en place. Je citerai la Venoge, le Boiron près Morges, l’Aubonne, la
Versoie. ¡¡f Leur lit est en entier creusé dans un terrain de transport
composé de blocs ou cailloux erratiques, d’argiles glaciaires, de galets
et de sables remaniés. Nous ne savons pas à quelle profondeur
descend ce terrain de transport ; peut-être n’est-ce qu’à quelques mètres,
peut-être est-ce beaucoup plus bas. Toujours est-il qu’une telle
structure indique très sûrement que la vallée a été creusée autrefois
plus qu’elle ne l’est actuellement, et qu’elle a été comblée depuis lors
par le terrain de transport. Ce terrain, étant de nature discrète, a été
attaqué par l’érosion, et la vallée s’est approfondie jusqu’à la limite
de pente où l’érosion cesse. La pente limite n atteignant pas le plafond
primitif creusé dans la roche en place, nous pouvons affirmer que la
pente actuelle est moins inclinée que ne l’était la pente originelle de la
vallée.
Quelle est la cause qui a fait diminuer la pente 1 1l n ’y a guère qu une
réponse possible, c’est que la rivière débouchait autrefois, au point qui
est aujourd’hui son entrée dans le lac, à un niveau inférieur à la nappe
actuelle des eaux. Or rien dans l’histoire du Léman actuel ne nous
parle d’un niveau inférieur du lac. Nous n’avons pas vu sur la carte
hydrographique de terrasses submergées qui puissent nous y faire
penser ; au contraire, les terrasses fluvio-lacustres émergées nous apprennent
que, dans les temps post-glaciaires, au début de 1 époque
actuelle, le Léman a eu des niveaux plus élevés que ceux de nos jours.
Donc nous devons rapporter le creusement primitif de ces petites vallées
à une époque où il n’y avait pas encore ds lac, et, dans notre
hypothèse, à l’époque où le fond de la cuvette du Léman était parcouru
par un fleuve, le Rhône. Ces vallées, quelque insignifiantes
qu’elles paraissent, seraient donc d’un âge assez ancien.
Si l’on m’objecte que la carte hydrographique ne montre pas devant
ces vallées un relief indiquant l’amorce d’anciens ravins, je répondrai
que l’alluvion grossière m oderne a depuis longtemps comblé ces creux,
(i) p our la Venoge je n’ai point su trouver de seuil mollassique en aval de
Cossonay, soit sur une longueur de plus de l l km ; pour l’Aûbonne le premier seuil
mollassique est à 500“ en amont de la fabrique de poudre de Lavaux, à plus de
4km ^ lac ; le Boiron ne montre pas de seuil entre le lac et Lussy, peut-être même
plus baut; la Versoie. quoique présentant des l a m b e a u x miocènes, à la prise du
bief de la papeterie de Versoix sur la berge droite et un peü plus baut sur la
berge gauche, n’offre de véritable seuil mollassique apparent qu’en amont de la
Bâtie à 4km du lac.
aussi bien dans le lac qu’à l’air libre ; qu’ils sont masqués par le cône
d’alluvion des rivières. Puis je rappellerai que dans le golfe de Morges,
entre la Morge et la Venoge, nous avons trouvé un ravin submergé qui
semble se rapporter à un fait de ce genre. Il est évident que la preuve
serait bien plus décisive si nous pouvions démontrer que la couche du
terrain de transport- au fond de ces vallées à une grande épaisseur, et
prouver ainsi que ces vallées étaient primitivement beaucoup plus
profondes. Mais en l’absence de cette démonstration, il me parait
cependant que, de l’absence de seuil de roche en place dans nombre
de ravins des affluents directs du lac, j ’ai le droit de tirer un argument
assez plausible en faveur de l’hypothèse que je soutiens.
En somme nous avons quelques arguments, en petit nombre, et de
valeur très inégale, qui semblent parler en faveur de l’hypothèse d’un
surexhaussement des Alpes ; nous n ’en avons pas su trouver de contradictoires
à l’hypothèse. Nous pouvons donc, jusqu à réfutation, 1 admettre
comme possible. S’il y a eu surexhaussement des Alpes, il peut
y avoir eu creusement par érosion de profondes vallées descendant
jusqu’au niveau relatif indiqué par le plafond actuel des grands lacs
subalpins. Ce n’est pas improbable ; c’est même plausible. Un tel ordre
de vraisemblance est tout ce que nous pouvons demander à une théorie
qui traite de faits aussi éloignés, dans des temps aussi incertains,
pour des événements sur lesquels nous possédons aussi peu de renseignements.
Je dis que, pendant la phase de surexhaussement, les vallées ont été
creusées et approfondies par érosion aqueuse ; j’entends sous ce terme
aussi bien l’érosion de l’eau courante à l’air libre, que l’érosion de
l’eau courante sous le glacier, que l’érosion glaciaire. Ainsi que je 1 ai
expliqué plus haut, pour que le glacier érode efficacement, il est nécessaire
que le vallon soit parcouru par un torrent glaciaire, qui enlève à
mesure les poussières résultant de la trituration des roches ; c est bien
le glacier qui agit dans ce cas le plus puissamment pour réduire en
poudre le s pierres de la moraine profonde et le sol sur lequel il glisse,
mais c’est l’eau courante qui emmène les sables et limons produits par
ces frottements. Je ne serai donc aucunement empêché d’admettre que
le creusement des vallées, en tout ou en partie, se soit fait pendant
l’époque glaciaire, sous la pression très efficace de l’énorme glacier.
Pliase d’affaissement. Après la période de surexhaussement