C. L e s I le s . Sitôt après sa sortie du lac, le Rhône est divisé en
deux bras par deux îles qui partagent son courant.
1° L ’île d e s B a rq u e s , île d e s B e rg xu e s ou île R o u s s e a u ,
au milieu du port. C’était un îlot de sable sur lequel on a bâti un bastion
muré, en.1526. (*) Sa superficie est d’environ 1750m2.
2° L ’île de G e n è v e , de forme irrégulière allongée, de 310m de
long sur 65m de large, de 1 */» hectare de superficie, était primitivement
un banc d’argiles et de sables sur lequel s’appuyait, aux époques
helvéto-romaines, le pont dont parle Jules-César. Une tour est le seul
reste du château, bâti par Aymon de Grandson vers 1220. L’Ile est
couverte de maisons et de rues; ses bords, jusqu’à présent fort inégaux,
ont été régularisés en 1891 par la contraction de quais monumentaux,
sur lesquels va s’élever tout un quartier neuf. L’île de Genève
sépare le fleuve en deux bras qui sont désignés sous les appellations
de b r a s d r o it à l’ouest, du côté de St-Gervais, de b r a s g a u c h e à
l’est, du côté de la ville de Genève. La largeur des bras du fleuve a été
considérablement modifiée dans les dernières années. Je le montrerai
en donnant la largeur minimale, avant et après les travaux de la régularisation
du Rhône.
Avant 1880. Depuis 1888 .
Bras droit 27® 32“
Bras gauche 25m 38“
D. En aval dé l’île de Genève, les deux bras du Rhône se rejoignent
et forment un lit unique de 50 à 150m de large bordé à l’ouest par les
hautes falaises d’alluvion ancienne de St-Jean, à l’est par la plaine
basse de la q u e u e d ’A rv e .
La chute de l’eau dans la traversée de Genève a été mesurée par
MM. Pestalozzi et Legler aux hautes et basses eaux. (2) Ils ont trouvé
entre l’entrée du port, limnimètre A, et leur règle fluviométrique jR2,
située sur le Rhône, à la deuxième roue d’irrigation, rive gauche, à
1200“ aval du pont de la Machine :
Hauteur du lac: Chute de l’eau.
16 août 1873 2.44m ; 2.68“
30 mars 1874 0.78“ 3.02“
fl) Galiffe. Genève historique et archéologique, X, 144. Genève 1869. La plupart
des faits historiques que je vais citer sont tirés de cet ouvrage.
{-) Procès du Léman. Documents de l ’Etat de Yaud, pl.'XXI, Lausanne 1882.
E. L ’A rv e se jette dans le Rhône à 2 km en aval de l’île des Barques,
ou si l’on veut à 2.75k“ en aval du banc du Travers. L’Arve est une
grande rivière alpine à régime glaciaire qui agit puissamment sur le
Rhône, fleuve à régime lacustre. Son bassin d’alimentation, d’environ
2000km2, 0 plus du tiers de celui du Rhône au Bouveret, en fait une
rivière à débit considérable; la grande masse des glaciers du Mont-
Blanc qui y déversent leurs eaux, lui donne en été un volume d’eau
important; ses crues sont très irrégulières et souvent très fortes, et en
temps d’inondation elle charrie une masse d’eau énorme-et de grandes
quantité de galets. Son débit varie de 35 à 625“ 3 sec (E. Vallée), ou de
37 à 785“ 3 sec (P. Chaix) ; ou de 6 (2)~à 1136“ 3 scc (B. Baëff.), ou plus
exactement de 17 à 1136“ 3 soc (C. Butticaz).
Tandis que par les eaux basses et moyennes l’Arve n’agit sur le
Rhône qu’en salissant les eaux bleues et limpides que le fleuve emporte
loin du lac Léman, en temps de Crue et d’inondation, l’Arve a deux
effets sur le Rhône, qui se répercutent sur le régime du lac. Ses allu-
vions de graviers et de galets encombrent le lit du fleuve et tendent
à en altérer le canal ; il faut, après chaque crue de l’Arve, que le
fleuve se débarrasse par un lent charriage des matériaux qui envahissent
son lit. En second lieu, la masse même des eaux de l’affluent
barre le cours tranquille du fleuve, le fait refluer, et entrave son écoulement
normal vers l’aval. Lorsque l’Arve est en crue, le Rhône est
soulevé dans tout son parcours amont jusqu’aux barrages de Genève.
C’est ainsi qu’on a vu, dans l’inondation du 2-3 octobre 1888, alors
que l’Arve avait subi une crue dépassant en intensité celles des trente
dernières années, le Rhône, au-dessous des turbines jde la Coulouvre-
nière, élever son niveau de 2.05“ . On a même vu à diverses reprises,
dans les siècles passés, TArve s’élever assez pour refouler le Rhône,
le faire refluer dans le lac, et même, dans des cas extrêmes, déverser
ses eaux sales dans le lac. Cela a été noté entre autres :
(*) Plus exactement 1980 k"2 (Boné Baëff.)
(2) Nous corrigeons ici une erreur que nous avons imprimée page 380. Le débit
minimal de l’Arve, d’après les observations de M. Baëff, a été de 539 OOÛ“13 en 24 heures,
le 6 mars 1890, ce qui représente 6.21"3 scc,.et non 3.3m3 sec comme nous l’avons
dit par inadvertance. M. C. Butticaz, ingénieur des Eaux de Genève, estime trop
faible ce débit minimal de M. Baëff. Il a mesuré- directement par des jaugeages
complets le débit de l ’Arve en temps d’étiage, et n’est jamais arrivé à un chiffre
inférieur à 17m3sec, jaugeage du 17 février 1891.