Deux grains de scoi’ie de coke, gros comme des grains de blé.
De ces quelques exemples, je puis tirer les conclusions suivantes :
l t Au-delà d’un kilomètre du rivage, les cailloux ou graviers sont
très rares, absolument accidentels.
2° A moins d’un kilomètre du rivage ils sont plus fréquents.
3° Ces cailloux sont assez lourds, — j’en ai pesé de 191 grammes,
— pour qu’on ne puisse les supposer entraînés par les courants du
lac ; ils se trouvent à une profondeur telle que l’action des vagues ne
peut expliquer leur présence. Celle-ci est donc due à une action de
transport par la surface du lac.
■ 4° Ce ne sont pas des cailloux glaciaires du sol primitif du lac qui
aurait été dénudé ou n’aurait été recouvert que par une très faible
couche d’alluvion. Le grain de terre cuite du dragage no I est d’origine
moderne.
5° Les procédés de transport suivants sont les seuls admissibles :
a La chute hors des barques chargées de pierres qui circulent sur
le lac ; cette origine est la seule possible pour certains graviers trouvés
fort loin des rives. Ainsi, dans un dragage fait le 1er novembre 1877
par 65™ de, fond, devant Morges, je trouvai une grande quantité de
graviers et de sables glaciaires ; deux dragages de contrôle faits sur la
même ligne, l’un par 50m, l’autre par 80m de fond, ont donné de l’argile
absolument pure de toute inclusion de sable ; de là je conclus que les
graviers et sables du dragage à 65m étaient dus à une cause fortuite.
Quant à l’origine plus précise de ces graviers, elle m’a été indiquée
par une trouvaille faite le 12 décembre 1878 dans le produit d’un dragage
par 110™ de fond à 3km du rivage devant Morges. Deux cailloux
roulés, du poids de 25 et de 12s, étaient noyés dans une argile très fine.
La plus grosse de ces pierres était recouverte du revêtement de sable
et de fin gravier fortement adhérent qui caractérise certaines gravières
des anciennes terrasses d’alluvion des bords dü lac. Mes bateliers, qui
s ’occupent habituellement au transport de ces graviers, y ont immédiatement
reconnu l’objet de leur industrie. Ces graviers tombés des
barques sont distribués d’une manière nécessairement fort irrégulière ;
une telle origine ne peut être attribuée aux pierres et graviers qui
sont localisés sur une bande de un kilomètre de largeur à partir de la
rive.
b Le transport par les racines d’arbres doit être peu important. Les
arbres arrachés à la rive par l’érosion des hautes eaux du lac ont
leurs racines lavées par les vagues avant que la plante soit entraînée
en plein lac; les arbres amenés au lac p ar les eaux des torrents débordés
sont peu nombreux et leurs racines sont de même lavées par
les courants violents qui les charrient.
c II ne reste comme moyen de transport un peu efficace que les
glaçons, glaces de rivage et glaces de rivières. (*) Ces glaçons, entraînés
dans le lac, ne tardent pas à fondre dans les eaux relativement
chaudes de la région pélagique, et les sables et cailloux dont ils sont
chargés ne peuvent ainsi pas être transportés fort avant dans le lac.
De là leur localisation'dans une bande peu large, près des côtes,
6° Ces cailloux et graviers renfermés dans l’argile lacustre, sans être
très communs, ne sont pas cependant extrêmement rares ; dans mes
dragages en région profonde, exécutés à moins d’un kilomètre de la
rive, j ’en trouve au moins une fois sur d ix ; d’une autre part leur
transport par les barques, les racines et les glaçons, doit être un fait
très extraordinaire. L’on peut conclure, semble-t-il, de la rareté du
transport et de la fréquence relative des graviers, que le dépôt de l’al-
luvion du lac doit être peu important, que la couehe qui se précipite
annuellement doit être peu épaisse, que par conséquent les corps
étrangers tombés au fond du lac sont longtemps avant d’être enfouis
dans le limon, que par conséquent notre drague, quoique pénétrant
peu profondément, récolte l’argile et les cailloux déposés au fond du
lac pendant un grand nombré d’années.
J’ai un seul fait, et encore est-il peu précis, qui puisse donner une
idée de l’activité du dépôt de l’alluvion lacustre. Dans un dragage fait
le 10 juillet 1877 par 60™ de fond, devant Morges, j’ai trouvé un morceau
de scorie de coke, enfoui dans une couche intacte de limon, à
à 3.5cm de la surface. Cette scorie, provenant évidemment d’un bateau
à vapeur, ne peut pas être plus ancienne que 1823, époque du lancement
du premier pyroscaphe sur le Léman, et datait au plus de
54 ans. Elle peut être beaucoup plus récente.
0) Nous ne connaissons pas, dans le lac, la formation des glaces de fond (Anchor-
ice, Grundeis), mais comme il s’en forme dans les rivières, je dois les indiquer
aussi. . ,