surexhausse au-dessus de la plaine primitive. Mais ce surexhaussement
n’est que temporaire. Le noyau qéntral continue à se contracter ;
il y a tendance à la formation d’un vidé qui devra être comblé ; pour
satisfaire à cette nécessité, l’écorce terrestre, ayant déjà perdu sa rigidité
par les plissements de la phase précédente, peut céder et se déprimer
; elle s’enfonce en exagérant peut-être ses plis primitifs, mais
surtout en diminuant d’altitude. A la phase d’exhaussement, due à
l’établissement des plis des montagnes, succède une phase d’affaissement
qui comble le vide résultant de la rétraction progressive du
noyau central. ¡¡|
Ce raisonnement me paraît fort juste. Je m’en empare pour les
théories qui nous occupent, et je dis que toute région montagneuse
doit présenter successivement les deux phases d’élévation et d’affaissement
: si le phénomène a lieu dans des régions suffisamment froides,
si l’exhaussement en porte les sommets au-dessus de la limite des
neiges, il y aura développement des glaciers ; la phase d’affaissement
fera diminuer les glaciers ; si l’affaissement ramène les montagnes
au-dessous de la limite des neiges, les glaciers disparaîtront. Les
conséquences de ces théories sont les suivantes :
1° L’époque glaciaire est un phénomène temporaire dû au soulève-
,ment des montagnes au-dessus de la limite des neiges; sa fin correspond
à la phase d’affaissement qui suit nécessairement l’exhaussement
primitif.
2° L’époque glaciaire est un phénomène local dû à des causes orogéniques,
et non un phénomène général dû à des Causes climatologi-
ques. Il peut y avoir coexistence ou succession dans l’époque glaciaire
de diverses chaînes de montagnes.
3° La genèse des lacs subalpins a pour cause seconde l’établissement
d’une contrepente sur le cours d’une vallée d’érosion lors de la
■ (!) D’après une nouvelle communication de M. Heim,.celui-ci attribue l’affaissement
consécutif de la chaîne de montagnes, non, comme je le suppose, à la contraction
ultérieure du noyau central de la terre, mais à l’action de la pesanteur. Tant
que les pressions latérales agissaient et refoulaient les couches vers l’axe de la région
en plissement, elles supportaient le poids des montagnes surexhaussées ;
mais une fois le plissement effectué, la pression latérale se réduit à si peu de chose
qu’elle ne résiste plus à l ’action de la pesanteur et que la chaîne des montagnes
s’enfonce et s’affaisse. A. Heim, in litt., 1er octobre 1891, et Beiträge zur geolog. Karte
der Schweiz XXV, 475 sq. 1891.
phase d’affaissement de la région centrale des montagnes ; pour cause
première les phénomènes orogéniques du plissement des montagnes
et de leur affaissement consécutif.
Supposons que le surexhaussement des Alpes ait coïncidé avec
l’apparition de l’époque glaciaire, et que, avec ou sans modifications
climatologiques, de causes extrinsèques du cosmiques, les glaciers se
soient développés à mesure que les Alpes se soulevaient, et en raison
de ce soulèvement; supposons que ce soit pendant la phase de crue
de la grande période multi-séculaire qui a amené l’énorme extension
des glaciers que la vallée du Rhône ait été creusée jusqu’aux couches
qui forment les.murailles du plafond du Léman; supposons que, les
Alpes s’affaissant, la poussée des glaciers ait été moins forte et qué,
par conséquent, l’affaissement des Alpes ait provoqué la phase de décrue
des grands glaciers ; nous aurons à tirer de ces suppositions et
hypothèses les conclusions suivantes :
A. L’époque glaciaire subalpine aurait comme cause principale le
surexhaussement des Alpes.
B. Ce serait essentiellement à l ’érosion glaciaire que nous aurions à
attribuer l’approfondissement extrême; de la vallée du Rhône qui l’a
fait descendre jusqu’au plafond du Léman. EWErosion glaciaire dans
le sens que j’ai exposé plus haut, c’est-à-dire trituration des roches
par le glacier, mais toujours en présence et sous l’action de l’eâu courante,
nécessaire pour enlever la poussière des roches triturées ; érosion
glaciaire et non excavation ; creusement d’une vallée en pente
descendante et non d’une cuvette ou d’un bassin ; je ne puis assez répéter
le point de vue précis auquel j ’entends rester.
C. Ce serait au moment du maximum des glaciers qu’aurait commencé
l’affaissement des Alpes, affaissement qui aurait eu pour première
conséquence la décrue des glaciers et comme seconde conséquence
l’établissement de la cuvette du lac. Ce serait donc peu après
cette date qu’il faudrait rapporter l’origine effective du Léman, lac Léman
d’abord rempli par le culot du grand glacier, à peu près immobile,
en état de disparition par fusion, lac Léman qui aurait apparu, sous la
forme de nappe liquide, seulement lorsque les glaces auraient été
liquéfiées.
D. L’alluvion ancienne de Genève, alluvion frontale du glacier, aurait
été déposée avant que le Léman existât comme lac; elle aurait été