On entend par la lame, un morfceau deferrplàt,
tlcftiné-à être roulé ou tourné fur une longue broche
, & à former le tube ou canal du canon.
La broche fait ici la fonfti'on d’une bigorne. C ’eft
fur elle que fe fait l’opération la plus délicate, celle
de fouder le canon, ou la lame roulée , félon toute
fa longueur. On conçoit que ü cette foudurepeche
en quelque endroit, l’effort de la poudre ne man-
quera pas d’ouvrir le canon dans cet endroit ; 6c que
n ie défaut fe trouve malheureufement à la partie
inférieure du canon qu’on appelle le tonnerre , lé
moindre accident qui puiffe en arriver à celui qui
s’en fert, c’eft d’avoir un bras, une main emportée.
Il eft des Arts dont la bonne -police devroit interdire
l’exercice à tout mauvais ouvrier, & o ù les
bons ouvriers font plus particulièrement obligés à
ne point faire de mauvais ouvrages. Un ouvrier en
canon de fulil qui s’eft négligé dans fon travail, s’eft
expofé à un homicide. Il n’en eft pas d’un canon de
fufil ainfi que d’un couteau, d’un cifeau, d’une montre
, &c.
Pour que la foudure foit bien faite, il eft enjoint
à l’ouvrier de donner les chaudes de deux pouces
en deux pouces au plus. S’il les donnoit moins fréquentes
& fur plus de longueur, quelques portions
de matière fe refroidiffant avant que d’être travaillées
au marteau, ou ne fouderoient point, ou fou-
deroient mal.
Lorfque le canon aura été foudé fur la broche de
l’un à l’autre bout, l’ouvrier obfervera avec attention
, s’il n’y eft pas refté d’éventures ou crevaffes,
ou de travers. Les travers font des efpeces de crevaffes
tranfverfales, qui viennent du défaut de la matière.
S’il y remarque quelqu’une de ces défeftuofi-
-tés, il rapportera en cet endroit des lames de fer
enchâffées en queue d’aronde, 6c au lieu de la troi-
fieme chaude douce , il reffoudra le canon depuis un
-bout jufqu’à l’autre ; cette reffoudure eft même très-
bonne à pratiquer, foit qu’il y ait eu des éventures
ou non. Elle achèvera de refferrerhs pores de l’é-
•toffe, & de rendre le canon de bon fervice.
Cela fait, le canon fera forgé. Il s’agit maintenant
de le forer; car on le doute bien que fa furface tant in-
-térieure qu’extérieure au fortir de la forge, doit être
très-inégale. Le canon fera foré par vingt forets au
moins, qui augmenteront le calibre peu-à-peu ; mais
au lieu de l’inftrument appellé la mouche, qui a une
efpece de ramafTe, & qui ne peut pas rendre un canon
égal de calibre, il eft ordonné de fe fervir d’une
meche ou outil quarré de la longueur de douze à
quatorze pouces, fur laquelle on appliquera une ételle
de bois, qui couvrira les deux carnes de la meche ;
à chaque fois que l’on paffera la meche dans le canon
, on rehauffera l’ételle de bois par une bande
de papier mife entre elle & la meche; ce qui fervira
à enlever les traits du foret, & à rendre le canon égal
dans l’ame, & du calibre preferit.
Voyez Planche première de la fabrication des canons
, la perfpe&ive d’une ufine dont on voit le plan,
Planche II. A eft un bac qui fe remplit d’eau par le
moyen du tuyau ou de la cannelle B , qui aboutit
par fon autre extrémité dans un réfervoir ou courant
qui conduit de l’eau, dont la chute fur les aubes d’une
grande roue fixée fur l’arbre, de la roue D , fait
tourner cette roue. On a pratiqué deux rainures dans
l’épaiffeur de la roue D , propres à recevoir deux
cordes; l’une de ces cordes, après s’être croifée, fe
rend fur la poulie E , & la fait tourner. La poulie E ,
fixée fur l’arbre F , fait tourner cet arbre , 6c avec
cet arbre, la roue G , la meule H 6c le quarré / , dans
lequel eft adapté le foret L. La roue G , porte une
corde qui le croile 6c fe rend fur la roue M ; la roue
M, foit tourner l’arbre N , la meule O , le quarré P
& le foret Q , qui y eft adapté. Cet équipage forme
la moitié d’une ufine, toile que font celles de St. Etienne
en Forés. Si l’on imagine une corde qui paffe fur
la fecopde rainure de la roue D , & qui fe rende fur
une roue placée de l’autre côté, 6c telle que la roue
G) on aura l’ufine entière»
Chacune des roues M occupe deux ouvriers ; l’un
s’appelle le foreur, l’-autre le femeur. Le foreur eft placé
dans la foffe R ; il adapté dans le quarré P , le foret
qui convient. Il applique fon canon à ce foret. Le canon
eft porté dans une pieee échancrée T , qui l’em-
brafle. Une fermeture S , le contient dans l’échan-
crure de la piece T. Le foreur dirige le canon, & fait
fuCcéder les forets les uns aux autres, jufqu’à ce que
le canon foit du calibre qui convient. Le femeur eft
couché fur la planche V , & c’eft lui qui réduit le canon
fur la meule O , à fes proportions extérieures. "
Lorfque le canon eft foré, on en vérifie le calibre
avec un dé ou mandrin long de trois pouces, tourné
, trempé, poli, 6c du diamètre de fept lignes trois
quarts. On paffe ce mandrin dans le canon de l’un à
l’autre bout. Le femeur a deux calibres, l’un de feize
lignes jùftes, 6c l’autre de huit lignes & demie pour
vérifier les bouts du canon; c’eft en femant le canon,
c’eft-à-dire en le mefurant exactement avec ces deux
calibres , que le femeur lui donne à l’extérieur la
forme de cierge qu’il doit avoir.
