perturbation atmosphérique dans le transport des couches supérieures
de l’air, du lac vers la terre, en suite de la contraction, par refroidissement,
des couches reposant sur le sol. Si ces dernières vues sont
exactes, le courant d’air inférieur serait un vent de refoulement, causé
par l’accumulation de l’air sur la terre ferme, et la brise devrait débute
r sur la terre. Le heu de l’origine de la brise de terre est donc intéressant
à constater, car il permettra de juger entre les deux théories.
Or le début du morget a toujours lieu sur la terre ferme et il se
propage de proche en proche sur lé lac ; je l’ai cent fois constaté dans
le golfe de Morges, les premières rides apparaissent subitement, par
bouffées, le long du rivage, et s’étendent progressivement en avant.
Le morget est donc un vent de refoulement et non un vent d’appel
G’est là un argument décisif en faveur des idées de Hann.
II. La b r i s e du lac, qui alterne dans la période journalière avec-le
morget, porte, sur le lac Léman, le nom dé r e b a t . Il souffle pendant
le jour, dé 10 à 4 heures, avec une intensité plus faible encore que
celle du morget ; on ne le voit presque jamais moutonner.
Le rebat débute en plein lac et se propage centrifugalement vers la
rive. On voit parfois, vers les 9 ou 10 heures du matin, le morget régner
encore le long du littoral et les premières bouffées du rebat se
dessiner déjà en avant. P ar le même raisonnement que nous avons
fait à propos du morget, nous en conclurons que le rebat est, lui aussi,
un vent de refoulement, et que son origine doit être cherchée dans
l’accumulation de l’air en plein lac, par le fait d’un courant supérieur
venant de la térre.
Nous venons de dire que les brises de période journalière, le morget
et le rebat, tels qu’ils soufflent dans le golfe de Morges, sont, d’après le
lieu de leur début, des vents de refoulement. Gela me permet de répondre
à la critique de M. J. Müller qui ne veut y voir que dés brises
de montagne. D’après la théorie de Hann, que M. Müller accepte, les
brises de montagne sont des vents d’appel, les brises lacustres des
vents de refoulement. Les brises du golfe de Morges, qui sont des
vents de refoulement, sont donc essentiellement des brises lacustres.
Si, pour les brises de montagne, nous admettons la théorie classique,
telle que je l’ai exposée, la brise montagnarde diurne est un vent
d’appe l,' la brise nocturne un vent de refoulement ; le lieu de départ de
ces brises doit donc être, dans les deux cas, dans la partie supérieure
ou moyenne de la vallée. Par conséquent le lieu de début de la brisé
nocturne ne peut nous servir à différencier la brj.se lacustre de la brise
montagnarde ; dans l’une et l’autre le départ a Jieu sur terre ferme.
Mais pour la brise diurne le point de début est décisif ; le rebat commençant
en plein lac et se rapprochant de la côte ne peut être un vent
d’appel, ne peut être une brise de montagne; c’est une brise lacustre.
Cette nature de brise lacustre, vraie pour le rebat, doit être vraie aussi
pour le morget qui est l’opposé du rebat dans la période journalière.
J’en conclus que les objections de M.J. Müller ne sont pas fondées et que
nous avons bien réellement des brises lacustres sur les bords du Léman.
Serons-nous aussi intransigeant que notre honorable contradicteur, et
dénierons-nous tout caractère de brises de montagne aux vents locaux
qui soufflent sur le lac dans certaines régions du Léman. Nous en aurons
garde. Il est fort probable que, sur les flancs inclinés des côtes abruptes
du Haut-lac, la brise de montagne s ’additionne à l’effet des brises
lacustres; que les deux causes se superposent et que le lac, d’une
part, dans son opposition thermique à la te rre ferme, la déclivité de la
montagne d’autre part, interviennent chacun pour son compte dans
la production de ces courants d’air alternatifs qui, pendant la nuit,
descendent vers le lac, pendant le jour remontent vers les hauteurs.
Pour différencier ces deux actions, il faudrait étudier à fond le caractère
des brises dans chaque golfe du la c , dans chaque vallon débouchant
sur le lac, ce qui serait certainement intéressant, mais nous entraînerait
à des développements hors de proportion avec le plan général
de notre liv re ; du reste les matériaux d’observation nous manqueraient
dans plus d’une région.
Je veux seulement indiquer ici une observation que je tiens de M.
A. Koch, de Morges, lequel connaît mieux que personne le régime du
Jura dans les environs de Nyon. Sur les flancs de la montagne la ,
brise descendante du soir, qui y porte le nom de j o r a n , a une telle
intensité « qu’elle empêcherait de charger un char de foin ». G’est
déjà là une force très supérieure à celle de nos brises lacustres du
golfe de Morges. Mais, en outre, ce joran si énergique ne s’étend que
peu au-delà du pied de la montagne, ne dépasse guère Gingins, Ché-
se re x , Trélex ; il n’arrive pas jusqu’au lac. Si donc sur les bords du
lac il souffle le soir un morget, ce n ’est pas une brise de montagne
venant du Jura, c’est une brise lacustre développée localement sur le
plateau inférieur, dans le voisinage du lac.