en développements. Quel tableau de paysage serait plus séduisant que
cette
- « heureuse patrie,
« Où la nature assemble ses trésors. »
Qui ne serait joyeux de célébrer les attraits de ces lieux aimés et
charmants entre tous ? Mais la difficulté pour l’auteur, serait de trouver
la juste mesure, de répondre à ce que ses divers lecteurs ont le
droit de réclamer. Pour ceux qui connaissent le Léman, toute description
serait insuffisante à représenter à satisfaction le ¡paysage merveilleux
qui entoure le plus beau des lacs ; pour ceux qui ne le connaissent pas,
toute description, nécessairement sèche et froide, n’arriverait pas à
leur en faire deviner la grandeur et la beauté. Je m’arrête devant ces
obstacles et laissant la peinture pittoresque et colorée aux Juste Olivier,
(*) aux Louis Vulliemin, (2) aux Eugène Rambert,(3) aux Charles
Secrétan, (*) je m’en tiendrai à ce qui est mieux de ma compétence,
à la description objective et géographique, que du reste je ferai aussi
brève que possible.
Les hautes Alpes pennines sont bordées par une série de chaînes
secondaires, les Alpes latérales du nord, 0 plus ou moins parallèles
à l’arête principale qui va du Mont-Rose au Mont-Blanc ; au nord-
ouest des Alpes, et à peu près «parallèlement à elles, court la chaîne
du Ju ra ; entre ces deux massifs de montagnes, s ’étale le plateau
Suisse. La vallée du Rhône, qui a pris naissance dans le Valais, et a
creusé sa large et profonde dépression entre les Alpes bernoises et
valaisannes, se courbe à angle-droit, à Martigny, pour franchir les Alpes
latérales et se dirige vers le n o rd -o u e s t, entre les Préalpes vau-
doises et les Préalpes valaisannes; elle y forme ce que nous appelons
la plaine du Rhône, largement entaillée entre les cimes qui s ’étagent
à la suite des dents de Mordes et du Midi. Elle traverse ensuite le
plateau suisse et savoyard où elle s ’est creusée un ravin profond, et,
(>) Le canton de Vaud. Lausanne, 1837.
(2) Le canton de Vaud. 3e éd'. Lausanne, 1885.
(8) Passim.
P) Paysages vaudois, in Gazette de Lausanne. .
(6) Les Alpes latérales du nord comprennent les Hautes Alpes calcaires (Diahlerets,
Mordes, Dent du Midi) et les Alpes antérieures ou Préalpes, chaînes extérieures
aux hautes Alpes calcaires.
après avoir passé à Genève, elle s’échappe par la cluse du Vuache 0 )
en coupant le Jura, pour gagner les plaines de France et la Méditerranée.
Le Léman occupe dans cette vallée toute la partie qui s é-
ténd entre la plaine du Rhône bas-valaisan, et le pays de Genève; sa
partie orientale, le Haut-lac, est enserrée, entre les chaînes des Alpes
antérieures; ses parties centrales et occidentales, le Grand-lac et le
Petit-lac, sont dans le domaine du plateau mollassique.
La plaine du Rhône, qui forme la partie sud-orientale du pays du
Léman,commence à la cluse de St-Maurice et s étend jusqu au la c , c est
une vaste plaine d’alluvion, d’une vingtaine de kilomètres de longueur,
de 4 à 5km de largeur, qui descend vers le Léman avec une pente
douce de 2 pour mille environ. Cette plaine, qui n’est du reste qu’un
fond de vallée, est- peu inégalisée ; on y retrouve cependant, suivant
les parties, des terres d’alluvion de grande fertilité, les alluvions
grossières des torrents latéraux, des marécages et des marais tourbeux.
Elle est bordée par les talus des Préalpes vaudoises dont les
sommités principales sont Ghamossaire, 2118m, et la Tour d Àï, 2331m,
et par ceux dés Préalpes valaisannes, le Corbeau, 1995m, le Gram-
mont, 2175™. Les pentes de ces Alpes sont d’inclinaison moyenne, de
25 à .45 °/o ; par places, leur déclivité est bien plus forte. Ainsi, le
versant occidental du mont d’Arvel descend vers Villeneuve, avec
une inclinaison de 100 %, faisant ainsi un angle de 45° avec 1 h o rizon
; ainsi, la paroi du monticule rocheux de St-Triphon, est verticale,
surplombe même par places.
L’on a fait remarquer que, le plus souvent, le talus rocheux vient
couper à angle vif la plaine du Rhône; et qu’il n’y a pas à son pied de
cailloutis d’èboùlement ; l’on en a tiré une preuve de la faible ancienneté
du comblement de la plaine du Rhône. Cette observation est
juste, mais, si je ne me trompe, elle n’a pas une très grande portée :
elle signifie seulement que le-relèvement de la plaine est d’activité
plus rapide que la formation en talus d’éboulement, des débris arra-
(i) La~clüse qui traverse le Jura a été désignée par différents noms : cluse du
Fort de l ’Ecluse, mais ce nom est compliqué et peu èuphonique ; eluse de Longe-
ray, d’après un hameau qui y est logé, mais il est trop peu connu; cluse du Rhône
(Schardt), mais ce nom prête à confusion avec les autres cluses creusées par le
même fleuve ; cluse de Bellegarde, d'après le nom de la station de chemin de fer,
célèbre par les agréments ■ de la douane française, mais Bellegarde est en dehors
de la cluse proprement dite. J’adopte le nom de cluse du Vuache, montagne située
à l’est du Rhône, et séparée par ce fleuve du Grand-Crédo.