diculairement, là parallèlement àux poussées, et plus loin n’amenant
qu’un simple plissement sans rupture. Que, dans des bouleversements
comme ceux qui ont accompagné les grands phénomènes orogéniques
de la fin de l’époque miocène, il puisse y avoir une complication
d’actions aussi opposées, c ’est peut-être admissible. Mais ce qui ne l’est
pas, c’est que ces différentes crevasses, ruptures ou plissements, d’ordre
si disparate, arrivent à produire un bassin unique, en continuité
directe dans ses diverses parties, un seul lac comme le Léman. Ah ! si
notre lac était aussi bizarrement contourné et accidenté que le lac des
Quatre-Cantons, je n’aurais pas d’objection immédiate à admettre
une telle complication d’origine ; mais qu’un seul et même bassin
comme le Léman soit le résultat d’une combinaison d’actions aussi
opposées, ce n ’est pas plausible. Et cependant, quand on s’en tient à
l’hypothèse orographique, on est forcé d’y souscrire.
3° Quoi qu’il fût bien difficile de Comprendre comment des modes
de formation si divers auraient pu se juxtaposer à de si courtes distances,
comment des tensions, distensions, soulèvements et affaissements
des couches, auraient pu, les uns à côté des autres, produire
des effets si différents dans des régions si voisines, on pouvait encore
les admettre tant qu’on ne possédait pas la carte hydrographique
du lac. Mais celle-ci est venue donner le coup décisif à l’hypothèse
orographique. Elle a montré qu’il y a continuité dans la formation
du lac ; que tout le Grand-lac est certainement l’effet d’une- seule
et même action, car. il n ’y a à la jonction des diverses formations aucune
solution de structure, aucun accident reconnaissable ; les talus .et le
plafond se suivent sans saut, sans faille, sans déplacement latéral ou
vertical. Pour qui ne connaîtrait pas la carte géologique de la côte, il
ne saurait retrouver dans la carte hydrographique le lieu où se fait le
passage d’une formation à l’autre.
Le seul point où il y ait changement d’allures est aux limites du
Grand et du Petit-lac. Mais là encore nous avons constaté que le second
est la continuation directe du premier, que la rampe ascendante du
plafond du Grand-lac vient aboutir au col de la barre de Promen-
thoux et se continue en ligne directe dans le plafond du Petit-lac. Si,
sur la carte moderne, les côtes se rapprochent dans un détroit de Pro-
menthoux et si le fond se relève dans üne barre de Promenthoux,
nous avons constaté que les murailles du lac doivent échapper presque
absolument à cet étranglement ; que celui-ci est presque unique-.
ment formé d’un revêtement superficiel de terrains quaternaires ; que
le lac primitif, malgré ce point qui semble actuellement critique, était
un bassin d’un seul jet et d’une même venue.
On m’objectera peut-être que je néglige l’action des glaciers. Les
actions orographiques qui ont creusé le bassin du Léman ont déterminé
des ruptures de roches, des crevasses compliquées, qui donnaient
au lac primitif un relief probablement fort accidenté. Mais les
glaciers sont survenus qui ont poli, égalisé, usé les parties saillantes,
et ont transformé ces parois déchirées en une vallée uniforme et régulière.
Cette riposte ne me convainc pas. Je reconnais les effets d’aplanissement
des glaciers, ils sont incontestables; mais je constate en
tant de points, soit dans les vallons des glaciers actuels, soit dans les
vallées parcourues jadis par les grands glaciers quaternaires, des parties
saillantes, des éperons qui ont résisté à la puissante lune, au gigantesque
rabot des glaces en mouvement, que je demande à ne pas
exagérer leur action. Je rappellerai simplement, à nos géologues suisses,
l’éperon mollassique de la gare de Renens, ou le cap de calcaires
aquitaniens de la pointe de St-Sulpice ; ils montrent combien les glaciers
ont laissé de parties saillantes, même en des terrains remarquablement
friables, même au point où leur action devait être au maximum
; les deux localités que je cite sont en effet précisément dans
l’axe de la vallée dp Rhône; c’était là que le glacier devait venir frapper
avec le plus d’énergie.
L’étude de la carte hydrographique du lac Léman a jugé la question
de l’origine orographique du bassin. Elle m’a définitivement décidé
pour la négative.
4° Un dernier argument, et je m’en tiendrai là. La forme et les
grandeurs du profil en travers du lac parlent énergiquement contre
l’hypothèse orographique.
La coupe en travers du Haut-lac nous donne une vallée de 8km de
largeur, à talus inclinés de 15 à 30 %, coupés par un plafond horizontal
dans sa section transverse. Ce plafond est formé p ar le remplissage
des alluvions du Rhône ; nqus pouvons le supprimer par l’imagination
et supposer les talus se continuant en profondeur jusqu’à leur rencontre
à mille ou quinze cents m ètres sous la nappe du lac. La figure 30
donne à l’échelle du 100 000e, le profil du lac entre le signal de Chex-
bres (Ch) d’une part, et Meillerie (M) et Thollon (Th) d’autre part. Il
est bien difficile d’y voir les traits d’une vallée de fracture ; le point a