On conçoit aifément que le foret ne peut travailler
au-dedans d’un canon, fans qu’il s’y faffe un
grand frotement& une chaleur capable de le détremper
; c’eft pour obvier à cet inconvénient qu’on a
pratiqué les rigoles C , x ,y , qui portent de l’eau vers
toutes les foffe s, Sc arrofent l’endroit oit la fermeture
foûtient le tanon, & où la pointe 6c les carnes du
foret agiffent. Les meules H, O , tournent dans des
auges qui font aufli pleines d’eau qui les rafraîchit.
L’ouvrage du femeur n’eftguere moins délicat que
celui du forgeron ; c’eft lui qui dreffe le canon , 6c
qui lui donne cette diminution d’épaiffeur, qu’il faut
conduire avec tant de précifion, de la culaffe à la
bouche, pour rendre le canon jufte. Il faut un grand
nombre d’années pour former un excellent ouvrier
en ce genre.
Le canon du fufil grenadier ou de foldat, eft rond,
& n’a qu’un feul pan qui prend de la culaffe , 6c va
finir à trois pouces du guidon. La longueur du canon
eft de trois piés huit pouces juftes.
Le diamètre entier à l’arriere ou à la culaffe eft dé
feize lignes. Le diamètre entier fur le devant ou à la
bouche eft de huit lignes 6c demie, 6c le calibre de
fept lignes trois quarts, afin que la balle des dix-huit
à la livre ait fuffilamment de vent.
Suivant cès dimenfions, l’épaiffeur du fer à la culaffe
doit être de quatre lignes & un huitième de ligne
, & l’épaiffeur du fer à la bouche, de trois huitièmes
de ligne.
Il eft enjoint de faire la culaffe double & bien
jointe deffus 6c deffous ; la queue épaiffe de trois lignes
proche du talon, venant au bout à deux lignes;
6c le talon de deux lignes 6c demie d’épaiffeur pàr-
deffous, allant au-deffus à la largeur du pan du canon,
fur fix à fept lignes de haut. La vis de la platine
de derrière, paflant au-travers du talon , il fera
ouvert en forme de fourche, afin que le canon fe
démonte, fans ôter la vis. Il n’y aura que la vis de
la queue à lever.
La tête de la culaffe fera de huit lignés de haut,
6c la lumière fera percée à fept lignes de derrière ;
par conféquent latête de la culaffe fera entaillée d’une
ligne du côté de la lumière, & reftera plate par
le bout.
On n’a pû régler la hauteur de là.culaffe par le
nombre de fes filets, ces filets étant plus gros ou plus
fins les uns que les autres : mais il faut avoir foin qu’ils
foient vifs & bien enfoncés. La queue dç la culaffe
aura
iiur'a’ J t e pô»tes'de longueur & fe terminera en
ovale. , . v , .»
II y aura un tenon aux canons ; il iera place a quatre
pouces du bout, 6c fe trouvera logé dans le fut
fous le prèmiqr anneau. Le guidon fêta aufli brafé à
vingt lignes juftes du bout. On y aura une attention
fingutiere , pour que les bayonettes des différentes
manufaûurès puifl'ent fe rapporter facilement. *
Les canons demi-citadelle ou de rempart feront fabriqués
comme nous l’avons preferit ci-deffus; ils
auront trois piés huit pouces de longueur : le diamètre
entier de la culaffe fera de dix-huit lignes. Le diamètre
fur le devant, ou la bouche, fera d’onze lignes
un quart, 6c le calibre de huit lignés un quart. Ils
auront comme ceux de grenadier , un tenon , 6c le
guidon en fera pofé à feize lignes du bout.
