les corps étrangers, qui feuls donnent naiffance à la
pourriture.
i9.Ilyadeuxélémens, favoir le Soleil & la terre,
qui engendrent toutes chofes.
20. Les cometes font compofées de vapeurs fub-
tiles, éclairées par la lumière du Soleil.
21. L’air n’eft point un élément, parce qu’il n’engendre
rien, & qu’il eft au contraire engendré par le
Soleil; il en eft de même de l ’eau.
22. La différence du mâle & de la femelle ne vient
que de la différente intenfité de la chaleur.
23. Nous fommes compofés de trois fubftances,
du corps, de l’efprit, & de l’ame. Le corps eft l’organe
; l’efprit eft le véhicule de l’ame ; & l’ame donne
la vie au corps & à l’efprit.
Voilà une très-petite partie des principes & des
opinions qu’on trouve dans les ouvrages de Campanella
fur la Phyfique. Il eft fingulier qu’un homme
quife donnoit pourlereftaurateur de la Philofophie,
n’ait pas pris plus de foin de déguifer fes larcins. Il
fuffit d’avoir une connoiffance médiocre des fentimens
philofophiques des anciens & des modernes.
D D d d