très grandes largeurs ne sont représentées que dans lés côtes d’allu-
vion ; sur la côte d’érosion la grève n’a guère plus de 5 à 10m.
Le sous-sol de la grève est formé par la roche en place du terrain
primitif attaqué par l’érosion.
En quelques localités, on peut voir parfois le sous-sol à n u , lorsque
les vagues, au lieu d’amener des galets et des sables comme c’est leur
office ordinaire, .ont enlevé les matériaux de transport. C’est du reste
l’exception. Dans la règle, dans la grande majorité des cas, la grève
est recouverte d’une couche plus ou moins épaisse de galets, de graviers
ou de sables apportés par les vagues. Suivant les temps et les
lieux,, le sol de la grève est formé :
Ou bien de sables, quelquefois très fins, parfaitement lavés.
Ou bien de graviers distribués en zones, selon leur grosseur ; les
vagues effectuent un décantage mécanique qui porte plus ou moins
loin tel ou tel calibre de graviers.
Ou bien de cailloux ou galets constituant un pavé continu. Nous aurons
à décrire plus longuement cette formation à propos des té n e -
v iè r e s de la beine ; nous la notons simplement ici.
Ou bien de blocs erratiques; restes des- moraines dont les parties
meubles ont été enlevées par les vagues.
Ou bien de roches en place, calcaires, poudingues,'mollasses, marnes,
argiles, mises à nu par l’érosion.
Ou bien encore la grève est recouverte de monceaux plus ou moins
épais de poussières lacustres, débris de végétaux et d’animaux accumulés
par les vagues.
. Parfois sur la môme grève deux ou plusieurs types de sol peuvent
se trouver juxtaposés. •
Quant à leur origine, il y a lieu de distinguer entre les matériaux de
la grève :
Les roches en place, les blocs erratiques, les cailloux sont des parties
qui ont résisté à faction d’érosion du lac ; ils n’ont pas encore été
usés et amenuisés par le frottement mécanique et par la dissolution
chimique des eaux ; ils sont des témoins persistants de l’ancien sol qui
constituait la muraille du lac.
Les graviers et sables au contraire sont plutôt un terrain de transport
ou d’alluvion. Une partie d’entr’eux résultent bien, il est vrai, de
la trituration des roches en place et des anciens matériaux du sol,
mais la plus grande partie provient du transport des rivières. L’alluvion
que les affluents déposent à l’embouchure de leur delta est en
effet entraînée par le mouvement des vagues et promenée le long de
la grève ; elle est charriée souvent fort loin de la bouche du torrent et
est rejetée sur la grève. L’importance de ce dépôt torrentiel varie
d’une côte-à l’au tre ; elle décroît à mesure que l’on s’éloigne de la
rivière. Mais en général je puis attribuer à un transport de l’alluvion
torrentielle, remaniée par les vagues du lac, la majeure partie des sables
et graviers qui recouvrent la grève.
Je divise la grève en trois zones qui vont de l’extérieur à l’intérieur,
de la terre aü lac :
La g r è v e e x o n d é e I f (flg. 19), qui n’appartient jamais' au domaine
du lac, et n’est atteinte .et lavée que par les vagues de tempête.
La g r è v e in o n d a b le f h , zone intermédiaire qui aux basses eaux
est à sec et appartient alors au rivage, qui aux hautes eaux est inondée
et appartient alors àu littoral et par conséquent au lac.
La g r è v e in o n d é e h k , zone inférieure, qui même à l’étiage est
recouverte par les eaux, et fait partie permanente du domaine du lac.
La berne, k m (fig. 19). Au-delà de la grève inondée s’étend une te rrasse,
plus, ou moins large, so is une profondeur d’eau plus ou moins
grande, mais toujours remarquable par son horizontalité presque parfaite
elle ne s’approfondit pas ou presque pas et la sonde trouve presque
la même hauteur d’eau sur toute l a largeur du même profil de ce
banc de sable côtier. Je suis obligé d’introduire pour cette terrasse un
nom local, la b e in e , usité sur notre lac (>), par le fait que dans la langue
scientifique nous n ’avons aucune appellation qui désigne le fait
géographique sur lequel j ’attire l’attention des géologues. Cette
terrasse littorale immergée existe en effet sur toute côte des lacs et
des mers ; elle se développe plus ou moins partout où les vagues viennent
frapper une rive ; elle est l’un des éléments les plus caractéristiques
de la structure sous-lacustre ou sous-marine du littoral, et elle
mérite d’être étudiée partout où des eaux dormantes sont en contact
avec la terre ferme.
f1)1 Dans les lacs de la Suisse allemande la-beine est appelée dié_ Wysse, au lac
de Neucliâtel le blanc-fond. Le nom de terrasse littorale auquel j’avais pensé aurait
amené une confusion facile avec les terrasses Iluvio laouslies émergées, dans d’anciens
rivages, siu les boids d’un lac dont la nappe aqueuse s ’est affaissée ; j’aurais
dû y ajouter le mot immergée. Terrasse littorale immergée eût été bien compliqué
: le mot de beine est plus rapide et j’ose espérer qu’on voudra bien l’admettre.