Le bouton de la culaffe aura la même hauteur, 6c
le talon la meme épaiffeur que la culaffe du fufil grenadier
; la lumière en fera aufli percée à la même
diftance,........................
’ Lci canons tant de rempart que de foldat feront
éprouvés horifontalement, avec leur vraie culaffe ,
couchés fur des chevalets,la culaffe appuyeecontre
ùrie poutre armée de barres de fer , ce qui arrêtant
le recul, rendra l’épreuve plus forte. Chaque canon
foûtiendra deux épreuves : la première fera une charge
de poudre du poids de la balle, bourree avec du
papier, & la balle par-deffus aufli bourrée ; la fécondé
fera d’un cinquième de poudre de moins , aufli
bourrée 6c de même la balle par-deffus.
La balle du fufil de foldat eft de dix-huit à la livre,
& la balle du fufil de rempart eft d’une once où de
feize à la livre.
Il eft rare qu’il creve des canons à la fécondé
épreuve : mais elle eft ordonnée, parce qu’elle ouvre
6c fait découvrir les éventures imperceptibles que la
première épreuve n’a point affez dilatées. Les canonséventés
font mis au rebut, ainfi que les canons
crevés.
Le canon tient au bois fur lequel on le monté, par
la vis de la culaffe, 6c par deux anneaux qui le joignent
au fut; l’un, au commencement, où il lert de
porte-baguette à queue ; 6c l’autre , vers le bout du
fût qu’il faifit avec le canon , & où il eft arrête au
moyen d’une petite lame à reffort, qui porte fa gou- I
pille encaftrée dans le côté du fût. Voye{ aux articles
Fusil , Platïne, &c. ce qui concerne le refte de l’ar-
me-à-feu, avec les dimenfions félon lefquelles M. de
Valliere , lieutenant général des armées du Roi, 6c
infpefteur des manufactures des armes, a réglé que i fes différentes parties fuffent toutes fabriquées.
Notre fabrique de canon de Saint-Etienne en Forés
eft très-confidérable, tant par la quantité d’armes qui
énfortent, que par la qualité qu’elles ont. Elle eft com-
pofée d’une multitude d’ouvriers qui ne peut guere
s’eftimer, que par celle des ufines conftruites fur les
bords de la Furenfe ; cette riviere fait tourner des
milliers de meules. Cependant comme elle manque
d’eau quelquefois, cela a déterminé quelques fabri-
cateurs à tranfporter les leurs fur la Loire. M. de
Saint-Perieux, gendre de M. Girard un de ceux qui
ont le mieux répondu aux vûes que M. de Valliere a
toûjourseues pour perfectionner la fabrication des armes
, a placé la fienne à Saint-Paul en Cornillon, à
deux lieues de Saint-Etienne. ;
Quelques artiftes ont imaginé de fouder plufieurs
canons enfemble, 6c d’en faire des fufils à plufieurs
coups. Les fufils à deux coups font communs. Il en
eft forti un à trois coups de la fabrique des nouveaux
entrepreneurs pour le Roi, remarquable par fa lege-
reté, fon méchanifme, fa fûreté, fon travail de forge
& de lime, 6c fes ornemens. Nous en ferons mention
à Y article FUSIL. Voye^l’article FUSIL.
Les canons n’ont pas tous la même forme exté-
Tomt ƒƒ,
r ieu rè ; il ÿ en a d é ronds ; il y en a à pans , o u ca n n
e lé s : le s uns fo n t unis ; d ’au tres fo n t c ife lé s . M ais
c e s o rnemens s’e x é c u ten t fu r le canon du fu f i l , com m
e fur to u t au tre o u v r a g e . Voye[ C i s e l e r & C a n *
n e l e r . O n a in v e n t é qu elq u e s ma ch in e s p o u r le s
pans & p o u r les canne lu res : mais e lle s n’o n t p as r é p
o n d u à l ’.efïet qu’ô n e n a t t e n d o it , 6c o n a é té o b lig é
d e le s ab an d onne r 6c d e s’en ten ir à la lime : il y a
d e s canons b rifé s ; des canons c a r a b in é s , &c. Voye£
la fuite de cet article.
Canon brisé , terme d ?A r q u e b u fie r ; c ’e ft un canon
q u i eft co u p é en d e u x p a r tie s au h au t du ton-4
n e r re ; la p a r tie fu p é r ieu r e e ft un é c r o u v i f l e , & fe
m o n te fu r le to n n e r re q u i e ft en v i s , de fa ç o n qu’ il s
fe jo ig n e n t e n fem b le , & fo rm en t e n -d effu s u ne fa c e
u n ie . C e s canons fo n t o rd in a irem en t ca ra b in é s ; il y
en a d è to u te s fo r te s d e g ran d eu r 6c d e groffeur*.
