St-Prex, à l’Aubonne, sur le plateau des Tranchées de Genève, à Tho-
non, etc. Ils ont été décrits d’abord par A. Morlot (') et les géologues
vaudois de son école, puis par M. B. Hausse, (2) par M. D. Colla-
don, (3) de Genève, puis enfin de la manière la plus complète pai
M. A. Favre. (4) '
Ces dépôts consistent en sables et en graviers parfaitement lavés,
sans traces d’argile ni de substance terreuse. Ils-sont stratifiés .en
couches où les grains ont des grosseurs différentes. L’apparence extérieure
de ces dépôts est caractéristique ; ils forment de véritables te rrasses,
quelquefois fort étendues, à surface supérieure presque horizontale,
très égalisée, qui viennent s’appuyer contre le plan incliné de la
terre ferme, et qui du côté du lac se terminent par un talus très abrupt de
3 0 à 35 degrés de pente. (5) Quant à la stratification de ces terrasses, elle
est celle que nous avons décrite pour les cônes d’alluvion torrentielle
dans le lac ; les couches profondes plongent du côté du lac suivant un
angle de 30 à 35° (36° d’après Morlot) ; un plan horizontal coupe ces
couches très inclinées e t les sépare des couches supérieures également
stratifiées, plongeant de même du côté du lac, mais extrêmement
peu inclinées, presque horizontales.
Ainsi que l’a parfaitement reconnu Morlot, ces terrasses sont des
cônes d’alluvion de rivières ou de torrents débouchant dans le lac,
alors que la nappe d’eau était à peu près à la hauteur du plan d’intersection
des couches presque horizontales et des couches très inclinées.
Les matériaux amenés par le torrent et versés dans le lac y tombaient
e n s’éboulant sur le -talus d’un m o n t qui s’avançait toujours plus
avant dans les eaux ; à mesure que le mont se développait plus avant
dans le lac, l’embouchure de l’affluent étant portée plus loin; la pente
du torrent sur son delta diminuait, les matériaux n’étaient plus charriés
jusqu’au lac, et de nouvelles couches déposées sur le delta ten-
(') A. V . Morlot. Notes diverses sur les terrasses diluviennes du Léman. Bull. S.
V. S. N. IV, 61,92, V. 280, Lausanne 1853-57.
P)B Dausse. Actes de la S. H. S. N„ 49» session. Genève 1865, p. 78. - Bull. soc.
géol. de France, 2« sér. XXIII, 149,1866, XXV, 752, WS68.
(3) D Colladon. Description de la terrasse .d’alluvion sur laquelle est bâtie la ville
de Genève. Arcb. de Genève, Sept. 1870. - Note sur les dépôts, de la^rivière d Arve,
ibid., oct. 1874. — Terrasses lacustres du Léman. Bull. S. V. h. N. XIV, boa.
(4) A. Favre. Recherches géologiques dans la Savoie. Paris 1867,1, 32. — Le canton
de Genève, etc., 1 ,162.
(5) Soit une pente de 58 a 70 %.
daient à rétablir la pente normale du lit de la rivière. D’après cela, les
couches horizontales doivent avoir leur maximum d’épaisseur au
sommet du cône d’alluvion : elles sont nulles au bord extérieur du delta.
On a ainsi, dans le plan de jonction des deux ordres de couches des
terrasses d’alluvion, un excellent témoin des anciens niveaux du lac ;
j ’estime que ce plan devait correspondre à la surface de la grève
inondée de l’ancien lac, et que la hauteur moyenne des eaux devait
être de quelque un à deux mètres plus haut que cette ligne de jonction.
Les graviers et sables, dont sont constituées les couches des te rrasses,
sont des matériaux d’origine alpine) c’est le mélange caractéristique
des roches variées qu’a opéré le transport glaciaire. Donc les
terrasses sont post-glaciaires ; c’est du terrain glaciaire remanié.
La belle disposition des couches de sable dans les terrasses et leur
stratification régulière, la répétition des terrasses au même niveau, en
diverses localités du pourtour du lac, montrent que ce n ’est pas un
dépôt torrentiel accidentel dans quelques étangs latéraux sur les flancs
du grand glacier. Les terrasses sont un dépôt fluvio-lacustre. Tout
dans leur ordonnance montre qu’elles ont été formées dans le lac
Léman lui-même, après qu’il eut été débarrassé des glaces du grand
glacier du Rhône; mais, de plus, alors qu’il avait un niveau supérieur
au niveau actuel. Ce niveau est indiqué par la .co te d’altitude de ces
terrasses, et l ’on peut reconnaître des étages successifs dans la hauteu
r du lac.
A une première époque la nappe du lac était de 25 à 30m plus élevée
que le niveau actuel. Cet état a duré fort longtemps, car pendant
ce* temps se sont déposées les vastes et amples terrasses des Tranchées
de Genève (altitude 403m), de Nyon (ait. 404m), de la Promen-
thouse, des Fontanettes, à gauche de l’Aubonne, la terrasse supérieure
du Boiron, près Morges (ait. 400.1m), etc. Cette terrasse est connue
sous le nom de terrasse de trente mètres.
Après ce dépôt, est survenue une baisse rapide du niveau du lac,
laquelle a été interrompue par un temps d’arrêt assez prolongé ; le lac
s’est arrêté à un niveau de 10m supérieur au niveau actuel, et cela pendant
assez longtemps pour former au Boiron, près Morges, une te rrasse
de 100m et plus de largeur.
Enfin, le lac s’est affaissé au niveau actuel.
Ces anciens niveaux du lac s’expliquent fort bien par l’existence
d ’un barrage au-dessous de Genève, formé par le plateau d’alluvion