Voyei Fusil.
Canon carabiné , terme d.'Arquebufier. C é ca+
non fa it à l’ e x té r ieu r com m e les canons o rd in a ire s
e ft ta ro d é en-dedans dans to u te fa lo n g u e u r d e mou-4
lu r e s lo n g itu d in a le s o u c ir cu la ire s . L ’o n e ft o b lig é
dans ce s canons d’e n fo n c e r la b a lle a v e c u n e b a g u e tte
d e f e r , 6c d e l ’y fo r c e r ; c e s canons p o r te n t la b a l le
p lu s lo in 6c plus ju f t e . Voyelles articles MOUSQUET;
d* Fusil.
Petit CANON, (Fonderie en caractère d'Imprimerie.}
q u in z ièm e c o rp s des c a ra& e re s d’ im p rim e r ie ; fa p ro p
o r tio n e ft de q u a t re ligne s q u a t re p o in t s , m e fu re d e
l ’é c h e lle . Voye{ Proportions des Caractères
D’IMPRIMERIE , & Vexemple à l'article CARACTERES.
Gros Canon , che^ lis memes ouvriers, dix-fep-'
tieme corps des caraâeres d'imprimerie; fa proportion
eft de fept lignes deux points , mefure de l ’é-4
chelle. Voye[ Proportions des Caràct. d’Imp.
6c l'exemple à l'article CA R A C T ER E S .
Double Canon , che[ les mêmes , dix-huitième
co rp s des c a ra& e re s d ’ im p rim e r ie ; fa p ro p o r t io n eft-
de n e u f ligne s d e u x p o in ts , m e fu re d e l’é ch e lle . Voyeç.
Proportions des C aract, d’Imprim, 6c l'exemple
à Varticle C A RA CT ERES .
Triple Canon, encore cke^les mêmes, d ix -n e u v ie -
me co rp s des c a r a û e r e s d ’im p rim e r ie ; fa p ro p o r t
io n e ft d e d o u z e ligne s , me fu re d e l’ é c h e lle . Voyeç
Proportions des Caract. d’Imprim. 6cl'exemple
à l'article CARA CT ERES.
Canon , en terme de Chauderonnier , e ft un m o r c
e a u d e fe r à tê te la r g e & fo r é , q u e l ’o n a p p u ie
fu r la p ie c e ; à l ’en d ro it o ù o n la p e r c e . Voye{Pl. IL,
du Chauderonnier, fig. 8. q u i r ep r é fen te un o u v r ie r
q u i a p p u ie le canon c o n tr e une c u v e p en d an t q u e
l l r o u v r i è r fig y . p e r c e u n t ro u a v e c u n p o in ço n q u ’i l
ch a ffe a v e c u n m a r te au . La figure 18. d e l a m êm e
P lan c h e rep r é fen te le canon e n p a r t i c u lie r , 6c la. fig*
l y . u n e e fp e c e d e ta s q u i fe r t a u même u fa g e .
Canon , term e d ont le s Emailleurs fe f e rv e n t p o u r
fignifie r le s p lu s g ros m o r c e a u x o u file ts d ’ém a il qu’ils
tir en t p o u r le m e t tr e en é ta t d’ ê tre em p lo y é a u x d i - ,
v e r s o u v r a g e s d e leu r m é t ie r .
S u iv an t l'article xjx. desfiatuts des Emailleurs , i l
e f t défendu à to u te s p e r fo n n e s , ma rchand s o u a u t
re s , d e m ê le r a u c u n e fo r te d’ém a i l , 6c r e ten ir canon
p o u r v e n d r e , f i c e n’ e f ta u x m a ît res d u mé tie r. V i y e ç
Email & Emailleur.
Canon , parmi les Horlogers, fignifie u n e e fp e c e
d e p etit tu y a u , o u u n c y lin d r e c r eu x un p eu lo n g ,
p e r c é d e p a r t en p a r t. O n adapte des canons à d iffe rentes
p iè c e s o u ro u e s , p o u r q u ’ e lle s to u rn en t fu r
des arbres o u t ig e s fan s au cu n b e r c em e n t , 6c a u fli
p o u r qu’e lle s p u iffent y ten ir à fro tem en t : t e l e ft le
canon de la c h a u f fé e , c e lu i d e l a ro u e d e cadran-, &c.
Voye{ Chaussée , Roue de cadran, &c. & la Plan*
che des Montres. (T.)
Xl i i